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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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viets placés sous ses ordres, Speck avait en outre été « marié » à la fille d’un chef Moi.
    La première opération d’envergure lancée par l’ennemi sous l’instigation et le commandement du caporal Speck devait créer au sein du 2 e Étranger une réaction de rage et de désespoir : ce fut l’attaque du poste de Phu-Hoi – poste dans lequel Speck avait été cantonné plusieurs mois et dont l’investissement ne pouvait être mené à bien que grâce à sa connaissance parfaite des lieux.
    Le 21 mars 1949, le capitaine Raphanaud est avisé vers six heures du matin que le poste de Phu-Hoi vient d’être attaqué par un effectif vingt fois supérieur à la poignée de légionnaires qui l’occupe. Le train blindé se trouve alors sur l’axe secondaire qui relie Muong-Man à Phan-Thiet. Aussitôt, Raphanaud donne l’ordre de renverser la vapeur et de regagner Phan-Thiet en marche arrière à la vitesse maxima que peut atteindre le convoi.
    Sur le quai de la station trois compagnies de légionnaires au complet se tiennent prêtes à embarquer car l’effectif du train est très insuffisant pour tenter de délivrer les assiégés. Les deux cent cinquante hommes se précipitent ; ils envahissent les wagons, s’infiltrent partout, dans la cuisine, dans l’infirmerie, dans le carré des officiers ; les derniers poussent comme les usagers du métro aux heures de pointe. Dans chaque wagon, les légionnaires se tiennent debout, coincés les uns contre les autres, in disposant souvent pas de la place nécessaire pour poser leurs pieds à plat sur le sol. Leurs visages se touchent. Il règne une température d’enfer car si on avait laissé les portes ouvertes des paquets entiers d’hommes se seraient trouvés éjectés. Le soleil tape sur la tôle blindée du toit et les seules ouvertures sont les meurtrières. L’air surchauffé est presque irrespirable ; imprégné par l’odeur de la sueur, il brûle les narines à chaque aspiration. Il n’y a qu’une dizaine de kilomètres à parcourir pour rejoindre le point le plus proche du poste assiégé, mais le train surchargé mettra deux heures pour y parvenir. Plusieurs hommes se trouvent dans l’obligation d’uriner sans bouger, le long de leurs jambes, à l’intérieur de leurs pantalons, mais ils sont tellement dégoulinants de sueur que ça ne les dérange aucunement.
    Le convoi s’arrête enfin en rase campagne. Les portes s’ouvrent et les légionnaires se jettent sur le bas-côté. La température extérieure dépasse 30°et pourtant ils ont l’impression de plonger dans un bain de fraîcheur.
    Raphanaud et Noack ne leur laissent même pas une minute de répit. Hurlant les ordres aux sergents responsables, ils se lancent sur la piste qui mène au poste et village de Phu-Hoi – six kilomètres d’ascension à travers la jungle. Tous savent que le poste de Phu-Hoi se trouve au sommet d’une colline, surplombant une région qui s’appelle le triangle des rizières, et qui entrera, plus tard, dans l’histoire de la Légion, sous le nom de « tombeau du 2 e Étranger ».
    Au fur et à mesure de la progression des quatre compagnies, Raphanaud qui provisoirement a pris le commandement voit croître son inquiétude.
    Le poste de Phu-Hoi est tenu par des gardes indigènes qui tous appartiennent au 2 e Étranger. Environ deux cent cinquante soldats en armes, encadrés par une trentaine de légionnaires européens, et commandés par un prestigieux soldat : le sergent Guidon de Lavallée, un métis de haute taille, titulaire de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire.
    Et pourtant aucun coup de feu n’est perceptible. Il semble que tout combat a cessé. Depuis le S. O. S. matinal, les défenseurs du poste ont-ils pu repousser l’assaut de mille viets ?
    Lorsque les compagnies de Raphanaud parviennent à la lisière de la forêt et découvrent la colline surplombée par le poste, le capitaine ordonne une halte.
    En silence, les hommes contemplent l’hallucinant spectacle qui s’étend sous leurs yeux.
    La colline est jonchée de cadavres. Au premier coup d’œil on ne distingue qu’une multitude de taches noires qui tranchent sur l’uniformité terne de la rocaille.
    L’arrivée des légionnaires provoque l’envol d’une vingtaine de busards qui se lancent dans une ronde sinistre, grimpant haut dans le ciel d’où ils se laissent retomber en planant, frôlant le charnier avant de reprendre leur ascension, et leurs

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