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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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nous revenons ? J’ai été à deux doigts de réclamer des renforts à Phan-Thiet, nom de Dieu ! On aurait eu bonne mine ! »
    Pour Noack, la seule préoccupation est le sort du gamin ; il dépend de la réaction de Raphanaud.
    « Que comptez-vous faire du gosse, mon capitaine ?
    –  Le gosse, le gosse ! C’est un soldat votre gosse, son bilan en fait foi. Nous ne pouvons que le considérer comme tel. Si je fais un rapport, il file dans un camp de prisonniers. Si on cherche à l’incorporer parmi nos partisans, il va foutre le camp à la première occasion.
    –  Ça, je l’admets. Il ne prendra pas les armes contre ses frères, c’est d’ailleurs pour ça qu’il m’intéresse.
    –  Vous avez une suggestion ?
    –  Pour l’instant, aucune. Il faudrait étudier ses réactions dans les jours qui vont venir. Ça impliquerait évidemment de ne pas le livrer jusqu’à nouvel ordre.
    –  C’est bon, je ne transmets rien à son sujet par radio, nous ne serons pas à Phan-Thiet avant demain soir, et de toute façon, tant qu’il sera plâtré, il ne risque pas de s’évader.
    –  Ça, c’est une autre histoire, mais effectivement sa blessure minimise les risques. »
    Le médecin-capitaine rejoint les trois officiers et donne des nouvelles rassurantes des quatre blessés, il ajoute :
    « Au fait, j’ai cru bon de demander aux légionnaires si la présence du gosse ne les indisposait pas. Ils semblent s’en foutre éperdument. » Noack hausse les épaules.
    « Évidemment qu’ils s’en foutent ! Ce sont des légionnaires, ça fait partie de leur boulot de recevoir des coups et d’en distri buer. Ils n’ont pas le temps de haïr leurs ennemis. Vous pouvez les laisser ensemble… »
     
    Dans la matinée du 1 er mars, l’adjudant-chef Grandval rend compte de l’état des travaux. Sauf surprise imprévisible le pont sera utilisable en fin de soirée et le train pourra passer et reprendre sa route vers Phan-Thiet.
    Noack avait demandé à rendre visite aux blessés dès l’aube, mais le médecin-capitaine s’y était opposé, leur ayant administré de fortes doses de calmants pour la nuit. Ce n’est que vers midi que le lieutenant reçoit l’autorisation de pénétrer dans le wagon-infirmerie.
    Les couchettes du petit Kuo et de Stœrer, l’Alsacien qui a reçu une balle dans l’épaule sont tellement rapprochées qu’on les croirait étendus dans un lit à deux places.
    À l’arrivée de Noack, l’Alsacien est en pleine fureur ; il insulte le petit viet de tous les noms qu’il peut trouver.
    « Tu es un petit salopard ! Une ordure ! Un fumier ! J’aurais dû te flinguer sur place hier, je regretterai toute ma vie de ne pas t’avoir flingué hier ! Ça c’est sûr ! »
    Sur le moment, Noack est surpris, mais le visage souriant du gamin le rassure, et sur la couchette inférieure les deux autres blessés qui se tordent de rire enlèvent toute inquiétude au lieutenant. L’un d’eux tient sa jambe bandée, et secoué d’hilarité, il répète :
    « Oh ! Putain ! Stœrer, arrête de me faire rigoler, ça me fait mal. »
    L’apparition du lieutenant calme les trois hommes.
    « Qu’est-ce qui se passe ici ? crie Noack. Stœrer, si tu veux qu’on change le gosse de wagon, tu n’as qu’à le dire ! On t’a déjà posé la question hier, non ?
    –  C’est pas ça, mon lieutenant, mais le gosse il est pas régulier. Comme on s’ennuyait on a joué aux cartes, à la bataille. Comme il avait pas d’argent je lui ai dit : « Ça fait rien, si tu perds tu me paieras « plus tard. » Bon, le voilà qui se met à gagner, moi je paie en pensant : « Maintenant qu’il a de l’argent, « la partie va être plus intéressante. » Mais je continue à perdre jusqu’à ce qu’il me prenne tout mon pognon, alors je lui dis : « Bon ! à ton tour de me « faire crédit. » Et vous savez ce qu’il me répond ?
    –  Non ?
    –  Il me répond : « Je t’emmerde, j’ai pas confiance « en toi, si tu as plus d’argent, on joue plus. » Il y a de quoi râler, non ! Sans compter les deux fumiers en dessous qui se marrent comme des cons et qui refusent de me prêter un rond. »
    Noack a du mal à conserver son sérieux ; néanmoins il parvient à sermonner Kuo.
    « Il a raison, tu n’es pas très régulier. À mon avis, tu lui dois une revanche.
    –  Bon, concède le gosse, je veux bien rejouer la moitié, mais le reste, je le garde.

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