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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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puis-je être mère quand tous mes enfants sont dans les Lumières Dansantes ? répondit la vieille femme avec dureté. Je n'irai pas sur la plage, ajouta-t-elle. Peut-être les esprits auront-ils pitié et me laisseront-ils mourir ?
    Elle se détourna du rondin et regagna l'ombre.
    Kukutux entendit alors de nouveau le léger murmure. Aucun doute, c'était la voix de Menhaden, la première épouse de Pieds Rouges, mère de son petit garçon. Ou peut-être celle d'Attrapeuse De Poissons, la seconde épouse.
    — Même si un de tes enfants t'a envoyé un présent, même si ce présent se trouve maintenant sur la plage, tu ne viendras pas ? insista Kukutux.
    Elle s'agenouilla pour appuyer son visage contre le trou du toit afin que les mots arrivent à tous à l'intérieur.
    La vieillarde se tourna lentement et, dans l'obscurité, Kukutux perçut ses yeux rougis, les lignes que les pleurs avaient laissées sur ses joues.
    — De Pieds Rouges ? demanda la vieille.
    Immédiatement après, Kukutux entendit qu'on la suppliait de ne pas prononcer le nom du mort. Mais Presque Toutes Les Mains quitta le trou des yeux et lança d'une voix sèche :
    — Que m'importe s'il revient ? Que m'importe s'il nous emporte tous dans les Lumières Dansantes ?
    La petite voix répondit.
    — Mon fils est jeune. Il a besoin d'années de chasse. Il a besoin d'étés dans un ikyak, d'hivers pour apprendre les histoires de notre peuple.
    — Qu'en sais-tu ? rétorqua la vieille femme. Tu n'étais que sa femme.
    Elle grimpa jusqu'au trou du toit. Kukutux lui tendit les mains. Menhaden vint également, son fils en bandoulière sur le côté, et Attrapeuse De Poissons, avec son gros ventre de femme enceinte. Elles suivirent Kukutux jusqu'à la plage, la vieillarde fermant la marche, et s'agrippant d'une main au suk d'Attrapeuse De Poissons.
    Quand Menhaden vit le morse, elle éleva la voix, hur-lant comme au premier jour de deuil. Kukutux voulut passer un bras autour de ses épaules mais elle la repoussa.
    — Je n'en veux pas. Je n'en veux pas.
    Mais la mère de Pieds Rouges trottina jusqu'à la plage et s'approcha du morse, cet animal brun-rouge plus grand que le plus grand des hommes. Elle planta ses pieds solidement dans le sol et s'exclama :
    — La dernière prise de mon fils. Elle m'appartient comme m'appartint sa première prise. La viande est à moi et je ne la partagerai avec personne.
    Roc Dur abandonna les hommes rassemblés et, s'approchant de la femme, il s'inclina mains sur les genoux, il la dévisagea.
    — Grand-mère, tu ne peux manger un morse à toi toute seule. Partage-le avec tout le village afin que ton fils soutienne avec fierté le regard des chasseurs dans les Lumières Dansantes.
    La vieillarde soupira, leva les mains et les laissa retomber sur ses flancs.
    — Je partagerai, dit-elle en s'éloignant de la carcasse.
    Roc Dur se tourna vers les femmes dont beaucoup apportaient déjà des couteaux à découper.
    — Le chaman dit qu'il doit prier.
    — Ce n'est pas un chaman, c'est un marchand, objecta Presque Toutes Les Mains en plissant des yeux vers Waxtal.
    — Il a appelé le morse sur notre plage, rétorqua Roc Dur.
    — C'est un cadeau ! hurla la vieillarde. Un cadeau de mon fils. C'est un cadeau. Il n'y est pour rien, ajouta-t-elle en pointant Waxtal de son doigt courbe.
    — Il possède de grands pouvoirs, repartit Roc Dur. Il parle aux esprits. II...
    Alors Waxtal se trouva au côté de Presque Toutes Les Mains. Ôtant son collier d'os d'oiseaux, il en drapa les épaules de la vieille femme.
    — J'ai parlé à ton fils, dit-il. Dans les jours de deuil, avant qu'il ne se rende dans les Lumières Dansantes, j'ai écouté ce qu'il m'a dit. Il veut que tu aies ce collier. Il veut que tu cueilles des baies et que tu pêches des oursins pour aider à nourrir son fils.
    Waxtal regarda ensuite Menhaden qui se tenait tout près, son bébé sur sa hanche.
    — Il veut que tu aies ce morse, toi, ses épouses et les habitants de ce village. Il m'a demandé de l'appeler ici pour lui. C'est ce que j'ai fait.
    Il se racla la gorge.
    — Mes pouvoirs ne sont que les pouvoirs d'un chaman, poursuivit-il, l'appel nécessite donc quatre jours. Mais désormais le morse est là et la viande est là pour que nous l'utilisions.
    La vieille femme serra le collier d'os d'oiseaux entre ses deux mains, s'éloigna de Waxtal et dit d'une voix tremblante :
    — Tu prends la part du chasseur.
    Waxtal eut un sourire qui

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