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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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supposés renoncer à l’esclavage. Les rois tentent d’en freiner la pratique, Pépin interdit la « vente » de gens baptisés aux païens, Charlemagne exige que la traite se passe en présence d’un évêque. Et les moines rachètent tous ceux qu’ils peuvent, dont ils feront parfois des prêtres et même des membres de l’épiscopat. C’est que l’Église, en ces viii e ou ix e  siècles, commence à trouver ces mœurs antiques peu en accord avec sa morale. On remarquera qu’elle y aura mis le temps.

    Avant de quitter cette période que certains historiens appellent le « haut Moyen Âge », d’autres encore « l’Antiquité tardive » – pour indiquer précisément à quel point les traits du monde ancien y sont encore présents –, profitons donc de cette étape de hasard à Verdun pour nous arrêter sur un phénomène sur lequel les livres d’histoire traditionnels ne s’attardent que trop rarement : l’infinie lenteur avec laquelle le christianisme s’est implanté en Europe. Dans les manuels, le basculement du monde païen au monde chrétien se passe à la vitesse d’un coup de grâce : l’onction d’un front royal par le saint chrême suffit. « En 496, par le baptême de Clovis, les Francs se convertissent au christianisme. » Le dossier est clos, on peut passer au chapitre suivant.
    Dans la profondeur des choses, il fallut des siècles pour passer d’un monde à l’autre. Plus exactement, comme on vient de le voir pour l’esclavage, il y eut des siècles durant lesquels les deux mondes n’en finirent plus de se chevaucher.
    La conversion des Barbares est un épisode fascinant de l’histoire. On a déjà parlé de cette configuration rare qui voit le vainqueur se convertir à la foi du vaincu. C’est ce qui se passe quand les Francs embrassent le dieu qui est alors celui de Rome. Le brillant médiéviste Bruno Dumézil a étudié de près les mécanismes de ce phénomène, ils sont d’une grande complexité 3 . L’historien explique par exemple comment l’aristocratie gallo-romaine, exclue des cours princières des premiers envahisseurs qui étaient ariens (les Wisigoths, par exemple), se replie sur la grande structure de pouvoir qui reste à sa portée, l’Église, pour lui donner ses évêques, ses prélats. Une des raisons qui poussent les Francs à devenir catholiques est qu’ils peuvent ainsi s’appuyer sur une structure existante, ce qui a permis aux deux mondes de se fondre peu à peu. Dumézil explique aussi combien tout cela a pu varier selon les régions et les moments. On a vu des allers et retours spectaculaires d’un culte à l’autre : selon les caprices, les stratégies, les intérêts ou les choix de tel ou tel roi, certains peuples ont pu ainsi changer de religion trois ou quatre fois en une génération.

    La rage de détruire les idoles
    Sauf exception sanglante – on se souvient de la rage de Charlemagne dans sa guerre « évangélisatrice » contre les Saxons –, tout cela s’est produit sans persécution de masse, ce qui est assez rare dans l’histoire pour être souligné. La doctrine, constamment reformulée par les papes, est qu’il faut convertir par l’exemple et la persuasion plutôt que par la force. Rome a moins d’égards pour le patrimoine et la culture des religions antérieures. Les temples, les statues, les monuments sont détruits sans ménagement, ou rechristianisés. Dans les régions celtiques, on pose, par exemple, des croix sur les menhirs. Partout on profane les autels où les gens venaient se recueillir depuis des siècles ou on les convertit en église. Les livres pieux sont pleins de saints admirables des premiers temps du christianisme qui passent leur vie à courir les temples et les sanctuaires pour « briser des idoles », c’est-à-dire pour faire disparaître un patrimoine d’une richesse extraordinaire, qui est, par leur faute, à jamais perdu. Évidemment, cela est moins cruel que d’assassiner les prêtres qui y officiaient ! Au moment de la Révolution française, au nom de la lutte contre un catholicisme alors détesté, on verra s’abattre pareille rage contre les symboles du christianisme, on verra les églises pillées, les objets du culte vendus ou détruits. Ce « vandalisme révolutionnaire », comme on l’appelle, est resté un des griefs majeurs de certains catholiques contre la grande tourmente issue de 1789. Sans esprit de polémique, on peut rappeler ici qu’en s’en

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