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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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hauts personnages étaient à la Cour, fort «  skeptique  »
(comme disait Montaigne) en fait de religion.
    Ha !
certes, Quéribus eût trouvé du dernier commun d’être, comme Fogacer, athée, et
à la vérité il n’eût pu l’être comme lui par étude et réflexion, étant sans
lecture (hormis Ronsard). Mais un croyant véritable eût-il songé à barguigner
si légèrement et sur ce ton de gausserie, l’Enfer de M. de Montcalm contre son
mondain avancement ?
    Exemplo
plus quam ratione vivimus [56] Catherine, la vraie souveraine du royaume depuis la mort d’Henri II, était
sans zèle aucun. Nièce d’un pape tant mensonger en ses discours que personne ne
le voulait croire quand il disait la vérité, on eût dit que ce Machiavel en
cotillon avait en ses alentours gagné une intempérie qui ne se pouvait mieux
désigner que par le mot « indifférence » et qui autour d’elle, de
proche en proche, avait infecté toute la Cour. Catholicisme, Réforme, c’était
tout un pour Catherine. Pour convaincre le cardinal de Bourbon d’officier le
18 août et d’unir Margot à Navarre, elle fabriqua une lettre de son
ambassadeur auprès du pape, laquelle lettre annonçait faussement que le
Saint-Père baillait son autorisation à ce mariage « contre nature ».
Il était si peu déconnu, en fait, que Catherine n’avait cure de l’hérésie de
son futur gendre, que les curés et le peuple de Paris, la haïssant d’avoir
manigancé cette union « infâme », l’appelaient « Jézabel »
et, la couvrant de boue, la vouaient aux gémonies. Ce n’est point pour défendre
une religion dont elle se souciait comme un poisson d’une pomme mais par calcul
politique, pour engarder son pouvoir personnel contre Coligny qu’elle trébucha
de par l’imprévisible concaténation des causes, du meurtre d’un homme au
massacre le plus vil de notre Histoire. Quand Navarre, contraint de se renier
après la Saint-Barthélemy, alla à messe pour la première fois, Catherine,
tournée vers les ambassadeurs étrangers et les envisageant, rit à gueule bec,
comme si l’horrible apocalypse que le royaume avait connue dans la nuit du
24 août n’avait été à ses yeux qu’une farce de batellerie, et la
conversion d’un Prince, acquise le cotel sur la gorge, un sujet d’immense
gausserie.
    Mon gentil
Quéribus fut, la merci Dieu, étranger à ces horreurs, mais né en cette Cour, il
en avait l’indifférence et n’était point rebroussé à l’idée de monnayer l’Enfer
de M. de Montcalm – qu’il moquait – contre une sénéchaussée –
qu’il moquait aussi. En outre, là où la fortune l’avait fait naître, il savait
tant de choses sur tant de gens, y compris les appétits du père d’Angelina,
lequel il n’avait pourtant jamais vu ! Ha ! me pensai-je, voilà bien
la supériorité des seigneurs qui vivent au Louvre dans les premiers rayons du
soleil royal. Ils décroient ce que le vulgaire croit, et ils savent ce qui lui
est déconnu. Et quelles infinies ressources ils tirent dans la quotidienne
action, et de cette décroyance, et de cette connaissance, je le laisse à
imaginer.
    Mon Quéribus
était muguet dans l’âme et si l’on veut céans faire le censeur, vain, paonnant,
jargonnant et, à ce que je cuide, infiniment luxurieux. Mais il avait du cœur
davantage, et de sa complexion il était moins étourdi et léger qu’il n’y
paraissait de prime, car cette lettre à M. de Montcalm où je ne vis d’abord que
promesse en l’air flottant, eau benoîte de cour, compliment du matin dès le
soir oublié, mon gentil Baron l’écrivit bel et bien (encore qu’y peinant
beaucoup et sans orthographe aucune) et tout de gob la dépêcha au château de Barbentane
en Provence, et quel effet elle fit sur M. de Montcalm, c’est ce que je dirai
en la suite de ces mémoires.
    L’accueil du
maestro Giacomi ne fut point tant tumultueux, mais en sa quiète dignité fort
touchant aussi car il s’inquiétait de moi, ayant ouï de Fogacer que la Baronne
des Tourelles, en son fol dépit contre moi, cherchait des spadaccini [57] pour se revancher
que je l’eusse moquée dans ma lettre. Je le quérai tout de gob de croiser
l’épée, désirant me dégourdir de mon voyage et après notre assaut, alors que
nous étions tout sueux et soufflants, Giacomi m’attira dans une embrasure de
fenêtre, et me dit à voix fort basse et l’œil épiant :
    — Mon
frère, oyez-moi bien : j’ai résolu de

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