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Montségur, 1201

Montségur, 1201

Titel: Montségur, 1201 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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le maître d’hôtel, en fonction de son rang ou de son titre. Les simples
spectateurs, comme les moines ou les clercs, restèrent debout près de l’entrée.
    Sur une estrade, construite pour l’occasion,
trônait Esclarmonde dans un splendide vêtement de soie. À côté d’elle, mais
tout de même un peu plus bas, était assise Amicie. Ermessinde n’était pas là,
toujours clouée au lit par son catarrhe qui la faisait tousser.
    Les personnes les plus éminentes étaient sur des
bancs à accoudoirs. Les autres sur des bancs de planches.
    Un serviteur disposa des prix sur une table devant
Esclarmonde : une couronne d’argent, une dague ciselée, un baudrier de
soie et une corne pleine de deniers. Quand tout le monde fut installé, la reine
de la cour fit sonner de la trompe et se leva pour remercier ceux qui étaient
venus. Puis elle présenta dame Amicie comme la coseigneur de Saverdun, lui
demanda de bénir l’assistance – chacun savait qu’elle avait reçu le consolamentum  –,
avant de proposer un sujet que les troubadours traiteraient.
    Amicie se leva à son tour.
    — Que le Seigneur vous bénisse, bons
chrétiens, dit-elle d’un ton solennel.
    En l’entendant, les trois moines cisterciens
saisirent, qui leur croix, qui leur chapelet, et se mirent à prier à voix
basse, suppliant le Seigneur de punir la blasphématrice.
    — Gentes dames, nobles seigneurs et révérends
prélats, voici le sujet que j’ai choisi : Comment savoir si l’on est
aimé ? lança ensuite Amicie d’une voix plus enjouée.
    Comme quelques murmures se faisaient entendre,
Esclarmonde prit la parole.
     
    — J’ai
prié le Saint-Esprit
    De
vous donner beaucoup d’esprit,
    Mais
si l’esprit ne vous est pas venu,
    Considérez
le prix comme perdu !
     
    Son intervention rimée, dite d’un ton railleur,
fut applaudie par l’assistance. Mais en vérité, ce ne fut pas tout le public
qui l’applaudit, car les trois moines gardèrent les mains dans leurs manches.
Guilhem le remarqua. Craignant toujours pour Amicie, il avait passé l’assemblée
en revue et son attention avait été attirée par ces visages reflétant toute la
colère et la méchanceté du monde. Oui étaient ces moines ? Que
venaient-ils faire ici, puisqu’ils paraissaient désapprouver ce qui se
passait ? s’interrogea-t-il.
    La tenson, c’est-à-dire une joute poétique entre
troubadours, pouvait maintenant commencer. Un premier chevalier se leva, prit
une harpe, et proposa :
     
    — L’amour
vrai n’est pas l’amour bavard qui chante,
    Son
bonheur et ses fers,
    Cet
amour n’est qu’orgueil, dont la vaine fanfare,
    Prend
le monde à témoin.
    C’est
un feu sur le cœur allumé comme un phare,
    Pour
être vu de loin.
    C’est
un miroir brillant où l’on se voit soi-même ;
    Un
vin pour s’enivrer ; Un trône où l’on se hausse ; un jardin on l’on
sème
     
    Quand il eut terminé, un murmure flatteur se
répandit dans la salle, mais déjà un autre chevalier s’était levé et
intervenait, avec une viole :
     
    — L’amour
vrai, c’est celui qui brûle et qui fond l’âme
    D’un
feu silencieux, comme l’or au creuset fond et bride sans flamme
    L’amour
vrai, c’est la fleur qui se ferme et se voile, sous un ciel lumineux,
    Et
qui s’ouvre quand vient la clarté d’une étoile,
    Qui
ne suffit qu’à deux.
     
    Cette fois, les applaudissements éclatèrent de
toutes parts. Esclarmonde fit signe au premier qu’il pouvait répondre à son
adversaire. Ce qu’il fit avec talent. Le second lui rendit la pareille et le
duel se poursuivit, le temps de quatre réponses.
    La joute terminée, plusieurs cris de l’auditoire
demandèrent le prix pour le premier chevalier, et Amicie lui remit le poignard
sous les félicitations et les applaudissements.
    Une seconde tenson se déroula ensuite. Cette fois
le sujet, donné par Esclarmonde, porta sur l’affection entre les époux.
Pouvait-elle être aussi forte qu’entre les amants ?
    Quand le nouveau duel de rimes et de musique fut
terminé, des bateleurs intervinrent, faisant forces cabrioles, qui firent rire
le public, avant de réciter de plaisants rondeaux. Les serviteurs distribuèrent
alors du vin chaud épicé, des massepains, des poires cuites et des figues
sèches. Les trois moines se gavèrent avec délectation.
    Se déroula ensuite une troisième joute entre deux
troubadours, mais l’assistance était moins attentive. En vérité chacun
attendait la suite

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