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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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celui-ci allait se rompre entièrement, se disloquer et s’abîmer dans l’eau profonde. Mais, quand le bruit se fut affaibli, la tête du pont qui se trouvait fichée en terre se retourna d’elle-même, se détacha et, gagnant l’autre rive, s’y posa. Ébloui par ce prodige, Briol de la Forêt Brûlée vit Perceval aborder en face, sur sa mule blanche, et toujours suivi de son cheval qu’il menait par la bride. « Perceval ! lui cria-t-il, tu es vraiment le meilleur chevalier qui soit au monde, le plus hardi et le plus fier, le plus digne d’aller à la cour du Roi Pêcheur ! »
    Sur l’autre berge, Perceval fit un grand geste pour le saluer puis, sans perdre de temps, il s’éloigna, au gré de la mule qui se dirigeait d’elle-même (38) .

11

La Fille de Merlin
    De chemin en chemin, Perceval se retrouva bientôt sur une voie plus large qui s’écartait de la rivière. La mule allait, de son trot allègre, sans que le Gallois fît quoi que ce fût pour la diriger. Soudain, il aperçut, au pied d’un arbre, une grande croix dressée et une tombe de marbre. Il fit halte, regarda la croix et la tombe, puis il descendit de la mule, s’approcha, et il s’inclinait quand il entendit une voix qui surgissait de sous la dalle : « Seigneur, pour l’amour de Dieu, ne sortirai-je jamais d’ici ? »
    Stupéfait, Perceval demanda : « Ami, qui es-tu, toi qui demandes de l’aide ? et pourquoi gis-tu sous cette pierre ? – Seigneur, je suis un chevalier captif, le plus malheureux de tous les hommes ! – Ami, reprit Perceval, de plus en plus étonné, dis-moi comment m’y prendre pour t’aider et pour soulever cette pierre afin de te tirer de là. – Seigneur, puisque tu veux m’aider, il te suffira de couper une branche du grand arbre qui nous surplombe, d’en faire un levier et de soulever la dalle de marbre. Voilà la seule façon de me secourir. »
    Perceval se hâta de s’exécuter. Il coupa une branche de l’arbre, qui était un chêne puissant, et il souleva la lourde dalle de marbre, la maintenant d’une main ferme le temps que le chevalier mit pour sortir. Très beau de visage et de corps, celui-ci ne paraissait pas avoir trop souffert de son emprisonnement. « Ami, dit Perceval ; il faudrait maintenant que tu m’aides à replacer cette dalle exactement où elle était, de sorte que personne ne puisse tomber dans la fosse. – C’est juste », dit le chevalier, saisissant la branche qui servait de levier pendant que Perceval ajustait la dalle. Mais, ce faisant, l’homme bouscula si fort et si bien Perceval qu’il le précipita dans la tombe. Puis il laissa retomber la dalle de telle sorte que, tout alentour, la terre trembla sous le poids de la lourde pierre. Et le chevalier s’écria : « Seigneur, il te convient maintenant de garder ce lieu comme je l’ai fait si longtemps. C’est la règle, et je l’avais subie moi-même : après que j’eus, comme toi, aidé un chevalier à sortir, celui-ci m’y poussa. Je souhaite ardemment que quelqu’un d’autre vienne te tirer de là, sans quoi tu mourras, m’est avis ! »
    Le chevalier se dirigea vers la mule et, sans plus tarder, l’enfourcha, car il avait grande envie de s’en aller. Mais la mule demeura aussi immobile que si elle eût été rivée au sol. Et il eut beau la frapper, elle ne broncha pas et ne bougea pas de sa place. En voyant cela, le chevalier fut saisi de colère et de dépit, car il ne savait que dire ni que faire. Puis il se décida, descendit de la mule et s’approcha du cheval. Il débarrassa la selle de la tête du cerf qui s’y trouvait toujours attachée et enfourcha le destrier sans même s’occuper du bouclier, de la lance, du trophée ni du brachet : il n’avait qu’une idée en tête, partir au plus vite. Mais le cheval ne bougea pas plus que la mule, et le chevalier eut beau s’acharner contre lui, il eut beau l’éperonner, le battre, il ne parvint à le faire avancer d’un pouce ni par force ni par pouvoir. « Voilà une belle diablerie ! s’écria-t-il. Par saint Pierre, il faut que ce cheval et cette mule soient ensorcelés pour refuser ainsi de bouger ! Je le vois trop, ce n’est pas encore cette fois-ci que je pourrai m’en aller ! »
    Plein d’amertume, il revint vers la tombe, reprit la branche qui servait de levier et souleva la dalle, comme Perceval avait fait plus tôt. « Seigneur, dit-il, sors de là rapidement. Ce serait dérision si je te causais du

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