Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
le confessionnal, lors des «retraites fermées» auxquelles ils astreignent même les enfants. Ces sombres bonshommes se délectent du sujet, posent des questions d’inquisiteurs. Tu as parlé tout à l’heure de leur obsession pour les maillots de bain. Imagine-les enquêter sur les turpitudes des petites filles.
    Cette obsession collective des péchés de la chair pouvait faire reconnaître comme légitimes les pires cruautés, si elles servaient à réprimer des pulsions impures.
    — La petite Marie-Jeanne semble avoir été une participante à ces petits... jeux, poursuivit Thalie.
    Aucun autre mot ne semblait mieux convenir pour désigner des activités de ce genre.
    — Si Napoléon Francœur décide d’aborder cela au tribunal, admit Mathieu, elle va mourir de honte.
    — Il n’oserait pas.
    — Ne parie pas là-dessus, tu perdrais.
    — Tu parles d’un... goujat!
    Des mots bien plus percutants se bousculaient dans son esprit. Finalement, sa maîtrise parfaite de deux langues doublait son bagage de termes orduriers.
    — Si jamais Marie-Jeanne préfère parler à une fille, dis-le moi. Je pourrais aider dans cette histoire.
    — Je ne sais pas...
    — Dans certaines circonstances, une femme préfère parler à une autre femme. Cela vaut aussi pour les petites filles. Crois-moi, je peux me rendre utile.
    Le jeune homme hocha la tête, un sourire amusé sur les lèvres.
    — Je lui transmettrai ton offre sans faute. Bien plus, je l’encouragerai à l’accepter. Elle sera la seule à décider, toutefois.
    — Je l’entends bien ainsi.
    Le garçon se leva du fauteuil, posa la main sur la poignée de la porte.
    — Je vais aller faire un tour à la Basse-Ville. J’ai négligé une jolie brunette ces derniers temps. Comme notre cousin Edouard, un homme pieux, ferme les portes de son magasin de bonne heure en ce Vendredi saint, je la trouverai à sa pension.
    — Avec elle, c’est sérieux ?
    Il se tut, comme s’il devait lui-même faire le point sur la question avant de répondre.
    — J’ai beaucoup de mal à me projeter dans un futur lointain. Pour l’heure, je ne veux que voir la fin de ce procès et réussir mes examens de fin d’année. Quant à la suite des choses...
    Le jeune homme hésita un moment, soucieux de bien traduire ses sentiments.
    — Je me suis précipité chez elle pour discuter de Marie-Jeanne, après chacune de mes expéditions à Sainte-Philomène.
    C’est ce que je ferai tout à l’heure. Elle a une façon de m’écouter qui me fait beaucoup de bien.
    Mathieu marqua une pause, puis déclara :
    — Tu peux imaginer la mine de Françoise, si j’abordais ce sujet avec elle ?
    — Elle a peut-être des ressources que nous ignorons tous les deux.
    — J’en doute. Amélie, avec ses boucles blondes et ses airs un peu évaporés, me fournirait une meilleure oreille, je pense. Au moins, je ne craindrais pas de la voir défaillir à chaque évocation déplaisante.
    Thalie quitta son lit pour le prendre par le bras.
    — Ah ! Une fille peut trop aimer les garçons et avoir tout de même les deux pieds sur terre. Mais le plus important, dans ta comparaison de Flavie, Françoise et Amélie, c’est que toi, tu considères la première comme une meilleure compagne pour toi. Dans cette histoire, seuls tes sentiments ont de l’importance, n’est-ce pas ?
    Le garçon contempla sa sœur, un sourire narquois sur les lèvres.

    — Etudier la médecine te rend si raisonnable ? Ou alors tu continues de croître en grâce et en sagesse ?
    — Un peu des deux, je suppose. Je t’accompagne à la porte et je vais parler un peu avec Gertrude ensuite. Elle craint toujours que je me fasse protestante, à McGill.
    — Pour une vieille qui déteste tous les curés, c’est une angoisse étrange.
    — Nous sommes tous un peu étranges, dans cette maison.

    Chapitre 16

    Le lendemain, à son arrivée à l’hospice Saint-Joseph-de-la-Délivrance, Mathieu regretta de ne pas avoir demandé à Mailhot de placer les enfants dans un établissement de Québec. Le trajet, ce deuxième jour, lui avait paru plus long que la première fois. La fillette se trouvait déjà dans la petite pièce attenante à la cellule de la portière. Une jeune religieuse prenait place sur la chaise voisine de la sienne, les yeux baissés, les deux mains jointes dans son giron.
    «Voilà donc notre nouveau chaperon», constata le jeune homme.
    — Bonjour, ma sœur ! salua-t-il à haute voix.
    Elle raidit un peu le corps,

Weitere Kostenlose Bücher