Marie Leszczynska
consulté d’éminents confrères, le médecin La Peyronie pratique une saignée qui semble apaiser la malade. Louis XV reste auprès de Pauline jusqu’à deux heures du matin. Mais, dans la nuit, son état empire, elle réclame son confesseur. Le 9 septembre, à sept heures du matin, la marquise de Vintimille expire. Elle avait vingt-neuf ans.
Le roi se réveille vers dix heures et demande aussitôt des nouvelles à La Peyronie. « Mauvaises, Sire », répond le médecin. Louis XV s’effondre. « Tout le monde a été très surpris du chagrin réel que cette mort a causé au roi, remarque Barbier. Il n’a jamais paru si touché, et il en a donné des marques trop publiques. Il n’a vu personne ce jour-là, et il s’est retiré pendant quatre ou cinq jours à Saint-Léger [4] , avec quatre ou cinq personnes », dont Madame de Mailly.
Marie Leszczyńska a suivi les aventures de Madame de Vintimille grâce à la duchesse de Luynes, toujours bien informée. Elle a songé à la colère de Dieu dans ce dénouement tragique. Dans le silence de son oratoire, elle va longuement prier pour la défunte et pour le rachat des fautes de son époux.
Reclus dans sa retraite de Saint-Léger, Louis XV pleure la disparue, refusant de manger et de chasser. Madame de Mailly
, bouleversée, se joint parfois à ses pleurs. Le roi culpabilise. Assailli de remords, n’osant plus retourner à Choisy, théâtre de ses amours interdits, il s’enferme dans une méditation douloureuse qui dure près de six semaines. Luynes témoigne : « Il paraît, par l’air sérieux du roi et par la manière scrupuleuse dont il entend la messe, que les réflexions et l’habitude forment un grand combat en lui. »
Manigance signée Richelieu
Le temps portant remède, la vie reprend son cours. Le roi retourne à la chasse, en dépit d’une forte crise de rhumatismes qui le fait souffrir. Madame de Mailly
reprend sa place de maîtresse et emménage dans le bel appartement mansardé qu’il destinait à Pauline [5] . Désormais assurée de sa faveur, elle a cédé sa charge de dame du palais à l’avant-dernière de ses soeurs, la jeune marquise de Flavacourt. La reine approuve cette nomination qui la débarrasse de la Mailly
: « Le roi le trouve bon, écrit-elle à Fleury, je le trouve très bien aussi […], d’ailleurs le roi est le maître. »
Mais le drame a secoué Louis XV et les petits soupers chez sa maîtresse n’ont plus le même attrait. « Sainte Mailly
», comme la surnomme le duc de Richelieu, n’amuse plus le roi. Sa faveur décline jusqu’au coup de grâce, asséné un jour de 1742 par sa plus jeune soeur, la redoutable marquise de La Tournelle, cinquième demoiselle Nesle.
Richelieu n’est pas étranger à cette disgrâce. Arrière-petit-neveu du célèbre cardinal, le duc traîne derrière lui une réputation de libertin et d’intrigant qui ne le fait guère apprécier du cardinal de Fleury. Richelieu avait espéré supplanter le vieux précepteur avec la complicité de Madame de Mailly
; mais, en refusant d’entrer dans son jeu, la favorite a signé sa perte. Rusé et pervers, le duc de Richelieu a choisi de lui opposer Marie-Anne de La Tournelle, la plus jeune et la plus jolie de ses soeurs. Une beauté hautaine qui a connu son heure de gloire en 1740 grâce au portrait qu’en fit Nattier. La toile était si belle et si ressemblante qu’elle assura la réputation du peintre.
Une soeur Nesle chasse l’autre
En septembre 1742, la mort de sa tante, la duchesse de Mazarin, laisse une place vacante de dame du palais de la reine. Madame de La Tournelle demande la place et l’obtient sans difficulté. Cette femme de vingt-cinq ans à la beauté éclatante et aguicheuse ne tarde pas à séduire le roi. Mais, gouvernée par ses intérêts plus que par ses sens, l’intrigante ne cède rien à Louis XV tant qu’il ne fait pas d’efforts pour la conquérir. Interrogé par le roi qui s’impatiente, Richelieu aurait répondu, selon Madame de Brancas : « Une maîtresse n’est point un portefeuille, et si vos ministres vous apportent le leur à votre Conseil, je doute fort qu’ils puissent mettre Madame de La Tournelle dans vos bras. Il faut lui plaire et commencer par lui dire que vous en êtes épris. »
Pour conquérir la belle, conseille Richelieu, il faut d’abord renvoyer sa soeur de Versailles. Mais Louis XV hésite, assailli de scrupules face au désespoir de Madame de Mailly
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