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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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n’accepterait jamais que l’amiral de Coligny entraînât le
royaume de France dans une guerre contre l’Espagne, ou seulement qu’il aidât
les gueux des Pays-Bas en lutte contre les armées du duc d’Albe.
    Catherine de Médicis souhaitait la réconciliation des
huguenots et des papistes, non qu’elle respectât la religion et les projets de
ces derniers, mais parce qu’elle voulait la paix entre les sujets de son fils
Charles IX. Elle ne visait que ceci : l’intérêt du roi, prête à aller
un jour vers le camp qui semblait le plus utile à son dessein, puis à se
rapprocher de l’autre le jour suivant.
    — Elle a besoin de moi, ajoutait Anne de Buisson. Elle
me montre aux envoyés de Henri de Navarre. Elle leur dit : « Voyez la
belle huguenote que j’ai choisie pour suivante ! Comprenez mon souhait, ma
politique. Je veux un royaume de concorde et d’amour, et c’est pour cela que je
désire que ma fille Marguerite de Valois, fidèle de la juste religion
catholique, épouse Henri, roi protestant de Navarre. »
    Anne de Buisson se tournait et levait la tête vers moi.
    J’aimais son front bombé, la perfection de ses traits qui
semblaient à peine esquissés d’un trait léger, ses yeux au regard d’un bleu
soyeux.
     
    J’avais envie de me pencher, de baiser son cou, puis ses
lèvres.
    Je posais la main sur le dossier du fauteuil, effleurais
ainsi son épaule. La chaleur de son corps me pénétrait peu à peu, me faisait
frissonner.
    Peut-être ressentait-elle la même émotion, le même
désir ?
    Il m’arrivait de le croire, puis je pensais que je n’étais
qu’un vieux barbon du double de son âge, dont elle se fut moquée si je lui
avais proposé, comme j’en avais eu plusieurs fois l’intention, de la prendre
pour femme devant Dieu, de nous retirer dans ma demeure du Castellaras de la
Tour et d’y voir naître notre descendance.
    N’est-ce pas ainsi, en donnant la vie à des enfants
légitimes, qu’on Vous honore le mieux, Seigneur ?
     
    Je m’aventurais parfois à lui dire que le mariage qui
s’annonçait entre Marguerite de Valois et Henri de Navarre, cette grande
affaire dont chacun parlait pour s’en indigner, s’en féliciter ou la craindre
comme un acte dément qui allait libérer les démons, devait être imité dans tout
le royaume. Si de nombreux couples se formaient à l’image du mariage royal,
alors se reconstituerait l’unité des chrétiens, et la paix s’établirait.
    N’était-ce pas ce que voulaient Catherine de Médicis et
Charles IX ?
    Anne de Buisson me fixait longuement, se levait, marchait
jusqu’aux hautes fenêtres qui ouvraient sur le pont Notre-Dame.
    — Chacun croit à sa religion, commençait-elle. Il ne
peut y avoir deux vérités de Dieu.
    Elle connaissait Marguerite de Valois. La fille de Catherine
de Médicis n’était pas femme à renoncer à sa foi. Et elle, Anne de Buisson,
jamais ne renierait la sienne.
    — Et les gentilshommes qui entourent l’amiral de
Coligny, mon frère Robert ou le vôtre, ne sont pas gens à devenir des renégats.
    Elle baissait la tête, faisait la moue, gonflait les lèvres.
    — C’est ainsi. Peut-être faut-il que le sang ruisselle
devant nos portes, dans les rues de nos villes, et que chacun essaie de vaincre
comme dans un tournoi. Dieu choisira.
    J’étais à une extrémité de la lice. Anne de Buisson se
tenait avec les siens en face de moi, à l’autre bout du champ clos.
     
    Ainsi j’ai vite découvert qu’à l’hôtel de Ponthieu ou dans
la maison du pont Notre-Dame on était tout aussi déterminé à voir couler le
sang qu’à l’hôtel d’Espagne.
    En me voyant aux côtés de sa sœur, chez elle, Robert de
Buisson m’avait d’abord ouvert les bras, et nous nous étions donné l’accolade
d’un même élan. Puis, me tenant par les épaules, bras tendus, il m’avait tenu à
distance.
    — Êtes-vous toujours Espagnol ? Êtes-vous de cette
bande d’assassins qui se réunit à l’hôtel d’Espagne et qui ne rêve que de nous
occire ?
    Mon silence valait réponse et Robert avait retiré ses mains,
reculé de plusieurs pas.
    — Vous êtes donc dans le camp de ce Diego de Sarmiento,
avec Enguerrand de Mons ? Celui-ci a perdu toute mesure. Il n’est plus
l’homme que j’ai connu à Malte. Il veut nous égorger comme s’il désirait nous
sacrifier, faute de pouvoir tuer tous les infidèles et arracher sa sœur à leurs
griffes ! Ce n’est plus un sujet du roi de

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