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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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demeure du Roi Pêcheur et n’ai posé aucune question au sujet de la coupe d’émeraude et de la Lance qui saigne ! J’ai quitté ma mère en l’abandonnant à l’entrée du pont sans m’inquiéter de savoir si elle était morte ou vivante ! J’ai partagé les nuits de femmes à qui j’ai déclaré que je les aimais plus qu’aucune autre au monde ! J’ai désiré ardemment Blodeuwen et je l’ai obtenue ! J’ai désiré ardemment Angharad à la main d’or et je l’ai obtenue ! J’ai désiré ardemment l’Impératrice et je l’ai obtenue ! Et, chaque fois que je me suis trouvé en présence d’une fille belle, je l’ai désirée. Suis-je donc, comme Énéour le preux, amoureux de toutes les femmes que je rencontre ? Les aimé-je toutes d’un pareil amour ? Certes, ma mère ne m’avait pas préparé à de telles épreuves, et je dois reconnaître que je ne suis qu’un enfant perdu dans un monde qu’il ne comprend pas… »
    Alors, tandis que le soleil déclinait à l’horizon, Perceval éperonna son cheval. Il avait décidé de rejoindre la cour du roi Arthur (32) .

7

Le Clos du Nuage
    Arthur se trouvait à Kaerlion sur Wysg, l’une de ses résidences préférées. À côté de lui, étaient assis sur un grand manteau de laine broché d’or, au milieu de la salle, quatre hommes : Yvain, fils du roi Uryen de Gorre, Kaï, le sénéchal, frère de lait du roi, Érec, fils du roi Erbin, et Perceval, fils d’Evrawc. Tous les autres compagnons de la Table Ronde étaient partis en de lointaines expéditions. On n’avait aucune nouvelle de Gauvain, fils du roi Loth d’Orcanie, ni de son frère Agravain l’Orgueilleux. On ne savait où se trouvaient ni Lancelot du Lac, fils du roi Ban de Benoïc, ni ses cousins Lionel et Bohort, fils du roi de Gaunes, pas plus que Bedwyr ou Sagremor que le roi aimait beaucoup. Arthur donc se trouvait en compagnie des quatre précédents, et il devisait avec eux.
    Tout à coup entra une jeune fille aux cheveux noirs frisés qui, montée sur un mulet jaune, faisait avancer celui-ci en le fouettant avec des lanières grossières. Sa physionomie était rude et désagréable, son visage et ses deux mains plus noirs que le fer le plus noir trempé dans la poix. Et son teint n’était pas encore ce qu’elle avait de plus laid. Hideux étaient ses traits, ainsi que la forme de son corps. Elle avait en effet les joues tombantes, le bas du visage allongé, un nez petit avec des narines distendues, un œil gris-vert, étincelant, et l’autre noir comme le jais, enfoncé profondément dans la tête, les dents longues, abîmées, plus jaunes que fleur du genêt. Son ventre se relevait jusqu’au menton. Son échine avait la forme d’une crosse. Ses cuisses étaient larges mais décharnées et, au-dessous, tout était grêle, à l’exception des pieds et des genoux qu’elle avait noueux et massifs.
    Elle salua Arthur et ceux qui se trouvaient là, sauf Perceval. Celui-ci, elle l’interpella en termes irrités et désagréables. « Perceval ! lui dit-elle, je ne te salue pas, car tu ne le mérites pas ! La destinée était aveugle quand elle t’accorda talents et gloire ! Tu es allé à la cour du roi boiteux, tu y as vu un jeune homme portant une lance au bout de laquelle perlaient trois gouttes de sang qui se changeaient en un torrent ruisselant sur le poing du valet. Tu as vu encore beaucoup d’autres prodiges, et tu n’en as demandé ni la signification ni la cause ! Si tu l’avais fait, le roi blessé aurait obtenu la guérison pour lui, la paix pour ses domaines, tandis que désormais on n’y verra que combats et guerres, chevaliers tués par traîtrise, femmes laissées veuves sans aucun secours, dames sans moyens de subsistance. Et tout cela par ta faute ! »
    Perceval baissa la tête, car il savait bien que la hideuse jeune fille disait vrai. Quoiqu’il n’eût soufflé mot, la jeune fille s’emporta : « Perceval le Maudit ! tel sera ton nom désormais, puisque tu t’es montré incapable de découvrir ce qui était à ta portée ! Et nous en souffrirons tous longtemps encore, le temps que survienne le Bon Chevalier. C’est lui qui achèvera les aventures, Perceval, alors qu’il t’appartenait de le faire dans la gloire et le bonheur ! Sans doute est-ce le péché que tu portes en toi, depuis la mort de ta mère, qui t’a empêché de mener à bien la mission que le Ciel t’avait confiée. Voilà, Perceval, j’ai transmis mon

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