Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
Vom Netzwerk:
au-dessous de la ligne de flottaison, capitaine, haleta Sam, à l’aplomb du mât de misaine. Une déchirure de trois pieds sur quatre, un peu moins à l’intérieur.  
    Mac Nabb se retourna vers le lieutenant qui l’accompagnait.  
    — Dès que la toile sera fixée, envoyez les charpentiers dans la cale.  
    Le navire plongeait de l’avant, mais le vent était tombé et une houle courte avait remplacé les grandes lames déferlantes de l’ouragan. Avant la fin du jour, le grand perroquet fut remis en place et, le lendemain, on gréa un mât de fortune à la misaine.  
    — Avec ça, dit Sam, on ne pourra guère filer plus de trois ou quatre nœuds, ce qui met la Jamaïque à deux jours et La Havane à dix ou douze jours. Je me demande ce que le vieux Mac Nabb va décider.  
    Mac Nabb choisit la deuxième solution : l ' A bigail maintint son cap nord-est.  
    On s’occupa ensuite des esclaves. Il y avait une vingtaine de morts et de blessés irrécupérables. Ils furent balancés à la mer et Bernard suivit, gorge nouée, la ronde des requins dans le sillage.  
    Une frégate anglaise héla l’ Abigail au large de Grand Caïman et proposa avec insistance de l’escorter jusqu’à la Jamaïque, mais Mac Nabb refusa et maintint sa route.  
    Le 30 mars, la vigie reconnut le cap San Antonio et l’on vira est-nord-est. La manœuvre fut difficile, car le navire répondait de plus en plus mal à la barre et donnait de la bande. Les avaries devaient être plus graves qu’on ne soupçonnait. L’ Abigail ne filait plus que deux nœuds quand, le 3 avril, on jeta l’ancre devant La Havane. Le lendemain, jour de ses dix-sept ans, Bernard assistait en compagnie de Sam au déchargement des esclaves dans des allèges spécialement aménagées. Protégée par des fortifications impressionnantes, La Havane avait, de loin, l’air d’une ville avenante. Des navires marchands de toutes tailles ainsi que plusieurs navires de guerre anglais et espagnols étaient ancrés dans le port.  
    — Nous allons y rester longtemps ? demanda Bernard.  
    — Je le crains. Cette coque percée n’arriverait même pas à traverser le détroit de Floride.  
    Comme en réponse à la question de Bernard, le sifflet du bosco appela l’équipage devant le gaillard d’arrière.  
    — Je n’irai pas par quatre chemins, boys, dit Mac Nabb. Le choc a faussé et disjoint trop de choses dans la carène pour que je puisse espérer réparer rapidement. C’est déjà un hommage du Seigneur à votre habileté et à votre courage qu’il nous ait permis d’arriver jusqu’ici. Il est inutile de Le tenter davantage. Je vais désarmer le navire et le mettre au radoub pour Dieu sait combien de temps. Ceux d’entre vous qui désirent rentrer aux Etats-Unis recevront leur paye à partir de ce soir. Ils trouveront facilement un passage pour La Nouvelle-Orléans, Charleston, Baltimore ou New York : il ne manque pas de navires en peine d’équipages. Les autres qui désirent comme moi naviguer encore sur l’ Abigail seront mis en congé sans paye. Ils devront se débrouiller pour vivre ici jusqu’à la fin des réparations. M. Lebret va se rendre à Baltimore pour prendre des instructions auprès de nos armateurs. Quant à moi, je resterai à La Havane avec mon navire. Vous pourrez toujours me trouver à l’hôtel La Perla. Et maintenant, boys, un triple hourra pour la vieille Abigail. Elle l’a bien mérité !  
    Quand les acclamations se furent tues, Bernard échangea un regard avec Sam.  
    — Moi, je reste, dit-il.  
    —  So do I, mate ! moi aussi ! Nous trouverons bien moyen de nous engager sur un de ces bateaux de pêche que je vois ancrés là-bas. C’est comme ça que j’ai commencé sur la mer, au large des côtes du Maine.  
    Ils n’eurent en effet aucun mal à trouver dans une taverne du port un patron pêcheur qui cherchait des hommes d’équipage pour sa flottille de langoustiers. C’était un Galicien madré qui leur offrit un salaire de misère. L’accord fut scellé par une tournée de mohitos au rhum brun et à la menthe fraîche.  
    La Havane était une ville séduisante. Elle n’avait ni la propreté un peu guindée de Baltimore, ni le charme villageois de Pointe-à-Pitre, mais il régnait une atmosphère bon enfant et, de jour comme de nuit, il n’y avait guère d’endroit où l’on n’entendît résonner quelque instrument exotique. De belles maisons tarabiscotées, dont l’architecture

Weitere Kostenlose Bücher