Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
Vom Netzwerk:
refusait de le laisser
entretenir des chevaux à cet usage ; on en louait donc pour les occasions solennelles
où elle rendait ses visites du matin ou de l’après-midi. Elle avait gardé les chevaux
– trois jours, et non quinze –, et s’était ainsi tranquillement débarrassée de ses
obligations envers ses connaissances ; à leur tour maintenant d’assumer les
dépenses et les efforts nécessaires. Mais Crampton était trop loin pour qu’elle
fasse le déplacement à pied ; et elle avait à plusieurs reprises demandé à
son fils s’il tenait à ce qu’elle rende visite aux Hale au point de justifier la
dépense d’un fiacre. Elle aurait été soulagée dans le cas contraire, car, pour citer
ses propres paroles, « elle ne voyait pas l’intérêt de se lier si peu que ce
fût avec tous les professeurs et pédagogues de Milton » ; à ce compte-là,
il lui demanderait bientôt d’aller rendre visite au maître de danse de Fanny !
    — Ce que je ferais, maman, si Mr Mason et sa mère étaient
comme les Hale, étrangers dans la ville et n’y connaissaient personne.
    — Oh, inutile de me répondre sur ce ton. J’irai demain.
Je voulais seulement que tu saches à quoi t’en tenir au juste.
    — Si vous y allez demain, je commande les chevaux.
    — C’est ridicule, John. On dirait que tu roules sur l’or.
    — Ce n’est pas encore le cas. Mais pour les chevaux, j’y
tiens. La dernière fois que vous êtes sortie en fiacre, vous êtes revenue avec un
mal de tête sévère à cause des cahots.
    — Assurément, je ne m’en suis jamais plainte.
    — Ça non ! ma mère n’a pas l’habitude de se plaindre,
rétorqua-t-il non sans fierté. Raison de plus pour que je veille sur vous. En revanche,
un peu d’inconfort ne ferait pas de mal à notre petite Fanny.
    — Elle n’est pas de la même trempe que toi, John. Elle ne
le supporterait pas.
    Après quoi, Mrs Thornton garda le silence, car ses dernières
paroles avaient trait à un sujet qui la mortifiait. Elle concevait un mépris inconscient
pour les faibles ; or Fanny était faible dans les domaines précis où sa mère
et son frère étaient forts. Mrs Thornton n’était pas femme à s’adonner à de
longues réflexions. Elle était dotée d’un jugement rapide et d’une grande fermeté
de caractère qui remplaçaient avantageusement de longs conciliabules avec elle-même.
D’instinct, elle sentait que rien ne pourrait aguerrir Fanny, ni lui donner la force
de supporter patiemment des épreuves et de faire face avec courage à des difficultés.
Et si cette constatation concernant sa fille la contrariait fort, elle la poussait
en même temps à lui manifester une tendresse teintée de pitié qui n’était pas sans
évoquer la manière dont les mères ont tendance à traiter leurs enfants délicats
et maladifs. Un étranger ou un observateur peu attentif eût pu croire que
Mrs Thornton manifestait beaucoup plus d’affection à Fanny qu’à John. Mais
une telle conclusion eût été profondément erronée. La façon hardie dont la mère
et le fils se disaient des vérités déplaisantes prouvait la confiance que chacun
avait dans la fermeté d’âme de l’autre. Or si Mrs Thornton témoignait à Fanny
une tendresse mâtinée de gêne, si elle tendait à camoufler la honte qu’elle éprouvait
en voyant que sa fille ne possédait aucune des qualités exceptionnelles qu’elle-même
possédait sans le savoir et qu’elle estimait tant chez les autres, ladite honte
trahissait les limites d’une affection qui, faute de bases solides, était fragile.
Jamais elle n’appelait John autrement que par son prénom ; à Fanny étaient
réservés les termes « mon petit » et « ma chérie ». Mais jour
et nuit, Mrs Thornton rendait grâce au ciel de l’existence de son fils ;
et à cause de lui, elle se sentait fière entre toutes les femmes.
    — Ma petite Fanny ! Aujourd’hui, je vais faire atteler
la voiture pour aller rendre visite à ces Hale. Tu ne veux pas en profiter pour
aller voir ta nourrice ? Elle habite du même côté et une visite de ta part
lui fait toujours tellement plaisir. Tu pourrais t’y arrêter pendant que je vais
chez Mrs Hale.
    — Oh, maman, c’est si loin, et je suis si fatiguée.
    — A cause de quoi ? demanda Mrs Thornton, le front
plissé.
    — Je ne sais pas. Du temps, sans doute. Il est tellement
débilitant. Ne pourrait-on aller chercher ma nourrice ? Si on lui envoyait
la

Weitere Kostenlose Bücher