Opération Mincemeat : L'histoire d'espionnage qui changea le cours de la Seconde Guerre mondiale

L’Allemagne avait des
espions opérant au sein des services de renseignement soviétiques. Ewen
préparait depuis des mois l’opération de désinformation la plus complexe de la
guerre et la personne la plus à même de faire échouer l’opération Mincemeat,
s’il venait à la découvrir, était son propre frère.

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Le collectionneur de papillons
    Cholmondeley et Montagu étaient convaincus que William
Martin, le personnage qu’ils avaient créé, était parfaitement crédible.
« Nous avions l’impression de le connaître aussi bien que notre meilleur
ami, écrivit Montagu. Nous en étions arrivés à penser que nous connaissions
Bill Martin depuis sa petite enfance, que nous connaissions ses moindres pensées
et ses réactions probables à tous les événements qui pouvaient se produire dans
sa vie. »
    Il n’est pas surprenant que Montagu et Cholmondeley
prétendaient connaître Bill Martin aussi bien qu’ils se connaissaient eux-mêmes
car, d’une certaine façon, la personnalité qu’ils avaient créée était leur
alter ego combiné, la personne qu’ils auraient aimé être. Un contemporain
décrivit Cholmondeley comme « un incurable romantique de la vieille
école ». Chez Bill Martin, Cholmondeley trouva un personnage imaginaire
qui pouvait porter la cape et brandir l’épée à sa place. Alors que Cholmondeley
était cloué au sol, à cause de sa vue courte, et rivé à son bureau, à cause de
son travail, Bill Martin était un jeune officier en première ligne, partant en
guerre alors que sa fiancée l’attendait. Montagu écrivit qu’il « s’était
enrôlé pour partir en mer, pour mettre à profit son expérience de marin et pour
se battre ». Bill Martin était l’officier de marine d’active qu’il n’était
pas. Mais Montagu alla encore plus loin dans son identification avec Bill
Martin.
    « Ewen vivait son rôle, d’après Jean Leslie. Il était Willie Martin et j’étais Pam. Son esprit fonctionnait ainsi. » Ewen (Bill)
commença à courtiser Jean (Pam) « pour de vrai ». Il l’amena dans des
clubs, au cinéma et au restaurant. Il lui offrit des cadeaux, des bijoux et un
col de chemise des Royal Marines, en souvenir de « Bill ».
    « Il m’écrivit des lettres interminables, de la part
de Bill . » Jean conserva quelques-unes de ces lettres de son fiancé
imaginaire. Elles constituent un témoignage extraordinaire de l’une des
histoires d’amour les plus étranges qui soient, de la façon totalement
inattendue dont la fiction se mêlait à la réalité. Jean Leslie n’était,
semble-t-il, pas farouchement opposée aux avances de Montagu ou, plus
précisément, à celles de Bill Martin. Elle fit agrandir une copie de la
photographie de la baignade et écrivit dessus : « jusqu’à ce que la
mort nous sépare, Amoureusement, Pam », et la donna à Montagu.
    Montagu répondit :
    Pam, ma très chère,
    J’ai adoré la photographie – à tel point que, ne
supportant pas l’idée qu’il lui arrive quelque chose, je l’ai laissée au bon
soin de mon meilleur ami – je sais que vous l’auriez beaucoup
apprécié – il m’a tout donné et a fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
    Je crois que j’ai une prémonition – c’est bien le
cas et, à lire votre inscription sur la photo, vous semblez partager cette
crainte.
    Si je ne revenais pas, vous ne voudrez peut-être par
porter la bague que je vous ai offerte, donc j’espère que vous aimerez cette
broche. Vous pourrez continuer à la porter, même si, comme je l’espère, vous
rencontrerez quelqu’un qui sera davantage digne de vous – je suis sûr
qu’il comprendra si c’est le genre d’homme que vous aimez.
    À vous, pour toujours,
Bill
    P.S. La prochaine fois, essayez plutôt les RNVR.
    Ewen Montagu faisait évidemment partie des RNVR, les
réservistes de la Royal Navy. Il posa la photo de Pam sur sa coiffeuse, à
Kensington Court.
    Montagu était séparé de sa femme depuis 1940, avec une seule
et brève occasion de retrouvailles, aux États-Unis, en 1941, lorsqu’il fut
envoyé pour travailler en liaison avec le FBI. Dans ses lettres à sa femme,
Ewen mentionnait ouvertement ses rendez-vous avec une jeune femme en pension
dans les Elms, à Hampstead, même s’il ne désigna jamais Jean Leslie nommément.
« La fille des Elms est l’une des secrétaires de Tar Robertson et elle est
très gentille et très intelligente (22-24 ans ?), dit-il à Iris.
L’une de ses