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Montségur, 1201

Montségur, 1201

Titel: Montségur, 1201 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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celui-ci avait fait de Muret sa
capitale.
    Désormais, à l’extrémité nord du comté de
Comminges, la ville était comme une épine enfoncée entre l’Aquitaine et le
Toulousain, aussi était-elle solidement fortifiée. Les motifs de querelles avec
ses puissants voisins ne manquaient pas et, deux ans plus tôt, lors du conflit
entre Urgel et le comte de Foix, Bernard de Comminges avait dû se défendre
contre Raymond-Roger. Finalement le différend s’était arrangé et Esclarmonde
avait été bien accueillie quand elle s’était rendue à Saint-Gilles. Elle savait
qu’il en serait de même au retour.
    Le convoi repartit le lendemain. Ils avaient trois
lieues à franchir avant d’arriver à Miremont. Là-bas, les voyageurs ne
logeraient pas dans la ville mais dans une ferme de Parfaits.
    Ils reprirent la route le jeudi, la ferme les
ayant approvisionnés en nourriture. Cette fois l’étape serait plus longue pour
arriver à Sainte-Gabelle, au bord de l’Ariège, avant-dernière étape avant
Saverdun.
    À Sainte-Gabelle, où le corps de la bienheureuse
sainte avait été inhumé, ils obtiendraient l’hospitalité avant de se rendre
jusqu’à Boulbonne, la plus prestigieuse abbaye du Toulousain dont le comte de
Foix était le bienfaiteur. Boulbonne était cistercienne, mais recevait tant de
bienfaits du comte et de sa sœur Esclarmonde que ses abbés toléraient le
catharisme. L’évêque cathare Guilhabert de Castres s’y arrêtait souvent.
     
    Le convoi, qui s’étirait sur deux ou trois cents
pieds, s’approchait du croisement avec le chemin de Auterive lorsque le sergent
porteur de lance, qui se retournait souvent, aperçut des cavaliers loin
derrière eux. À la demande de Roger, il remonta la file jusqu’à Jourdain de
Salsigne pour le prévenir.
    — Combien sont-ils ? demanda Salsigne.
    — Difficile à dire, seigneur. Trois… quatre,
peut être cinq. Ils étaient loin et le chemin serpentait.
    — Armés ? Avaient-ils des bannières ?
    — Je n’ai vu ni penons ni bannières,
seigneur. Il était impossible de distinguer s’ils étaient armés.
    Limoux s’était approché.
    — Quelle importance cela a-t-il,
seigneur ? Ils ne sont que quatre ou cinq ! Ce sont sans doute des
marchands qui vont à Sainte-Gabelle.
    — Les marchands ont des charrettes ou des
chariots, et ils ne nous auraient pas rattrapés. As-tu vu des ânes ou des
mules ?
    — Non, seigneur.
    Salsigne grimaça. Il n’avait pas pour habitude de
prendre le moindre risque, surtout avec dame Esclarmonde.
    — Limoux, reste en arrière et tâche de les
identifier. S’ils sont armés, attends-les et interroge-les.
    — Mais ils ne sont que quatre ou cinq,
seigneur, nous sommes trois fois plus nombreux ! protesta l’écuyer.
    — Fais-le quand même !
    Maussade, Limoux resta donc en arrière. Au bout
d’un moment, il vit arriver le groupe. Ils n’étaient que trois ! Trois
pauvres cavaliers sans casques ni écus.
    Il haussa les épaules et rattrapa le convoi sans
attendre.
    — Ils ne sont que trois seigneurs. Des
voyageurs sans armes !
     
    Le convoi passa le carrefour vers Auterive. À
partir de là, le chemin était bien droit, mais très étroit. Sur leur gauche, en
contrebas, serpentait la Mouillonne, mais ils ne voyaient pas la petite rivière
tant la forêt était sombre. À droite, des taillis épais s’étendaient en
grimpant le long d’une éminence.
    Limoux interrogeait dame Amicie sur la vie au
château de Saverdun. Il avait entendu parler des fastueuses fêtes de son ancien
mari, Amiel, mais n’y avait jamais participé. Il voulait savoir si la nouvelle
châtelaine allait les faire revivre.
    Devant eux, Jourdain de Salsigne était en
compagnie d’Esclarmonde. Le médecin et le diacre marchaient en tête, suivis du
sergent à cheval et du clerc en mule.
    Ermessinde avait pris en croupe une servante dont
la chaussure s’était déchirée.
    — Jouez-vous de la viole ? demanda
Amicie au jeune écuyer.
    — Oui, noble dame, mais je joue surtout…
    Il n’avait pas fini sa phrase qu’un flot de sang
jaillit de sa bouche. Il resta un instant figé, saisi par la surprise, la douleur
ne l’ayant pas encore atteint. Puis il gargouilla, tentant vainement de
respirer avant de tomber de sa selle.
    Amicie était resté pétrifiée, sans réaction.
Devant elle, Jourdain de Salsigne venait de se raidir. Elle vit alors la flèche
plantée dans son dos. Sous ses yeux maintenant épouvantés, il

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