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Montségur et l'enigme cathare

Montségur et l'enigme cathare

Titel: Montségur et l'enigme cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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de
Rennes-le-Château et de Rennes-les-Bains. On remarquera qu’il s’agit exactement
du même nom que celui de la capitale bretonne qui, s’étant d’abord appelée Condate (confluent), a pris le nom du peuple gaulois
qui l’habitait, les Rhedones . La racine de Rhedae et de Rhedones est strictement identique, mais elle n’a rien à voir avec les Wisigoths : elle
est mentionnée par César ( Rhedis equitibus
comprehensis , VI, 30) et par d’autres auteurs latins à propos de chars
de combat très rapides. Le sens étymologique primitif semble être « courir
vite », et on le retrouve dans le nom du Rhin et du Rhône qui sont des
fleuves « courant vite », ainsi que dans le verbe breton moderne redek , (courir). Il ne peut y avoir aucun doute
là-dessus, malgré les délires d’interprétation de certains qui y voient « Red,
dieu de la foudre et des orages, dont les temples étaient souterrains », probablement
parce qu’ils y reconnaissent l’anglais red , (rouge).
Que viendrait faire la langue anglaise dans cette région ? Mais le comble
du ridicule est atteint par certains personnages qui se prétendent écrivains et
surtout « initiés » (à quoi ?), dont les productions sont largement
diffusées par les syndicats d’initiative locaux, et qui, intégrant dans leurs
élucubrations un salmigondis de langues aussi disparates que surprenantes, font
provenir le nom du Razès d’un « Aer-Red, le serpent coureur ou la Wouivre
mystique ». Certes l’étymologie est celtique, la légende de la Wouivre – qui
deviendra Mélusine dans le Poitou – l’est également, et aer signifie réellement « serpent », mais
en breton moderne. Que vient faire la langue bretonne, moderne en plus, dans le
Razès ? On objectera que les rapports entre le Razès et l’Armorique sont
certains. Oui, mais à cette nuance près que jamais le peuple des Rhedones n’a
parlé le breton : sa langue était le gaulois, langue perdue parce que les
druides interdisaient l’usage de l’écriture, et dont les linguistes, tels
Georges Dottin, entre les deux guerres mondiales, ont eu bien du mal à
reconstituer le vocabulaire essentiel. On dira aussi qu’une bourgade du Razès
se nomme « La Serpent ». Mais qu’est-ce que cela prouve ? Il y a
des vipères dans le Razès, comme ailleurs, et autrefois le terme était féminin :
pourquoi y découvrir absolument l’image mémorisée d’une ancienne divinité
ophidienne ? Du reste, il paraît bien difficile d’intégrer aer dans Rhedae . Ce
genre d’interprétations délirantes, tout en prétendant donner des solutions aux
problèmes qui se posent, ne fait qu’épaissir davantage les ténèbres. Et cela n’élimine
nullement les problèmes. Au contraire, cela les pose encore plus. Car il n’y a
pas de légendes, pas d’acharnement à pratiquer des déchiffrages fantaisistes, sans
une réalité profonde qui se cache par derrière. C’est cette réalité que nous
devons traquer.
    Une chose est sûre à propos du Razès : le peuple qui a
donné son nom au pays était un peuple gaulois, les Rhedones ,
que nous retrouvons en Armorique, dans le bassin de la Vilaine. Il peut
paraître curieux, à première vue, qu’un même peuple se soit ainsi établi dans
deux endroits très éloignés l’un de l’autre. Mais ce n’est pas une exception, loin
de là, et les migrations ont toujours existé. Pour ce qui est des Gaulois, on
trouve des Atrébates à Arras – où ils ont laissé leur nom – et en
Grande-Bretagne, des Boiens en Bohême (où l’on reconnaît leur nom) et à La
Teste-de-Buch, près d’Arcachon, où ils ont également laissé leur nom, des
Bituriges Vivisci à Vevey, sur les bords du
lac Léman, à qui ils ont donné leur nom, et dans le Médoc, des Osismes dans le
nord-Finistère et à Exmes (Orne) qui porte leur nom. Quant aux Gabales, établis
dans les Cévennes, ils ont fondé un établissement à Gavaudun ( Gabaloduno ), dans le Lot-et-Garonne, en plein pays
occupé par le peuple des Nitiobroges, aux limites de celui des Petrocores (Périgueux).
Le processus est bien connu. Tous les Gaulois viennent du Harz. Au deuxième âge
du Fer, à l’époque dite de la Tène, vers 400 av. J.-C., ils ont tous
franchi le Rhin. Parmi eux se trouvait le peuple des Rhedones qui s’est scindé
en deux groupes : l’un est allé vers l’ouest, en Armorique, l’autre vers
le sud, dans les Corbières. À moins qu’il n’y faille voir une

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