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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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direction de l’ombre furtive qu’il a entrevue. Aussitôt, d’autres crépitements de mitraillettes se déclenchent. Comme Noack, un légionnaire a dû lui aussi apercevoir le viet. Le lieutenant se laisse tomber de son arbre et hurle :
    « Remontez sur moi en demi-cercle ! Faites passer ! On les tient ! Je leur coupe toute retraite ! »
    La forêt s’anime. Les voix sorties des cachettes crient à leur tour :
    « En demi-cercle sur le lieutenant ! Il a repéré les viets ! »
    De nouveau, Noack aperçoit la tache noire d’un homme qui se déplace avec une agilité stupéfiante. Il tire et le manque, mais il situe le viet avec plus de précision. Un, puis deux légionnaires rejoignent le lieutenant qui leur désigne la position approximative de l’ennemi. Noack leur ordonne d’aller se poster au sommet et tente de deviner les positions des autres légionnaires qui, à leur tour, gravissent la pente. Il distingue maintenant un de ses hommes qui monte à découvert. Hélas ! le viet lui aussi l’a vu. Il tire et le légionnaire s’écroule ; mais cette fois la position viet est située avec certitude et précision. Ils sont derrière un rocher et tirent à travers une faille. S’ils sont plusieurs et bien armés, il ne sera pas possible de les déloger sans subir de pertes.
     
    Une demi-heure plus tard, tous les légionnaires occupent des positions abritées, encerclant le rocher qui protège l’ennemi. Les légionnaires déclenchent un feu intense mais inefficace. Dès que l’un d’eux cherche un angle de tir meilleur et se découvre, il essuie un coup de feu précis. Un homme reçoit une balle dans l’épaule, un autre dans la cuisse. Cela peut durer longtemps et pourtant Noack a maintenant acquis la certitude que le tireur viet est seul ou que tout au plus ils sont deux.
    Noack est sur le point d’ordonner l’assaut lorsqu’un élément nouveau intervient. D’un bond un légionnaire a changé de position ; il est imprudemment passé en plein dans l’axe de tir du viet et pourtant aucun coup de feu n’est parti. Noack sort à son tour de son abri ; il tire à la mitraillette sur le rocher, se découvrant ostensiblement. Aucune riposte ne se manifeste. Ou c’est un piège, ou les viets ne possèdent plus de munitions. Noack ordonne l’assaut et les hommes se ruent vers le rocher, prêts à y faire tomber une pluie de grenades. Ils sont stoppés dans leur élan par l’ennemi qui sort à découvert les mains en l’air, figeant les légionnaires dans la stupeur.
    C’est un gamin, presque un enfant ; il peut avoir tout au plus treize ou quatorze ans. Une inspection rapide de l’abri qu’il occupait démontre qu’il était bien seul, pourvu d’une seule arme : un fusil à lunette, dont il a tiré jusqu’à la dernière cartouche.
    Deux légionnaires fouillent le gosse, il ne possède rien sur lui, pas le moindre papier, aucune arme.
    L’enfant dévisage le lieutenant sans émotion, et dans un français parfait, il demande simplement :
    « Vous allez me tuer ?
    –  Et tu parles français par-dessus le marché ! C’est toi qui canardes en bas depuis hier ?
    –  Oui, avoue le gosse.
    –  Toi, tout seul ?
    –  Oui. Les chefs m’ont laissé parce que je cours le plus vite.
    –  Tu sais combien d’hommes tu as tué et blessé ?
    –  Beaucoup j’espère.
    –  Tu trouverais normal que je te tue ?
    –  Oui. »
    Un des légionnaires blessés, celui dont une balle a traversé l’épaule, intervient :
    « Mon lieutenant, vous allez le buter ?
    –  Qu’est-ce que tu en penses ?
    –  Je n’y tiens pas.
    –  Rassure-toi, moi non plus. »
    Les légionnaires se détendent : c’est plutôt de l’admiration que leur inspire le gamin.
    Noack déplie son antenne et appelle le poste de radio du train. Il obtient aussitôt Raphanaud.
    « Avons neutralisé l’action de l’ennemi, annonce Noack. Les pontonniers peuvent reprendre le travail sans risque. Trois blessés dans nos rangs. Ennemi prisonnier. Vous rejoignons. À vous.
    –  Félicitations Noack, ça n’a pas été trop dur ? »
    Cédant à son sens de l’humour, le lieutenant ne peut s’empêcher de déclarer :
    « Avons eu à faire à forte partie. Ennemi surentraîné. Technicien et combattant de grande classe. »
     
    Deux légionnaires encadrent le gamin ; la colonne commence la descente. Instinctivement, le gosse a porté ses mains derrière sa nuque et marche dans cette

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