Par le sang versé
qui sont considérés comme les meilleurs combattants asiatiques. Ils sont encadrés par un sous-officier et deux caporaux de la Légion. Mais le grand événement est attendu dans la soirée : l’arrivée de l’adjudant Parsianni et de ses 96 légionnaires. Raphanaud, un verre de whisky en main, jubile, expliquant à ses adjoints :
« La Légion étrangère est formée des plus prestigieux régiments du monde. Parmi ces régiments, le 2 e Étranger est composé de vétérans sélectionnés ; au sein du 2 e Étranger, le 1 er bataillon fait depuis deux ans figure de vedette ; et c’est parmi ces hommes que Parsianni a fait un tri méticuleux pour en choisir les meilleurs. Vous vous rendez compte de la compagnie qui va se trouver sous nos ordres : des super lions choisis parmi des lions.
– Sans compter les Rhadès, ajoute Lehiat. J’ai passé une inspection hier soir, ils m’ont l’air de tueurs nés.
– Je connais la race, approuve Raphanaud, ils ne nous décevront pas. »
À dix-huit heures, les trois officiers quittent le wagon et se dirigent vers une voie secondaire. Le train transportant la compagnie arrive à l’heure prévue. Parsianni saute du premier wagon, avant l’arrêt, et se présente réglementairement. Noack et Lehiat sont étonnés de s’apercevoir que l’adjudant, malgré l’application scrupuleuse du protocole militaire, tutoie le capitaine.
« Mon capitaine, je fais rassembler les hommes sur le quai ?
– Non, tu me les présenteras au dépôt, c’est à cinq minutes de marche. Je tiens à leur faire un exposé sur leur nouvelle arme et sur son utilisation.
– À tes ordres, mon capitaine. »
Tandis qu’ils descendent des wagons, Raphanaud observe ses légionnaires. Ils sont tous tirés à quatre épingles, les chemises sont immaculées, les trois plis réglementaires du dos soigneusement dessinés, pas une trace de fatigue ne se lit sur leurs visages fraîchement rasés ; les mains sont propres, les ongles impeccables ; pas un fil ne dépasse des sacs et les armes sont étincelantes. Raphanaud sourit.
« Tu as préparé ton arrivée, Parsianni !
– Mon capitaine, ces 96 types, ce n’est qu’une seule machine. Regardez-les bien, je crois qu’ils sont les cent meilleurs soldats du monde. »
Même Noack qui pourtant, des trois officiers, s’était montré le plus sceptique sur le mode de recrutement décidé par Raphanaud, est impressionné par le résultat et par l’allure générale du groupe. Le sergent Célier commande la manœuvre et le commando prend la direction du dépôt.
« Pourcentage d’Allemands ? questionne Raphanaud.
– Vingt-six Allemands, mon capitaine. Douze Italiens, trois Russes – des vétérans –, vingt et un Français. Les autres d’un peu partout. Le cuisinier est Hongrois, il s’appelle Flinck, il a été pendant trois ans chef dans un bistrot de luxe de New York. Il faudrait lui attribuer un aide ou deux.
– Parsianni, tu me plais, interrompt Noack. La bouffe, c’est sacré. »
Arrivés devant le train blindé, les hommes restent figés, contemplatifs. Raphanaud se fait présenter un à un les légionnaires. Puis il ordonne le repos et les laisse s’installer.
Il faut moins d’un quart d’heure aux légionnaires pour prendre possession des lieux. Sans heurts, sans discussions, ils trouvent leurs places, étudient les positions de défense. Ils comprennent en un instant comment va fonctionner la machine et ce qu’on attend d’eux.
Chaque wagon de combat est prévu pour quinze hommes qui dorment sur des couchettes superposées par trois dans le sens de la hauteur. Ils possèdent une armoire pour deux, une table et six tabourets par wagon. L’exiguïté du logement oblige les occupants à observer une propreté méticuleuse. La vie à bord du train blindé doit ressembler en tous points à celle des marins ; même discipline, mêmes consignes.
Le 13 novembre, c’est au tour de la compagnie du Génie de rejoindre le train et de s’installer. Et le 15 à l’aube, le monstre blindé part pour sa première mission.
17.
P ENDANT les trois premières semaines, le train blindé précède d’importants convois que l’ennemi n’attaque plus. Les seuls incidents notables seront quelques sabotages de la voie qui sera remise en état instantanément par la compagnie du Génie. Mais Raphanaud ne se leurre pas, il sait que les viets surpris et désorientés les observent et
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