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Marie

Marie

Titel: Marie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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cette
manière. Je lui dois la vie…
    Un
grincement aigu l’interrompit, faisant sursauter le jeune rabbin Jonathan.
    — Ah,
certainement pas !
    Guiora
pointa un doigt sec vers la poitrine de Joachim.
    — Certainement
pas ! Tu ne dois la vie qu’à la volonté de Yhwh. Je connais ton histoire
de Tarichée. Ta violence, ici, à Nazareth, et ton séjour sur la croix. Tu es
descendu de cette croix non parce qu’un gamin t’en a décroché, mais parce que
Yhwh l’a voulu ! Sans Sa volonté, tu y pourrirais.
    Le doigt
pointé et le regard incendiaire de Guiora se posèrent sur Barabbas comme une
menace.
    — Pas
de quoi être fier de tes exploits, brigand que tu es. Tu n’as été que
l’instrument de l’Éternel ! Ainsi sont nos destins : la volonté de
Dieu !
    Écarlate,
Barabbas se dressa.
    — Veux-tu
dire que Dieu souhaite la folie d’Hérode et son emprise sur la Galilée ?
Sur Israël ? Qu’il souhaite que ses mercenaires nous humilient et nous
tuent ? Qu’il souhaite que les précepteurs du Temple nous volent et nous
traînent dans la boue ? Qu’il souhaite toutes ces croix où pourrissent des
Juifs comme toi ? Si c’est le cas, Guiora, gronda Barabbas, je te le dis
bien en face : ton Yhwh, tu peux te le garder. Et même : je le
combattrai autant qu’Hérode et les Romains !
    Les cris
firent trembler les feuillages des platanes au-dessus de leurs têtes.
    — Ne
blasphème pas ! s’interposa Nicodème. Ou je devrais m’en aller. Guiora
exagère. Ses mots dépassent sa pensée. Dieu n’est pour rien dans nos malheurs…
    — Si !
glapit Guiora. Mes paroles sont justes, et tu m’as très bien compris,
pharisien ! Vous gémissez tous : Hérode ! Hérode ! Tout est
la faute d’Hérode ! Que non. Tout serait la faute du peuple à la nuque
raide. C’est ce que disait Moïse, et il avait raison. Peuple à la nuque raide
qui erre dans le désert car il ne mérite pas Canaan. Douleur et honte. Voilà où
nous en sommes !
    Les
protestations enflèrent de nouveau, mais sans impressionner Guiora, dont la
voix sèche s’imposa.
    — Qui,
en ce pays, suit les lois de Moïse, comme le réclame le Livre ? Qui prie
et se purifie comme le prescrit la Loi ? Qui lit et apprend la parole du
Livre pour bâtir le Temple dans son cœur, ainsi que l’a ordonné le prophète
Ezra ? Personne. Les Juifs d’aujourd’hui singent leur amour de Dieu. Ce
qui leur plaît, c’est d’assister à des courses de chevaux, comme des Romains,
d’aller voir jouer des pièces de théâtre, comme des Grecs ! Ils couvrent
d’images les murs de leurs maisons. Sacrilège des sacrilèges, ils s’activent
désormais les jours de shabbat ! Et jusque dans le sein du sanhédrin, où
le commerce surpasse la foi.
    Guiora
conclut avec fureur :
    — Ce
peuple est impie. Il mérite cent fois sa punition. Hérode n’est pas la cause de
vos malheurs : il est la conséquence de vos fautes !
    S’ensuivit
un bref silence accablé, que rompit une voix profonde. Celle d’Éléazar, le
zélote de Jotapata.
    — Je
te le dis du fond du cœur, sage de Gamala : tu te trompes. Dieu désire le
bien de Son peuple. Il nous a élus dans Son cœur. Nous, et nul autre. Je
respecte tes prières, mais je suis aussi pieux que n’importe quel essénien.
S’il en est un qui blasphème, ici, je crains que ce ne soit toi.
    — Tu
n’es qu’un pharisien, comme l’autre ! s’obstina Guiora, la barbe hérissée
de fureur. Vous, les zélotes, vous voulez qu’on vous estime supérieurs parce
que vous assassinez des Romains. Mais par la pensée, vous n’êtes que des
pharisiens…
    — Serait-ce
une insulte d’être pharisien ? s’offusqua Nicodème, perdant son calme.
    Avant que
Guiora ne réplique, Joseph d’Arimathie, qui n’avait encore rien dit, lui posa
une main très ferme sur le bras et déclara avec une autorité qui surprit tout
le monde :
    — Cette
dispute est vaine. Nous connaissons nos divergences. À quoi bon les
creuser ? Essayons de parler avec amitié.
    Le zélote
le remercia d’un signe de tête.
    — Nul
plus qu’un zélote n’est soumis aux lois de Moïse. Pour nous aussi, le
comportement d’Hérode est une souillure. L’aigle d’or des Romains qu’il a
permis de dresser sur le temple de Jérusalem brûle nos yeux de honte. Nous
aussi, nous reprochons au peuple de n’être ni sage ni pieux, comme le veut
Yhwh. Mais je te le répète, Guiora, l’Éternel Tout-Puissant ne peut

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