Mémoires de 7 générations d'exécuteurs
d’avril 1571, et l’art. 14 de l’Édit de septembre 1577, qui punissent tous de peines corporelles les auteurs, compositeurs et imprimeurs de libelles diffamatoires, aussi bien que ceux qui les publient à la diffamation d’autrui. Ad alterius injuriant.
Il rappelle les édits draconiens de janvier 1626 et août 1686, si rigoureusement suivis à l’égard du malheureux Larcher, comme on l’a vu pour l’ombre de Scarron, et qui portaient : le premier, que tous ceux qui se trouveraient avoir attaché ou semé des placards et libelles diffamatoires seraient punis de mort ; le second, qu’ils seraient punis suivant la disposition des ordonnances ; ce qui, loin d’abroger cette pénalité monstrueuse, en était au contraire la confirmation tacite.
M e Maton de la Varenne passa ensuite aux règlements plus récents qui, s’ils édictaient une répression bien moins sévère, n’en étaient pas moins unanimes pour réprimer, et il termina enfin par ce qui suit :
Les écrits dont se plaint le citoyen que je défends portent le coup le plus terrible à son honneur. Ils ont fait et font encore la plus grande fermentation dans cette capitale et dans les provinces. Les uns prétendent que ne pouvant se tirer d’affaire, il s’est brûlé la cervelle dans les prisons, et d’autres qu’il doit être incessamment pendu, et que son corps doit être coupé en plusieurs morceaux et attaché aux différentes portes de cette ville ; d’autres enfin qu’on doit lui faire grâce en faveur des déclarations importantes qu’il promet de faire contre les ennemis de la Révolution. La rétractation qu’il demande contre les auteurs des calomnies dont il se plaint ; les dommages-intérêts auxquels il a conclu, ne peuvent donc faire aucune difficulté.
Vous avez entendu, Messieurs, les principaux moyens de ma cause. Elle est celle du public, elle intéresse la sûreté individuelle du citoyen que je défends et de sa famille. Ce sont les droits d’homme qu’il réclame ; c’est une réparation qu’il demande à son honneur attaqué de toutes parts : vous êtes trop justes pour la lui refuser. Quelle qu’elle soit, elle sera toujours bien inférieure au préjudice que lui causent les calomnies dont j’ai eu l’honneur de vous rendre compte : le trait ne retourne point à l’arc d’où il est parti.
S’il était permis à celui que je défends de vous réitérer les sentiments qu’il nous a témoignés, en réclamant notre ministère, s’il lui était permis de faire à votre audience sa profession de foi, de vous peindre lui-même son patriotisme, il vous dirait, Messieurs, comme il nous l’a dit à nous-même : « Qu’ai-je fait à ceux qui m’outragent sans pitié, comme sans justice, dans les écrits que je suis forcé de vous dénoncer ? Quelles preuves donneront-ils à l’appui des imputations atroces qu’ils impriment contre moi ? Quel intérêt ont-ils à diffamer sans sujet un citoyen irréprochable, déjà assez malheureux d’exercer un état qui livre journellement à sa sensibilité les plus déchirants combats. Mes chers concitoyens, continuerait celui que je défends, serait-ce dans l’instant où ma patrie se régénère, où elle détruit le préjugé odieux qui me vouait injustement à l’infamie, serait-ce enfin dans un instant où la nation me rétablit dans mes droits d’homme et de citoyen ( Ici l’orateur supposait une interprétation favorable aux exécuteurs,du décret du 24 décembre 1789. ), que j’aurais l’infâme lâcheté de la trahir ? Non, sans doute ! et bien loin de tremper dans des complots et de participer à des attentats dont l’idée seule me fait horreur, je voue à la honte et à l’exécration de tous les siècles ces hommes pervers qui veulent renverser le superbe édifice élevé par le patriotisme des pères de la patrie, et qui osent, dans leur délire sacrilège, menacer des têtes si chères. »
M. le procureur-syndic adjoint vous a peint, dans une de vos précédentes audiences, avec toute l’énergie et l’éloquence qui le caractérisent, les dangereux effets de ces libelles qu’enfante journellement ce qu’on appelle la liberté de la presse ; liberté qui est devenue en quelque sorte le droit de calomnier ; liberté qui méconnaît toutes les bienséances, qui viole toutes les lois ; liberté enfin qui, naissante à peine, est déjà dégénérée en licence, et qui a fait dispa raître la sévérité
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