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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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partisans, et on les répartit dans des petits postes, le long de la rivière Kinh-Mon qui serpente entre Hanoï et Haïphong. L’état-major appelait ces fragiles fortins les P. K. (Postes kilométriques). La plupart d’entre eux avaient été construits grossièrement par le Génie, et le premier travail qui incomba aux nouveaux locataires fut d’en assurer la fortification. En moins d’une semaine, les légionnaires transformèrent les P. K. en de véritables petits bastions, destinés à affirmer la présence française sur un territoire entièrement contrôlé par le Viet-minh.
    Autour des postes la densité de la jungle rendait toute sortie impossible. Dans la forêt, les viets étaient maîtres. En revanche, l’ennemi ne s’aventurait pas à découvert, en particulier le long de la voie ferrée Haïphong-Hanoï, ou le long de la rivière sur laquelle des unités légères de la marine pourvues d’artillerie se livraient à un incessant va-et-vient.
    Les L. C. T., sortes de longues péniches de débarquement blindées étaient le seul lien concret des postes avec le reste du monde. Ils en assuraient le ravitaillement, tout en rendant leur attaque téméraire : en quelques heures ils pouvaient apporter du renfort à un P. K. qui signalait son attaque par radio.
    La distance qui séparait les postes variait entre cinq et dix kilomètres, mais il était interdit aux hommes de sortir, même pour se rejoindre. Leur seul contact restait la radio, et très vite leur inaction inquiéta le haut commandement : il fallait employer ces légionnaires qui risquaient de sombrer dans la nonchalance.
    Les attentats répétés sur la voie ferrée allaient apporter la solution à ce problème. Le 3 février 1947 l’ordre arriva. Le 1" bataillon du 3 e Étranger se vit chargé du travail le plus dangereux, le plus ingrat et le plus démoralisant de la guerre d’Indochine : « l’ouverture des voies ».
     
    Le P. K. 36 se trouvait à quelques centaines de mètres du bac de Laïkhé. Klauss et Bianchini en assuraient le commandement ; cinq légionnaires les aidaient à faire régner la discipline dans les rangs de la vingtaine de partisans qui complétaient l’effectif du poste. À cinq kilomètres à l’est, le P. K. 30, semblable en tous points, était proche du village de Pham-Xa. Il était commandé par Lantz et Favrier.
    L’ordre du 3 février fut transmis par le lieutenant de vaisseau d’Alnois qui, parti d’Haïphong à l’aube, remontait la rivière en L. C. T., expliquant en cinq minutes à chaque chef de poste la mission dont il allait se trouver chargé.
    L’officier de marine avait refusé la bière offerte par Klauss.
    « Vous comprenez, il me reste plus de vingt postes à visiter… »
    Klauss trouvait un goût fade à sa canette. Il venait de prendre connaissance des instructions transmises par d’Alnois.
    « Elle saute souvent, la voie ? interrogea-t-il.
    –  Presque tous les jours.
    –  C’est curieux, par ici tout semble calme. Depuis notre arrivée, les trains passent.
    –  On répare au fur et à mesure des sabotages : les trains sont tous suivis d’une motrice de secours. »
    Klauss sourit, et ajouta :
    « Beaucoup de pertes en vies humaines ? »
    L’officier de marine fit un effort pour ne pas détourner son regard de celui du sergent.
    « Pratiquement pas », finit-il par répondre.
    Klauss sourit et ajouta :
    « Vous semblez le regretter, commandant.
    –  La mission que je viens de vous transmettre serait plus facile à expliquer.
    –  Vous n’avez pas à m’expliquer les ordres, commandant. Je n’ai pas à les commenter. Je n’ai qu’à les exécuter. »
     
    Dans la soirée, Klauss rassemble ses hommes dans la pièce qui leur sert de foyer. Il y a là le sergent Bianchini et trois caporaux : Benoit, Français, Ruhmkorft, ancien adjudant de la Wehrmacht, et Kalish qui fut légionnaire avant la guerre, puis qui combattit dans les rangs de l'Afrika Korps avant de rejoindre la Légion en 1945. Il y a en outre deux simples légionnaires : Vinkel, un Hollandais, et Lefèvre, un titi parisien.
    Klauss débouche une bouteille de cognac et la partage en sept dans les gobelets qu’il a disposés sur la table. Puis, calmement, il commence son exposé : « Nous sommes sept. À partir de demain nous sortons tous les matins à six heures trente. Une patrouille à l’est en direction de Haïphong, deux hommes et le sergent Bianchini ; une patrouille à

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