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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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par des actes analogues, ou semblables, au cours de l’existence de l’accusée. Bien sûr, pas les mêmes excès, mais des comportements indiquant le penchant de la personne à des actions perverses. A ma connaissance, il n’y en a pas.
    L’avocat accusa le coup. Son interlocuteur gagnait sa vie à témoigner dans des causes de meurtre. Agé de quarante-deux ans, robuste, le geste et le débit lent, son opinion se graverait dans la mémoire des jurés.
    — Etes-vous en état de jurer qu’au moment où l’accusée a commis les actes d’atrocité relatés dans la preuve, elle jouissait de facultés mentales suffisantes pour en connaître la portée et pour en être responsable ?
    — Je pense qu’elle en connaissait la portée jusqu’au point d’en être responsable.
    — Pouvez-vous le jurer ?
    — Oui, monsieur.
    Le docteur Brochu n’était pas allé aussi loin. Quand l’avocat de la défense regagna sa place, le procureur de la Couronne se leva pour déclarer :
    — Votre Honneur, je n’ai pas d’autres témoins à faire entendre.
    Le juge Louis-Philippe Pelletier regarda l’horloge, puis conclut :
    — Nous reprendrons demain matin avec la plaidoirie de la défense.
    Ce serait le dernier acte de cette tragédie.

    *****
    Les agents du palais de justice se lassaient de vérifier les cartes professionnelles des spectateurs ou, plus probablement, de généreux
    pourboires
    les
    rendaient
    moins
    attentifs.
    Toutes les banquettes ployaient sous le poids des curieux, certains se tenaient debout près des murs de la salle. Les conversations devenaient assourdissantes.
    Comme d’habitude, l’entrée des jurés marqua le début des travaux. L’accusée arriva ensuite, cette fois accompagnée du directeur de la prison et de deux matrones. La silhouette noire imposa le silence, tous les regards fouillaient le voile pour découvrir les traits, les yeux.
    Le juge entra, demeura un moment immobile près de la porte dérobée pour contempler l’assistance trop nombreuse.
    A moins d’une demande express de l’un des avocats, il décida de ne pas réclamer une nouvelle vérification des identités. Après avoir gagné sa place, il commença:
    — Je ne tolérerai aucun désordre, aucune manifestation.
    Dès qu’un son déplacé atteindra mon oreille, je ferai vider la salle !
    Chacun se résolut à retenir son souffle, de peur de rater le dénouement du drame.
    — Maître Francœur, vous avez la parole.
    L’avocat, élégant sous sa toge noire, rasé de près, coiffé avec soin, quitta sa table pour s’approcher de la boîte des jurés.
    — Messieurs, depuis quelques jours, vous avez dû entendre une histoire terrible, celle d’une pauvre folle résolue à martyriser une enfant jusqu’à la mort.
    Douze paires d’yeux fixées sur lui, le plaideur dressa la liste des sévices infligés à la victime. Maintenant, il n’en contestait plus aucun, peut-être même souhaitait-il en ajouter.
    — L’intensité de ces mauvais traitements a augmenté au fil des semaines, jusqu’à ces brûlures avec un tisonnier rougi au feu ! L’horreur a grandi au fur et à mesure que progressait la grossesse de l’accusée !
    Les yeux se portèrent machinalement sur la silhouette noire de Marie-Anne Houde. Ses vêtements amples dissimulaient entièrement son état «intéressant».
    — Elle ne se cachait pas, comme le ferait toute personne responsable de ses actes à l’heure de commettre un crime.
    Elle faisait des autres enfants ses complices. Elle disait aux voisins que le caractère difficile d’Aurore l’obligeait à la châtier sévèrement.
    Bien sûr, Francœur n’allait pas préciser qu’elle prenait soin de ne pas envoyer les enfants à l’école, qu’elle les menaçait pour maintenir leur silence, qu’elle expliquait les marques les plus évidentes sur le corps de sa victime en invoquant la tuberculose. Ce n’était pas son rôle.
    — Un criminel intelligent a toujours un motif ! Quel est celui de Marie-Anne Houde ? Elle ne tirerait aucun avantage financier du décès des enfants : le contrat de mariage le montre bien.
    Le document avait été déposé en preuve. Les biens de l’un des époux, à sa mort, iraient à l’autre, et non aux enfants.
    — Si cette femme jouissait de ses facultés, elle se serait empressée de faire disparaître les instruments utilisés pour infliger des sévices. Ils sont tous là, sur la table. Elle n’aurait pas laissé des voisins faire la toilette du petit

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