Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
Vom Netzwerk:
les deux
    garçons se tiennent debout. Ce sont deux jeunes cultivateurs des environs de
    Malestroit. Ils sont blêmes.
    Herre parle. Il cherche
    à donner à ses propos un ton paternel, le timbre de sa voix n’en est que plus
    grinçant. Malgré un accent prononcé, il s’exprime dans un français pur.
    « Voyons, dit-il, je
    ne vois sur cette fiche que votre prénom. Lequel de vous est René ?
    — C’est moi, annonce
    péniblement le plus jeune.
    — Parfait. Donc, Henri
    c’est l’autre. Je ne tiens pas à vous embêter avec des questions secondaires. Vos
    noms ne m’intéressent pas. Par contre ce que vous allez m’expliquer en détail, ce
    sont les conditions dans lesquelles vous avez reçu ces armes. »
    Il joue avec une
    mitraillette de laquelle il extrait le chargeur, passe son petit doigt dans l’intérieur
    de la cavité cubique, constate la pureté de l’huile, puis, pensif, de la main
    gauche à l’aide du pouce, extrait les balles du chargeur, une à une, avec une
    dextérité de professionnel.
    « Des armes toutes
    neuves, ajoute-t-il, songeur. Quelqu’un vous les a données, elles ne sont pas
    tombées du ciel ! »
    Il rit de sa
    plaisanterie.
    « N’est-ce pas ? »
    Henri, l’aîné, répète
    sans conviction sa version des faits
    « On venait de les
    trouver sur le bord du chemin. On s’était à peine rendu compte que c’était des
    armes quand vos soldats nous sont tombés dessus. Sans eux, on les aurait
    portées à la Kommandantur. »
    Herre grimace un sourire.
    « Dans ce cas, il
    nous reste à vous féliciter. Je crois même qu’une récompense est prévue pour
    les bons Français qui nous aident. »
    Zeller s’approche des
    deux hommes et dit calmement :
    « Déshabillez-vous.
    — On a déjà été
    fouillés, réplique René.
    — Déshabillez-vous !
    À poil comme pour la visite du service. »
    Avec des gestes lents
    les hommes s’exécutent. Ils conservent leurs slips et leurs chaussettes.
    « Il a dit : à
    poil ! » hurle Gross en distribuant deux gifles.
    Gênés, honteux, les
    paysans retirent leurs slips et leurs chaussettes.
    Gross fait un tas de
    leurs vêtements, le jette dans un coin de la pièce.
    « Maintenant
    reprenons, déclare posément Herre. D’où tenez-vous ces armes ?
    — On vous a dit la
    vérité, monsieur », balbutie René.
    Le capitaine Herre se
    lève. Son ton change, sa voix siffle :
    « Vous croyez que
    vous allez vous foutre de ma gueule longtemps ? Vous allez me répondre, je
    vous le garantis. »
    Zeller l’interrompt d’un
    geste :
    « Allons, les gars,
    un peu de courage. Je suis français comme vous. Vous vous êtes trompés de camp,
    il est temps de reconnaître vos erreurs. On tiendra compte de votre bonne
    volonté à votre procès : tout dépend du rapport que nous faisons. Parlez, c’est
    notre intérêt à tous. »
    Il s’est approché d’Henri
    qui lui crache au visage.
    Zeller recule, sort de
    sa poche un mouchoir de soie immaculée et s’essuie ; il est livide. Par
    contre l’incident semble avoir rendu sa bonne humeur à Herre qui sourit. Il
    fait un signe à Gross et Munoz. Les deux voyous sortent de la pièce.
    « Nous allons vous
    faire parler, annonce le capitaine, je déplore ces méthodes, mais vous m’y
    contraignez. »
    Les deux hommes
    reviennent porteurs d’un seau d’eau. À l’aide d’une fine cordelette, ils
    entravent les chevilles, les poignets des prisonniers derrière leur dos, et l’infamie
    commence.
    L’un après l’autre, on
    les fait tomber à genoux près du seau dans lequel leur tête est maintenue jusqu’à
    la suffocation, et cela à quatre ou cinq reprises. Entre chaque immersion, ils
    ont tout juste le temps d’absorber une bouffée d’air. Lorsque l’un d’eux est au
    bord de l’évanouissement, suffocant, hoquetant, vomissant, il est jeté sur le
    côté ; l’eau glacée est répandue sur son corps nu. Alors les bourreaux
    retournent remplir le seau et passent à l’autre.
    Les deux martyrs
    tiennent dix heures. À plusieurs reprises leur mutisme de Bretons têtus a
    exaspéré leurs tortionnaires qui les ont frappés sauvagement. Ils ont le visage
    en sang, des dents cassées, les arcades éclatées, les yeux tuméfiés. Ils
    grelottent.
    À 4 heures, René, le
    plus jeune, craque. Il est dans un état second, il parle. Contre la liberté de
    ses membres, une couverture et un bol de vin chaud, il débite tout ce qu’il
    sait entre deux hoquets : le camp de Saint-Marcel,

Weitere Kostenlose Bücher