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Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Titel: Mémoires de 7 générations d'exécuteurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri Sanson
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maître Rendu, notaire à Paris. Desrues savait tout le prix d’un acte comme celui-là dans l’exploitation qu’il entendait entreprendre. Il y était stipulé que les futurs époux seraient communs en meubles, immeubles et conquets. Desrues estimait son apport en marchandises, meubles et créances liquides, à vingt mille livres. La dame Caron, évaluait à mille livres le trousseau et les meubles de la demoiselle Marie-Louise Nicolais, sa fille ; et enfin, en faveur de ce mariage, ladite dame Caron, pour ce autorisée par son mari, constituait en dot une part de la succession non encore liquidée, mais inventoriée, de messire Jacques-Jean Despleignes du Plessis, chevalier, seigneur de Caudeville, Herchies et autres lieux, part fixée au tiers, les autres ayant-droits étant un sieur Laurent, oncle à la mode de Bretagne, et une Marie-Charlotte Courtonne, cousine germaine du défunt. Cette part était fixée au tiers des droits de la dame Caron.  
    Desrues n’est pas plutôt en possession de ce qu’il a considéré comme devant être l’instrument de sa fortune à venir, qu’il se met à l’œuvre avec l’énergique âpreté qui le caractérise.
    La donation de son contrat est signifiée par lui à ses co-héritiers, par acte insinué à Montereau, ès mains de l’oncle Laurent, et à Paris, ès mains des époux Courtonne.
    Ce jalon posé, il songe à s’approprier en son entier la part réservée à sa belle-mère, et les époux Caron ne sont pas de force à tenir tête à ce rude jouteur ; il les caresse, il les amadoue si bien, il fait si éloquemment ressortir à leurs yeux les difficultés dont il les débarrasse, qu’ils acceptent presque avec reconnaissance la transaction qu’il leur propose.
    Les deux tiers réservés au savetier et à sa femme leur furent rachetés moyennant un principal de trente mille livres, dont cinq mille étaient acquittées par voie de compensation, ce qui signifiait que Desrues se taillait un supplément de dot dans la succession. Sur les vingt-cinq mille livres qui restaient, les époux Caron reçurent mille livres ; le reste fut échangé en une rente de douze cents livres à leur profit, avec cette clause qu’en cas de décès de la dame Caron, la moitié de cette rente serait servie au mari survivant.
    Mis au lieu et place de ses hoirs, Desrues attaqua les cohéritiers. Il eut facilement raison de l’oncle Laurent. C’était un de ces bourgeois du vieux temps qui faisaient de la philosophie épicurienne sans le savoir, une des plus vaillantes fourchettes de la ville de Montereau, qui accomplissait avec la même béatitude tous les actes de son existence, et qui trouvait que le papier timbré noirci à son intention avait déjà trop souvent troublé le calme de ses facultés digestives. Il accepta les offres de Desrues et consentit aisément à s’accommoder, pour sa part, de la vaisselle d’argent et des meubles du donjon de Caudeville.
    En revanche, les époux Courtonne se montrèrent intraitables ; conseillés par un de ces procureurs madrés et retors qui foisonnaient dans la grande ville, ils n’étaient nullement disposés à céder leurs droits sans compensations avantageuses, et ce n’était pas l’affaire de Desrues.
    Toutefois, le partage se trouvait déjà singulièrement simplifié. Sa part n’était point encore la part qu’il avait rêvée, c’est-à-dire celle du lion ; cependant il arrivait pour moitié dans la division de cet héritage, dont le neuvième seulement lui avait primitivement appartenu, et il pouvait baser quelques opérations sur une liquidation dont son imagination resterait libre d’embellir les futurs résultats aux yeux de ceux qu’il aurait à y intéresser.
    Il était temps, car le petit épicier se trouvait aux prises avec de sérieux embarras.
    Bien avant son mariage, il ne s’en était pas tenu à débiter son poivre et sa cannelle. Affriandé par ses appétits, il avait mordu à l’appât des gros bénéfices que présentent les affaires dites véreuses, négociations interlopes, achat et vente de créances et de marchandises, prêts sur gages et à la petite semaine, et il y avait laissé les plus belles plumes de ses ailes.  
    Mis en goût par la succession, ébloui par son mirage, il travailla plus en grand, mais toujours dans le milieu où il avait jusqu’alors tripoté, et sans se montrer plus prudent ni moins avide ; il se trouva qu’il n’avait élargi que le cercle de ses pertes, qui

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