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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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pouvait de ces durs mois sur une île maudite ?
    — Oui, cette île, dit-il à Roc Dur. Dans ces collines, précisa-t-il en indiquant la direction au-delà des galets gris de la plage.
    — Tu les as appelés pendant que tu étais là ? s'enquit Phoque Mourant.
    — Je les ai appelés, mais ils ne sont arrivés qu'après mon départ.
    — Et si nous ne les avions pas trouvés ? Si Mangeur de Poissons n'avait pas pris cette route en chassant le phoque ? objecta Roc Dur. Tu aurais dû nous dire que tu les avais appelés.
    — M'auriez-vous cru ? Regardez-moi. Je ne suis plus jeune. Je ne suis plus fort. J'ai même donné toutes mes marchandises, mes nombreux paquets de peaux, mes ventres d'huile, contre les défenses de morse. Ainsi, parce que je possède si peu, les hommes de ton village doutent que je sois chaman et que j'en possède les pouvoirs. A-t-on jamais vu de morses sur cette île ? Non. Un jour, quand j'aurai emporté mes pouvoirs dans les Lumières Dansantes, les morses repartiront.
    Il se tourna vers Pieds Rouges qu'il dévisagea puis revint à Roc Dur et Phoque Mourant.
    — Si j'avais dit « Les morses sont arrivés sur l'île des Quatre Eaux — partez à la chasse », m'auriez-vous cru?
    Les hommes se turent, observant la plage, les escarmouches du mâle géant, son corps comme un énorme rocher brun-rouge, ses grognements et les craquements des fleuves de glace.
    Alors, Pieds Rouges libéra du plat-bord son harpon à lion de mer, fixa son projecteur à sa main droite, l'extrémité du fourreau contre le crochet d'ivoire qui maintenait le harpon en place.
    — Non, protesta Waxtal. Ils ne sont pas prêts à être chassés. Nous insultons les morses avec nos harpons à phoques.
    Un coup d'oeil à Roc Dur lui montra qu'il venait de prononcer des paroles réservées à l'alananasika. Il s'arma contre la colère de Roc Dur mais, à sa grande surprise, ce dernier n'afficha que de la peur.
    Il craint mon pouvoir, pensa Waxtal en gloussant. Il entonna alors une incantation, une prière de protection, de louange pour tout morse qui se donnerait au harpon du chasseur. Cela ne faisait pas de mal ? Avec les chasseurs Morses, il avait eu son compte de fanfaronnades et de vantardises. Qui ignorait que le morse s'attrapait à terre, où il était lent et facile à capturer ? Dans l'eau, un chasseur n'avait aucune chance.
    — Attendez ! réitéra Waxtal.
    — Celui-là est à moi, s'écria Pieds Rouges, désignant, sans écouter, un morse plus petit à quelque distance du grand mâle.
    Waxtal remarqua alors la tache jaune sur les défenses du morse. Ce morse-là était un tueur. Ses défenses étaient jaunies par le lard des phoques qu'il avait pris. Waxtal avait entendu dire que ces morses attaquaient les ikyan.
    — Attends ! s'écria-t-il.
    Mais il avait réagi trop lentement. Pieds Rouges lança son harpon, poussa un cri quand il atteignit la poitrine du morse, quand le sang clair goutta, laissant une trace tandis que le morse se glissait maladroitement dans l'eau pour disparaître sous les vagues.
    — Regardez ! s'exclama Roc Dur en indiquant la hampe du harpon qui s'agitait, manche pointant à travers les vagues.
    La lame était attachée par une ligne de nerf tressé à la tête de harpon qui était fichée dans le morse. Roc Dur, Mangeur de Poissons, Pieds Rouges et Phoque Mourant amenèrent leurs ikyan en cercle autour de la lame de harpon, attendant que le morse refasse surface. Mais Waxtal ne bougea pas et, quand Roc Dur lui fît signe de s'approcher, il secoua la tête.
    Waxtal ferma les yeux, mit toute sa force dans un chant. Alors, derrière l'obscurité de ses paupières, il vit la clarté de la lumière et, au même moment, entendit les cris des chasseurs. Lorsqu'il rouvrit les yeux, son ikyak était dressé sur le renflement d'une vague géante, comme si la mer elle-même combattait les Chasseurs de Baleines. De la crête de cette vague, il vit le morse se soulever hors de l'eau, rassembler ses forces pour surmonter la douleur causée par l'arme. L'animal se projeta contre l'ikyak de Pieds Rouges, faisant éclater l'étrave et projetant l'homme hors de l'esquif.
    Waxtal poussa sur sa pagaie, avançant dans ces petites vaguelettes qui suivent parfois le sillage d'une vague plus grosse. Son kayak faillit chavirer, mais la frayeur lui redonnant de la force, Waxtal parvint à le stabiliser et il s'éloigna rapidement de la plage, des forts courants qui défient la pagaie d'un chasseur. Une

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