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Raimond le Cathare

Raimond le Cathare

Titel: Raimond le Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Baudis
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d’obtenir le duché de Narbonne.
    — Mon doux seigneur, tu as
raison. Juge selon ton cœur, gouverne sans crainte. Nul ne te fera dévier de ta
route.
    — La cause est entendue,
tranche le pape. Le comte est bon chrétien. Pourquoi donnerions-nous son pays à
Montfort ? Je suis surpris de votre acharnement. Que de rage dans vos
diatribes !
    Les évêques refusent de céder.
    — Montfort protège la Croix. Il
fauche la mauvaise herbe.
    — Il massacre en aveugle, pêle-mêle,
chrétiens et hérétiques ! s’indigne le pape. Tous les mois, je reçois des
plaintes. Je crains fort que Simon ne rabaisse la foi et n’aggrave les maux.
    Comme un essaim, les prélats
tournent autour de lui.
    — Pape, que dis-tu là ?
    — Il chasse du pays les
démoniaques. Il rend leur juste place aux catholiques. Que te faut-il de
plus ?
    — Il a fait tant et tant pour
la gloire de Dieu…
    Face à Innocent III vacillant,
Foulques proclame l’insubordination.
    — Nous défendrons sa cause
contre qui osera lui disputer ses biens.
    Une clameur d’approbation s’élève de
la foule des clercs, massés dans le jardin. Le pape, à bout de forces, rend les
armes. Vaincu par son Église, la tête basse, il renonce à rétablir nos droits.
Il consacre ceux de Montfort.
    — Il me faut donc céder. Qu’il
règne, s’il le peut, sur le pays conquis. L’archevêque d’York, représentant
personnel de Jean Sans Terre, demande alors la parole.
    — Je crains fort que Simon
n’installe son pouvoir sur des sables mouvants. Raimond le Jeune, s’il perd le
comté de Toulouse, conserve les biens et les terres de sa mère, Jeanne
d’Angleterre. J’ai le parchemin du contrat de mariage.
    Le pape approuve et ajoute :
    — Moi-même, je donnerai à ce
jeune seigneur le Venaissin et le marquisat de Provence. Je ne peux faire plus.
Tu vois, tous les cardinaux sont ligués contre moi. Ici, le neveu de ton roi
n’a pas d’amis. Il me faut donc brider l’affection que j’éprouve.
    Innocent traverse le jardin pour se
retirer dans ses appartements. À la foule des prélats qui s’écartent pour lui
ouvrir un passage, il lance :
    — Laissons aller la vie !
Si Raimond le Jeune a du cœur au ventre il forcera le destin. S’il honore le
Christ, Dieu lui rendra bientôt son comté toulousain.
     
    *
* *
     
    Nous avons demandé une audience
pontificale. Innocent III nous reçoit au terme de cette journée où s’est
décidé notre sort Après m’être incliné, je laisse parler mon amertume.
    — Me voilà dépouillé jusqu’à
l’os. J’ai obéi à tes commandements. Ils ont fait mon malheur. Imagine :
moi, comte de Toulouse, chassé de mes villes perdues, vagabond loqueteux sur
les routes du monde, disputant ma pitance aux chiens, espérant des passants un
sou dans ma main creuse. As-tu voulu cela ? Est-ce là ton pardon ?
J’ai eu confiance en toi : quelle folie ! En qui croire à
présent ? Comment vivre ? Où aller ? Et mon fils ? Il est
pur, tu le sais. Pourtant tu le dépouilles. Tu es dépositaire ici-bas de la
pitié divine et de l’honneur des hommes. L’oublies-tu ? Aide-moi. Tu le
dois. Sinon, crains pour ton âme !
    Épuisé, Innocent soupire et gémit
sans cesse. Son souffle est court et ses phrases brèves.
    — Courage. Laisse-moi
réfléchir. Justice sera faite. S’il te fut pris à tort, je te tendrai ton bien.
Confiance. À qui perd un denier, Dieu peut en donner cent. Si Dieu me prête vie
et permet que je règne selon mon cœur, tes droits te seront bientôt rendus.
Quant aux prélats félons qui m’ont forcé la main, ils ne tarderont pas à le
payer.
    Pour avoir été témoin, quelques
heures plus tôt ; du complot des ecclésiastiques et de leur acharnement je
ne doute pas de la sincérité d’Innocent. Mais que reste-t-il de son
autorité ?
    Afin de nous redonner confiance, il
rend à Raimond Roger de Foix ses terres et son château, et il me demande de
laisser Raimond le Jeune à Rome.
    — Confie-le à ma garde, le temps
que je lui trouve une terre à sa taille.
     
    *
* *
     
    Je laisse donc mon fils au
Saint-Siège et je quitte la ville avec Raimond Roger de Foix. À Viterbe, je
retrouve Éléonore et Sancie. Ensemble, nous célébrons tristement Noël.
    Au premier jour de l’an 1216, je
suis à Venise pour me recueillir sur le tombeau de l’évangéliste saint Marc.
Malgré l’injuste décision du concile, je lutte pour ne pas perdre la foi. Je
prie pour ne pas

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