Raimond le Cathare
vivres et de réserves d’eau.
Montfort a fait appel au meilleur
ingénieur, frère Guillaume, chapelain de Paris, un homme passionné par les
machines de siège. Malgré toute sa science, il a le plus grand mal à les
asseoir sur les pentes. Les blocs qu’elles projettent reviennent souvent en
avalanches de pierres sur les assiégeants. Chaque jour, des Croisés plient
bagage lorsque leur quarantaine est accomplie. Sans se soucier du siège
infructueux, ils redescendent dans la plaine pour prendre la route du retour.
Les troupes qui repartent ou celles qui montent pour les relever sont exposées
aux embuscades des hommes de Pierre Roger de Cabaret. Le chemin est périlleux,
longeant des ravins insondables, par des sentiers étroits et escarpés,
surplombés par des rochers en équilibre au-dessus du vide. Les hommes du pays
guident les chevaliers faidits qui harcèlent les groupes de Croisés, les
précipitent dans un gouffre ou les capturent pour leur infliger des mutilations
atroces. Montfort perd plus de soldats dans l’acheminement des troupes que dans
les opérations du siège.
En bas, à Carcassonne, Guillaume de
Contres, à qui l’usurpateur a confié le soin de garder la cité, a toutes les
peines du monde pour mettre en route les renforts. Les hommes sont effrayés à
l’idée de s’engager dans cette escalade infernale où la mort les guette
derrière chaque rocher.
En haut, Montfort ne veut pas lâcher
prise. Pour faire honte aux barons qui envisagent de l’abandonner, il appelle à
ses côtés sa femme Alix, dont l’exemple ne suffira pas à retenir Robert de
Dreux, le comte de Ponthieu ou l’évêque de Beauvais. Seuls l’évêque de Chartres
et le fidèle Guy de Lévis demeurent avec Montfort Celui-ci espère que la soif
va faire une nouvelle fois son œuvre, comme à Carcassonne ou à Minerve.
Les semaines passent… Cette année,
l’automne est aussi chaud et sec que l’été. Les citernes du château sont
épuisées. Raimond de Termes avait pourtant prévu d’abondantes provisions afin
de ne pas être pas au même piège que Trencavel l’an dernier ou Guillaume de
Minerve en juillet. Mais aurait-il pu imaginer qu’il ne pleuvrait pas avant
novembre ?
Un soir, il décide d’en finir. Il
envoie une ambassade annoncer à Simon de Montfort qu’il est prêt à discuter dès
le lendemain des conditions de la reddition.
Et soudain, dans la nuit, le ciel se
crève pour déverser un déluge providentiel et interminable. Les citernes se
remplissent Raimond de Termes ne capitule plus. Coiffé de son casque d’or, il
vient narguer les Croisés du haut des remparts battus par les vents et la
pluie.
Le froid s’installe et la pluie
devient neige. L’eau ne manque plus aux assiégés, mais le pain manque aux
assiégeants coupés de Carcassonne, car les intempéries rendent le site
inaccessible. Une maigre troupe démoralisée entoure Montfort et Alix, dont la
situation est désespérée.
À Toulouse, nous sommes informés
jour après jour. Nous espérons déjà la mort du chef de la croisade, enseveli
sous les neiges des Pyrénées…
Une nuit, les guetteurs du camp
croisé sont alertés par un remue-ménage autour du rempart de Termes. Ils
donnent l’alarme et se jettent sur les défenseurs qui tentaient de fuir à
travers les montagnes, à la faveur de l’obscurité. Les soldats n’ont plus la
force de se battre. Ils sont tués sur place. Raimond de Termes, qui se trouve
au milieu d’eux, est capturé.
Pendant la sécheresse, des animaux
épuisés sont tombés au fond des citernes. Après les pluies leurs charognes
avaient empoisonné l’eau et tous les assiégés étaient frappés de flux de
ventre. La garnison épuisée avait alors tenté de s’échapper avec le maître des
lieux.
Montfort l’envoie aussitôt finir ses
jours aux fers dans les cachots de Carcassonne.
La défection de Pierre
Narbonne, janvier 1211
Afin de mettre en application nos
discussions de l’automne dernier, je suis entré en relation directe avec ceux
qui nous tourmentent.
J’ai dû pour cela attendre que Simon
de Montfort se dégrise. Ivre de ses victoires contre les citadelles de Minerve
et de Termes, il a chevauché longtemps encore avant de mettre pied à terre. Il
n’a posé les armes qu’à Noël, après avoir reconquis toutes les villes et tous
les châteaux qui s’étaient rebellés l’an dernier.
Au début de l’année 1211, nous voici
donc à Narbonne, réunis par
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