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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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à proximité du Quartier Général. Clary est le seul à montrer une légère réticence. Il est vrai que des trois, il est le moins soûl, mais il n’a que le temps de se précipiter à l’arrière ; Fernandez embraie déjà, démarrant sur les chapeaux de roues.
    « Briquée comme elle est, tu peux être sûr que c’est pas la jeep de n’importe qui, fait remarquer Clary.
    –  Ta gueule ! On s’en fout ! jette Ickewitz. Maintenant, ce qu’il faut dégotter, ce sont les bidons. »
    En moins d’un quart d’heure, six jerricans sont facilement dérobés, au hasard des véhicules rencontrés.
    Il est presque minuit quand les trois légionnaires dirigent la jeep vers le bistrot.
    Le Chinois était sur le point de fermer son établissement, mais les uniformes de l’Infanterie coloniale, les galons de ser gent-chef sur la manche de Clary, et la propreté de la jeep le rassurent. Il accueille les trois hommes avec courtoisie.
    « Trois alcools », lance Ickewitz.
    L’homme s’empresse et sert les soldats.
    « Dis-moi, mon vieux, le colonel Dupuis, notre grand chef, désirerait acheter une centaine de litres de cet excellent alcool. Pourrais-tu nous désigner l’endroit où tu te le procures ?
    –  Certainement, messieurs. Dites à votre colonel de venir demain matin, je le ferai conduire à la distillerie.
    –  C’est pas demain, c’est tout de suite. »
    L’homme sourit aimablement.
    « C’est impossible, c’est en dehors de la ville, il y a des patrouilles et à cette heure, la distillerie est déserte.
    –  T’occupe pas, poursuit Ickewitz qui commence à s’énerver. Ferme ta baraque et conduis-nous.
    –  Mais voyons, messieurs, vous n’y pensez pas, nous allons nous faire tirer dessus. »
    Ickewitz balance une gifle au Chinois qui s’écroule.
    « Tu nous conduis ou je te bute ! »
    Clary et Fernandez soulèvent l’homme, le portent par les bras, et le projettent sans ménagement dans la jeep. Ickewitz est passé derrière le comptoir, s’est saisi d’une bouteille d’alcool dont il a brisé le goulot sur le bord du bar, puis, après avoir avalé une large rasade, il explique :
    « Pour la route. »
     
    Malgré son ivresse, Fernandez conduit d’une main sûre. Il file à tombeau ouvert dans la direction indiquée par le Chinois qui se tient à l’arrière, épouvanté.
    La distillerie se trouve à huit kilomètres de Lang-Son, sur le chemin communal 144 en direction de Knon-Kuyen, – c’est-à- dire à une dizaine de kilomètres tout au plus de la frontière chinoise.
    À la sortie de la ville, le véhicule est stoppé par une patrouille de thabors. Fernandez ne se démonte pas, il déclare :
    « Mission d’information technique pour le général Dupuis. »
    Le caporal marocain ne parle pas le français. Il fait comprendre qu’il n’a pas d’ordres et qu’il est interdit de passer.
    Fernandez se déchaîne. Vociférant, il insulte le malheureux insistant sur les mots : « jeep », « général » (les seuls que le Marocain doit saisir). Dès qu’il comprend que l’hésitation commence à gagner la sentinelle, Fernandez embraie et démarre, laissant pantois les hommes de la patrouille. Les légionnaires s’attendent à essuyer des coups de feu, mais rien ne se produit ; le caporal marocain a dû être impressionné par l’assurance agressive de Fernandez.
    « Qu’est-ce qu’il va se farcir comme cabane, le bounioul ! constate Ickewitz hilare.
    –  T’as raison, mais on ferait mieux de rentrer par un autre chemin, fait remarquer Fernandez. Entre-temps, ils se seront sûrement réveillés. »
    Le sentier, fait de terre et de pierres, est semé d’obstacles, de trous et d’embûches. Contre toute prudence, Fernandez roule en troisième, pied au plancher.
    La jeep effectue de véritables bonds et file pleins phares.
    Le Chinois n’avait pas menti, la distillerie se trouve bien à l’endroit qu’il avait désigné. Elle n’est gardée que par un vieillard ensommeillé qui est maîtrisé séance tenante. Les trois légionnaires repèrent une cuve d’alcool qu’ils entaillent à la hache, puis, à plusieurs reprises, ils lavent les jerricans, les reniflant entre chaque rinçage pour se rendre compte si l’odeur de l’essence s’atténue. Enfin, ils remplissent les six bidons de vingt litres, les refermant hermétiquement, et reprennent le chemin du retour, laissant le reste de la cuve se répandre sur le sol.
    Fernandez roule plus

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