Par le sang versé
extrémités du convoi. Deux wagons ne sont pas armés ; destinés à la compagnie du Génie, ils transportent le matériel pour réparer immédiatement tous les sabotages, ainsi qu’un grand nombre de rails pour le cas où la voie aurait été détruite sur un long parcours.
Après six mois de travail acharné le train sort des chantiers de Nha-Trang. Son aspect est ahurissant. Bardé de toutes sortes de plaques de protection, rapiécé par différents blindages, le mastodonte peut affronter, sans dommage, les armes les plus lourdes dont dispose l’ennemi. L’étrange convoi comprend : 2 locomotives blindées, 14 wagons, dont 8 de combat, 1 wagon P. C. destiné aux officiers,
1 wagon infirmerie blindé,
2 wagons pilotes chargés de rails et de traverses,
1 wagon cuisine-restaurant.
De plus, les tenders et les citernes des locomotives, également blindés, contiennent 6 000 litres d’eau, ce qui assure au convoi une autonomie de 72 heures.
L’armement automatique comprend en outre :
8 jumelages de mitrailleuses Reibel sur chariot,
1 canon 40 mm « Beaufors » sur tourelle,
1 canon 20 mm « Flack » sur tourelle avec lunette et alimentation infrarouge,
1 bombarde lançant simultanément 10 grenades,
2 mortiers 81 mm et 60 mm ;
Le tout disposé de façon à être servi par un personnel à l’abri des coups de l’ennemi.
En plus des transmissions radio, un téléphone relie tous les wagons et la locomotive.
Des règles de circulation spéciales ont été établies, donnant la priorité absolue au train blindé sur tous les autres convois.
Sa vitesse maximum sera : en ligne droite, avec visibilité totale, 20 km-heure ; en courbe, 10 km-heure ; en marche de nuit, 4 km-heure.
L’arrêt du convoi est en outre imposé avant tout pont d’une longueur de plus de six mètres et avant chaque tunnel. Une patrouille armée devra faire la reconnaissance des tunnels, s’éclairant à la torche.
Pendant que l’ingénieur Labrice et le caporal-chef Kaunitz bricolaient leur train, Raphanaud rassemblait les soldats d’élite qui devaient combattre à son bord.
Deux officiers vont le seconder. Le lieutenant Lehiat est un ami personnel du capitaine. Quant au sous-lieutenant Ernst Noack il est aussi spectaculaire que Raphanaud est discret.
Amoureux de son personnage, Noack, lui aussi ancien officier allemand, mesure 1,95 m et pèse 120 kilos. Il se rase le crâne chaque matin et porte monocle.
Il est constamment torse nu, mais soutient son pantalon à l’aide de bretelles de cuir dans lesquelles, à hauteur de la poitrine, sont passés les étuis de deux poignards commando. Autour de sa taille, trois bidons d’alcool pendent en permanence. Il sanctionne les incartades de ses hommes par des gifles qui les envoient généralement à plusieurs mètres, mais il fait preuve, même dans ses moments de fureur, d’une inaltérable bonne humeur qui se manifeste par des éclats de rire sourds et caverneux. La quantité d’alcool qu’il ingurgite chaque jour semble ne produire aucun effet sur sa santé et son comportement.
Quant au recrutement des sous-officiers et des légionnaires, Raphanaud l’a confié à un homme qu’il connaît bien et qui a instantanément accepté de le suivre : l’adjudant Parsianni. Comme Mattei, Parsianni est Corse. Il est breveté de l’école de commando du capitaine Raphanaud, spécialité dans laquelle il s’est révélé plus que brillant. C’est Parsianni qui visite les compagnies du 2 e Étranger, étudie les dossiers de chaque homme, examine leurs faits d’armes et leurs réactions au combat. Achevant son étude par des interrogatoires prolongés, il finit par recruter une centaine d’hommes exceptionnels.
Le 10 novembre 1948 la fabrication du train blindé est achevée. Le convoi est toujours garé au secret dans les ateliers de Nha-Trang. Les trois officiers, Raphanaud, Noack et Lehiat sont confortablement installés dans le wagon-restaurant. L’humour ne perdant jamais ses droits à la Légion, des pancartes touristiques récupérées par Noack ornent ses parois, vantant les avantages des voyages par rail, et de coquets rideaux plissés dissimulent les meurtrières. Depuis deux jours déjà une cinquantaine de partisans, composant l’effectif combattant supplémentaire, sont arrivés et ont pris possession des wagons auxquels ils sont affectés. Eux non plus, n’ont pas été choisis au hasard. Ce sont des Rhadès, race descendante des Moï
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