Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Métronome

Métronome

Titel: Métronome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lorànt Deutsch
Vom Netzwerk:
pourrons découvrir : il en est de même quand nous jetons les yeux sur la Lune ou sur quelque autre astre. Tous ces corps matériels ne sont que les simulacres des Êtres que nous ne pouvons concevoir que par l’esprit. Platon a donc parfaitement connu tous ces dieux invisibles, qui existent par le Dieu et dans le Dieu suprême, et qui ont été faits et engendrés par lui ; le Créateur du Ciel, de la Terre, et de la Mer étant aussi celui des Astres, qui nous représentent les dieux invisibles dont ils font les simulacres. »
    En fait, le dogme du Dieu unique, prêché par ceux que Julien appelle les Galiléens, entraînerait l’intransigeante conséquence de « maudire les autres dieux »… Voilà justement ce que le jeune philosophe refuse ! Il serait peut-être d’accord pour considérer le Père, le Fils et le Saint-Esprit comme des formes divines, mais à la condition de pouvoir leur faire une petite place à côté des dieux innombrables du paganisme. Pour lui, le monothéisme, celui des chrétiens comme celui des juifs, procède d’une intolérance qu’il ne comprend pas et n’accepte pas. Pour le démontrer, il rompt avec la religion dans laquelle il a été élevé, embrasse l’ancienne foi des Grecs et se retire à Athènes. Sur cette terre ancienne de la philosophie, il espère pouvoir mener à bien sa réflexion et élever son esprit au niveau de ceux qui l’inspirent.

Hélas, le penseur doit bientôt abandonner ses chères études : l’empereur Constance, qui préfère s’occuper de la partie orientale de son empire, nomme Julien vice-empereur et lui ordonne d’aller s’établir en Gaule pour administrer le pays et combattre les Barbares menaçants. Pour Julien, cette belle promotion fait figure de catastrophe ! Comment ? Il faudrait donc entrer dans la vraie vie, étouffer les réflexions sur la position des dieux dans le ciel, abandonner la lecture des dialecticiens du passé ? Il faudrait revêtir l’armure, monter à cheval, commander des légions ? Julien monte au Parthénon, implore Athéna de lui éviter cette épreuve et lui demande d’intervenir pour changer le cours des événements terrestres… Mais en son temple la divinité reste muette, alors le jeune homme s’en va tristement prendre son poste d’empereur en second.
    Un étrange destin veille sur le philosophe devenu guerrier : dans la peau de cet autre qu’il abhorre, il se montre énergique, brillant, efficace. Contre toute attente, le théoricien éthéré se révèle foudre de guerre ! Il ose pénétrer avec ses légions jusqu’au cœur des forêts germaniques, là où aucune armée romaine ne s’est aventurée depuis trois siècles et où aucune autre ne se risquera après lui. Il écrase les Alamans à la bataille d’Argentoratum (Strasbourg), repousse les ennemis de l’autre côté du Rhin et met fin aux incursions des pillards… C’est l’enthousiasme à travers tout l’empire : ce jeune homme que l’on voyait comme un prince perdu dans une vie contemplative a sauvé l’espace romain ! Ses soldats le portent en triomphe et se feraient volontiers écharper sur un mot de lui.
    Entre batailles et expéditions, Julien vient se reposer à Lutèce, la capitale intime qu’il s’est choisie dès le mois de janvier de l’an 358. Il est encore seul : son épouse Hélène est restée à Rome pour accoucher. Certes, le séjour du général est entrecoupé de départs forcés – il faut bien s’en aller guerroyer ici ou là –, mais dès qu’il le peut, Julien revient sur les bords de la Seine…
    À la pointe extrême de l’île de la Cité, une villa romaine se dresse comme un rempart, un morceau d’Italie posé au cœur de la Gaule. Murs ocre et colonnes noires encadrent une cour carrée où l’on a planté des figuiers qui s’étiolent à côté d’un bassin où coule une eau claire. Au centre de cette luxueuse résidence, la salle des banquets, agrémentée d’aigles dorées et de fresques évoquant Bacchus, accueille les agapes qu’un riche Romain ne saurait dédaigner. Ici se réunit la fine fleur des patriciens, tous vêtus de la toge aux multiples replis. Et l’on sait recevoir ses hôtes, dans la résidence de Lutèce : à chaque repas, trois services se succèdent. On sert d’abord les œufs et les olives accompagnés de pain et de vin au miel, puis les viandes, enfin les fruits…
    Ce cœur du pouvoir s’étend à des constructions mitoyennes où toute une

Weitere Kostenlose Bücher