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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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manteau de fourrure et son chapeau de poil lorsqu’une voix provenant du fond du petit cabinet se fit entendre.
    — Docteur Talham !
    C’était la vieille. Pas question qu’on l’oublie, surtout aujourd’hui, alors qu’il se passait un événement important.
    — Ne vous occupez pas d’elle, s’excusa François Lareau, embarrassé.
    — Laissez, monsieur Lareau, fit Talham dans un sourire.
    Dire que j’allais oublier Mémé Lareau ! J’ai même apporté un remède à votre terrible mère, ajouta-t-il avec un clin d’œil complice.
    Il poussa la porte de la petite pièce d’où provenait une tenace odeur de pot de chambre qui lui arracha une grimace.
    Machinalement, il sortit son mouchoir de sa poche pour s’en couvrir le nez. Il repéra la vieille dame, assise sur la paillasse d’un vieux lit cabane*.
    — Bonjour, Mémé Lareau. Comment allez-vous ce matin ? Vous me semblez avoir une excellente mine.
    — Vous êtes un grand menteur, comme tous les docteurs. M’avez-vous apporté mon bon remède, au moins?
    Vous savez bien que je suis sur le point de rejoindre mon défunt au cimetière. Je ne suis plus capable de me lever, fit-elle en grognant.

    — Allons, vous allez en enterrer quelques-uns avant d’aller rejoindre le bon Dieu. Vous êtes aussi solide que votre père, le voyageur Antoine Ménard, dont on m’a dit que c’était une force de la nature. On vous a appris que la veuve Robert est au plus mal ?
    Elle lui offrit un large sourire édenté. La vieille aimait apprendre ce genre de nouvelle. Cela l’amusait de tenir la comptabilité mortuaire de ses contemporains qui la précé-
    daient dans l’autre monde.
    Une fois la nouvelle assimilée, la vieille matoise le fixa d’un air narquois.
    — Je le savais. Je sais tout ce qui se passe dans cette maison. J’ai vu avant tout le monde que Marguerite était grosse, affirma-t-elle non sans malice. Ça se lit dans les yeux, ces affaires-là !
    — Et bien entendu, vous n’en avez rien dit.
    — Pourquoi j’aurais parlé avant le temps? Elle pouvait bien le perdre et on aurait vite oublié tout ça, dit-elle en claquant des doigts. Pftt ! Plus rien.
    — C’est vrai. Les sages-femmes prétendent en effet que cela arrive chez les jeunes femmes, parfois. Mais si Marguerite tient de sa mère ou des Ménard, elle en aura au moins une douzaine à terme.
    — Ça, c’est la vérité ! Les femmes de notre famille sont fertiles. Et fortes, pardieu! Alors comme ça, vous allez devenir mon petit-fils par alliance ?
    — Mais oui ! Et c’est tout un honneur pour moi, fit-il en s’inclinant.
    — Allons, docteur, ne m’en contez pas, je suis trop vieille pour ça. Combien vous a payé le sacripant de Boileau pour que vous épousiez Marguerite? Car il fallait bien qu’il s’en mêle, celui-là. Ma bru ne savait plus quoi faire.

    Et mon pauvre François, complètement défait qu’il était.
    — Et si je vous disais, madame Lareau, qu’il n’y a pas eu le moindre sol versé. Pas un sou, Mémé, je vous le jure. D’ailleurs, je n’ai pas besoin d’argent.
    — C’est qu’il vous a accordé une faveur. J’ie connais. Le déshonneur l’aurait éclaboussé comme de la crotte de cheval qui revoie sous les roues de son beau carrosse.
    La vieillarde avait sa façon bien { elle d’énoncer ses idées.
    — Vous êtes bien maligne, Mémé. Mais vous savez aussi que votre petite-fille est fort jolie et très bien élevée. C’est un excellent parti.
    — Elle vous donnera des fils, prédit-elle en l’observant attentivement. C’est votre genre, ça. Si vous aviez été le père de celui-l{, je l’aurais su aussi. Comme bien d’autres choses, ajouta-t-elle d’un ton énigmatique. Marguerite n’a jamais eu d’amoureux, mais c’est une rêveuse. Faites attention à ça !
    — Vous n’avez plus { vous inquiéter pour elle. Je vais l’épouser et nous aurons cet enfant aux yeux de tous.
    — Grand bien vous fasse, docteur ! Dans mon temps, vous savez, on ne s’en faisait pas trop avec ces histoires-là.
    J’en ai vu, des mariages avec l’épousée, un enfant dans les bras ! Ou le ventre trop rond sous le tablier ! Dans le temps, lorsqu’il fallait remonter du lac Champlain en canot pour recevoir les services de la religion, comme disent les curés, on faisait tout faire à la fois. Des fois, le curé en baptisait deux ou trois de la même famille. Mais aujourd’hui, on se bâdre pour un rien. Y paraît que vous sauvez ma petite-fille

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