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Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Titel: Mémoires de 7 générations d'exécuteurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri Sanson
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de mort cent quinze sortes de crimes ou délits. C’est à François 1er, restaurateur des lettres, et à son ministre le cardinal Duprat, un homme d’Eglise, que la France fut redevable de ce raffinement de barbarie comme institution légale. Un édit en fit la peine particulière des voleurs de grand chemin ou avec effraction, tandis que la potence était réservée aux meurtriers. Il faut croire qu’à cette époque, la vie humaine paraissait moins sacrée que la propriété, puisqu’on punissait moins cruellement les attentats dirigés contre la première, que ceux qui s’attaquaient à la seconde. Cette anomalie ne pouvait durer ; aussi sous le règne suivant, voleurs, assassins, parricides, tous devinrent justiciables de la roue avec des aggravations ou des atténuations particulières, suivant la nature du crime, ainsi que nous avons en maintes fois l’occasion de l’expliquer. La potence ne fut plus qu’un châtiment secondaire, bien déchu de son importance, depuis les sombres mystères de Plessis-lès-Tours et les hauts faits de notre illustre prédécesseur, le compère Tristan l’Hermite.
    Depuis 1770 jusqu’à 1780, je trouve dans les notes de mon grand-père, que les malheureux rompus vifs sont beaucoup plus nombreux que ceux qui périssent par la corde. Ce sont des noms obscurs : En 1769, le 18 janvier, Etienne Charles et François Legros, condamnés pour assassinat d’un nommé Régnier ; le 21, André-Etienne Petit, âgé de vingt-neuf ans, pour différents vols d’argenterie ; François Gallois, également pour vol, mais de farine ; le 27 avril, François Boussin, pour vol et assassinat ; le 22 août, Jean Brouage pour vol de linge ; le 22 septembre, Jean Lemoine, pour assassinat commis sur la femme Jaunet ; en 1771, le 19 août, François Alain, âgé de vingt-huit ans, et convaincu de meurtre sur la personne d’un nommé Charpentier qu’il avait assassiné à coups de pied sur le ventre ; en 1772, le 16 janvier, Louis-François Daux, un autre assassin, rompu vif en place de Grève ; le 29, François-Abraham Lecerf, pendu pour vol ; le 12 mars, Jacques Harivel, même peine pour le même délit ; le 4 août, Joseph Savel, âgé de vingt-six ans, rompu vif pour vol et assassinat ; en 1773, le 20 août, Edme Saget, âgé de vingt-deux ans, pour avoir tué un nommé Berthelot à coups de bâton ; le 7 décembre, Marie Picard, veuve Maréchal, fileuse de coton, son fils, Pierre Hilaire, un enfant de dix-sept ans, un garçon nommé Nicolas Rose, pour avoir volé, assassiné et jeté dans un puits un sieur Michel Nioré ; en 1775, le 14 janvier, Edme Brochard, aubergiste, pour meurtre et vol ; le 16 mai, Charlotte Beuton, veuve Minier, comme complice d’assassinat sur la personne de son mari ; le 27 septembre, Paul Darel, rompu vif, sur la place de Grève, par arrêt du Parlement, en date du 25 ; en 1777, le 11 juillet, J.-B. Campagnard, âgé de vingt-cinq ans, pour avoir assassiné la fille Marsault ; en 1778, le 21 juillet, Jacques Neuiller, voiturier, convaincu de complicité de vol de grand chemin, sur la personne d’un nommé Lafond, tué à coups de bâton ; le 2 septembre, Mathurin Barsajout, dit Charpentier, rompu vif sur la place du Châtelet, pour crime à peu près semblable.
    J’en passe et des meilleurs, comme dit Ruy Gomez de Sylva, car la plume se lasse d’exhumer ces héros du crime qui n’occupèrent un instant leurs contemporains que par l’horreur de leurs forfaits ou de leur supplice ; mais lorsqu’on parcourt ces sinistres rôles de la justice criminelle, il y a moins d’un siècle, et qu’on y voit la mort prodiguée comme châtiment, et presque toujours accompagnée de cruautés inouïes, avec quel sentiment de bonheur ne se reporte-t-on pas à nos institutions modernes, qui ont fait table rase de ces coutumes odieuses ? Le jury, la Cour d’assises, la juridiction à deux degrés, les formes de la procédure, la publicité des débats, la liberté de la défense, nous paraissent de si grandes conquêtes de la civilisation, qu’on s’étonne qu’elles aient été obtenues en si peu de temps, et qu’il faut bien en rendre hommage à cette immortelle révolution, que ses bienfaits n’ont pas mise à l’abri de récriminations aveugles ou intéressées.  
    A mesure que j’approche de cette grande rénovation de l’édifice social, je sens que le cadre de ce livre s’élargit et que je dois, plus que tout autre, m’attacher à

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