Qui étaient nos ancêtres ?
Salvetat ou des Sauvement… On imagine mal, enfin, le nombre de toponymes dérivés de l’ancien manse, principale unité d’exploitation de l’univers féodal. Non seulement, on trouve les Meix, May et certains Metz du Nord, les Mas du Sud, les Magny, Ménils (fréquents en Normandie, et à l’origine de Ménilmontant), sans oublier pour autant que c’est encore directement à lui que nous devons notre moderne et si banale maison.
Mais ces siècles restent durs. La nature est hostile. Les loups terrorisent les populations, brigands et pillards – essentiellement des mercenaires –, sèment à tout moment la panique. Le paysage s’est donc très vite doté d’un système défensif. Les anciennes villae se sont entourées de palissades et de tours de bois, se transformant en forteresses auxquelles on donnait le nom germanique de burg, très voisin de berg , désignant la montagne. Et ces burgs, où les marchands itinérants faisaient volontiers étape, faute d’auberges, où les paysans venaient se « retraire » avec leurs animaux en cas d’attaque, ont très tôt vu se développer – d’abord dans leurs enceintes, désormais construites en pierres, puis à leurs abords – des habitations qui formèrent ces « bourgs », où résidaient des burgenses , ancêtres de nos bourgeois.
Mais alors que ces bourgs grandissent et se multiplient, on va bientôt assister à la création de nouvelles agglomérations.
Entre les XI e et XIII e siècle, le pays connaîtra une formidable croissance. Favorisée par la paix relative précisément rendue possible et étayée par la propagation de ces burgs et châteaux, cette croissance se fera sentir tant au plan démographique (elle sera ainsi la cause du dégagement de nos noms de famille) qu’au plan économique.
La naissance de nos noms de famille
Nos ancêtres des temps mérovingiens et carolingiens, – comme, d’ailleurs, les Gaulois et les Francs – portaient tous un nom unique, disons un nom de baptême, soit l’équivalent de notre actuel prénom. Ce nom n’était donc pas fixe et aucun élément de l’identité ne se maintenait d’une génération à l’autre. Dans les univers très étroits dans lesquels ils vivaient – petites agglomérations de quelques feux – ce système fonctionnait cependant parfaitement.
Tout changea au lendemain de l’an mille, avec un grand boom démographique et des agglomérations toujours plus peuplées, qui en vinrent bientôt à compter chacune plusieurs Jean, plusieurs Jacques, plusieurs Guillaume ou plusieurs Hugues, que l’on avait de plus en plus de mal à distinguer les uns des autres.
Sans qu’aucune loi intervînt, on prit donc l’habitude de résoudre ces homonymes en utilisant des surnoms. De trois Hugues, on fit Hugues Charpentier, ainsi nommé parce qu’il exerçait ce métier, Hugues Legrand, parce qu’il était de haute taille, et Hugues Martin, ellipse de Hugues « de » Martin, du fait que son père était ainsi nommé.
Ces surnoms, encore ni fixes ni héréditaires, liés tantôt au physique, au caractère ou à la personnalité, au métier, aux origines ou encore à quelque mésaventure parfois cocasse (comme Percepuce, Réveilchien, Aimelafille ou Croquevieille), se sont dégagés dans la France des XI e et XII e siècles, et d’abord, bien sûr, en milieu urbain, là où les homonymies étaient les plus fréquentes, sans prendre pour autant un caractère définitif. Le Champenois Jean dit « Pâtissier » pouvait, en quittant sa région, devenir Jean dit « Dereims », Jean dit « Champenois » ou tout simplement Jean dit « Nouveau » (au sens de nouveau venu). Hugues dit « Levaillant » pouvait avoir pour fils Thibaud dit « Hugues » ou « Hugon » (fils de Hugues), ou Thibaud dit « Barbier », s’il avait appris ce métier. Peu à peu aussi, les habitants des fermes et des hameaux dans les régions d’habitat dispersé furent désignés par la simple indication du nom de leur ferme, ainsi Mathieu dit « de Grosbois ».
Rapidement – aux environs du XIII e siècle –, tous ces surnoms devinrent héréditaires, et se maintinrent tant bien que mal jusqu’à nous, qui les portons donc aujourd’hui comme noms de famille, souvent il est vrai quelque peu altérés au fil du temps, puisque, nés du langage oral, ces noms n’ont guère reçu d’orthographe avant la fin du XIX e siècle ou le début du XX e . Levaillant put ainsi devenir
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