Qui étaient nos ancêtres ?
Vaillant, Barbier Barbey, comme « de Vaussanvin » Vaussanvin, ou même, Voissanvin et Boissanvin…
Les seigneurs de nos châteaux, se muant en entrepreneurs, emboîtent le pas aux religieux pour lancer de vastes opérations d’essartages, défrichements aboutissant à la création de nouveaux centres de peuplement que l’on a généralement nommés Villeneuve, Neuville ou Bourgneuf, agglomérations parfois fortifiées et désignées, dans les régions du Sud, sous le nom de « bastides ». Ils créent aussi des « villes franches », où ils ont soin d’attirer des paysans qui se chargeront de défricher de vastes étendues de terres, tout en bénéficiant de diverses garanties.
Toutes ces agglomérations connaîtront au fil des siècles des destinées diverses, variant selon la force du château qui les protège, la puissance de son seigneur et de sa famille, la richesse et l’importance de l’administration qu’il y développe, ou selon celles de l’église et de la paroisse qui s’y est implantée. La dynamique féodale a en effet amené entre leurs murs différents agents travaillant soit pour le seigneur-châtalain – qui est notamment chargé de rendre la justice – soit, peu à peu, pour le compte de l’administration royale. Voici le prévôt ou le viguier, qui, à l’origine, assiste le seigneur, et le gruyer, surveillant les bois et les étangs. Voici tout un petit monde judiciaire : juges, capitaines-châtelains, procureurs fiscaux, huissiers, avocats, rapidement grossi de tabellions et de notaires. Voici des fonctionnaires royaux, avec le bailli (dans le cas où l’agglomération devient le chef-lieu d’un bailliage) et ses représentants, les « lieutenants », « tenant lieu » de bailli lorsque celui-ci est absent. Voici encore le grenetier, chargé du grenier à sel, le service chargé de veiller à la distribution et à la taxation du sel, les officiers des Eaux et Forêts. Et puis les gens d’Église : prêtres, curés, sacristains, marguilliers, bedeaux… Avec le développement de l’artisanat s’installent tanneurs, taillandiers (fabricant les outils), tonneliers, drapiers, tailleurs d’habits (par opposition aux tailleurs de pierre), cordonniers, serruriers, puis chirurgiens, apothicaires, sans oublier les ciriers qui fabriquent ces cierges dont l’Église fait alors si grande consommation…
Voici enfin que se développent les commerces, avec les épiciers, les cabaretiers et les taverniers, parfois aussi les maîtres de postes, ancêtres de nos entrepreneurs de voyages. À maints égards, ces agglomérations ne cessent de s’affirmer comme dominant le « plat pays ».
Foires et « châteaux gaillards » :
des villes déjà bruyantes et polluées…
Mais si la ville ancienne produit longtemps entre ou sous ses murs, dans ses jardins et ses « courts », la plus grande partie des denrées alimentaires dont ses habitants ont besoin, elle n’en constitue pas moins un centre où viennent s’écouler les produits des campagnes voisines. En sens inverse, elle est le lieu où les ruraux peuvent s’approvisionner en articles manufacturés. Dès lors, ses foires et ses marchés sont à l’échelle de son importance et participent à son influence. Il n’est quasiment pas de bourg ni de bourgade qui n’ait eu autrefois son ou ses jours de foire, une ou plusieurs fois l’an, et c’est par elles que s’établit le contact entre ces deux univers au demeurant nettement séparés qu’étaient la ville et la campagne.
En effet, rares sont les gens des villes et des bourgs qui fréquentent les campagnes : quelques artisans qui vont s’y approvisionner en matières premières, comme le tanneur allant y acheter ses peaux ; quelques commerçants allant y vendre leurs produits et les taillandiers leurs outils ; le notaire pour y recevoir les actes de ses pratiques, et quelques bourgeois, ayant acheté des terres et qui vont visiter leurs fermiers. Au XVIII e siècle, quelques notables prendront l’habitude d’y mettre leurs enfants en nourrice, pour les faire profiter du bon air et du bon lait crémeux des paysannes.
En sens inverse, hormis quelques marchands et maquignons fréquentant les foires, les notaires ou les curés des villages que leurs affaires y conduisent, l’immense majorité des hommes des campagnes ne franchit jamais les portes des villes, et moins encore les femmes, excepté celles en situation de détresse qui iront y abandonner
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