Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Raimond le Cathare

Raimond le Cathare

Titel: Raimond le Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Baudis
Vom Netzwerk:
pour le combat, les
coudes détachés du corps, il se dresse de toute sa stature couronnée d’une
chevelure flamboyante.
    — Sire pape, seigneur
incontesté du monde, écoute mes paroles !
    Après un murmure de curiosité, le
silence se fait. Raimond de Foix s’avance à pas lents vers le Saint-Père.
    — Je le dis hautement : je
n’ai pas d’affection pour les mauvais croyants. Jamais, au grand jamais, ils ne
m’ont sali l’âme. Je fus toujours fidèle à notre sainte Église. Je veux donc
espérer un jugement loyal, pour moi, pour mon seigneur Raimond et pour son
fils.
    Je reconnais les phrases cent fois
hurlées dans le vent face aux vagues par Raimond Roger de Foix, les deux bras
agrippés à la proue du navire qui nous conduisait vers Rome. Ces répétitions
lui donnent l’aplomb d’affirmer devant toute l’Église que l’Hérésie lui est
étrangère. Il s’avance vers Raimond le Jeune et prend le pape à témoin.
    — Vois son air et conviens
qu’il n’est en rien coupable. Il n’a jamais trompé personne en ce bas monde.
Que lui reproche-t-on ? Quel péché ? Quel méfait ? Pourquoi donc
le priver de sa terre ancestrale ? Quel homme de bon sens peut accepter
cela ?
    Innocent III fait un mouvement
de tête qui semble un encouragement à poursuivre. C’est maintenant vers moi que
se tourne le comte de Poix :
    — Quant au comte, pourquoi vous
a-t-il remis Toulouse, Montauban, Provence ? Pour la paix. Or que lui
est-il advenu ?
    Face à l’assemblée, empoignant des
deux mains sa ceinture de cuir, Raimond Roger tonne :
    — Ses fiefs furent livrés à
Simon de Montfort ! Ce barbare sème partout mort et tourment. Il pille,
opprime, tue, dévaste, anéantit impitoyablement toute vie où il passe…
    Frappant de ses deux poings sa
poitrine ornée du grand crucifix, le comte fait à nouveau face au Saint-Père.
    — Et moi aussi, seigneur, j’ai
eu confiance en toi. Tu m’as demandé Foix, mon château, tu l’as eu. Il est si
fort et fier que sa seule apparence décourage l’assaut. Mais je t’en ai fait
don avec son pain, son vin, ses viandes, ses blés mûrs et sa source d’eau pure,
et mes bons compagnons aux luisantes armures. Aucune armée au monde n’aurait pu
prendre Foix contre ma volonté. Le légat m’est témoin.
    Il se tourne vers Pierre de
Bénévent. D’un regard, le légat sollicite du pape le droit de prendre la
parole. Innocent III l’y invite. Pierre de Bénévent se lève :
    — Le comte a parlé vrai. Il m’a
remis son fief, un château riche et puissant c’est la vérité. Le comte a obéi,
Sire pape, au bon vouloir divin.
    Innocent III approuve. Assis
face à moi, au premier rang de l’autre côté de l’allée centrale, Foulques
bouillonne. Depuis que Raimond Roger s’est emparé de l’attention de
l’auditoire, il s’agite sur son siège, se tourne vers les évêques de nos
contrées pour tenter de susciter une protestation. Sentant le vent tourner, il
bondit.
    — Que vous a dit le
comte ? Qu’il ne s’est de sa vie, approché de l’Hérésie ? Mais c’est
dans son jardin qu’est née la mauvaise herbe !
    Pointant son doigt vers Raimond
Roger, toujours debout au milieu de la nef :
    — L’a-t-il fauchée ? Que
non : il prit tant soin d’elle qu’elle a proliféré jusqu’à farcir ses
terres ! C’est avec son accord que fut fortifié le pic de Montségur,
refuge d’hérétiques.
    — Le pic de Montségur ?
hurle Raimond Roger. Je n’ai sur ce château aucun droit ni pouvoir ! Il ne
m’appartient pas.
    Tels deux gladiateurs, les deux
hommes se font face au milieu de l’arène. On ne peut imaginer êtres plus
dissemblables. Raimond Roger est un guerrier, un vétéran. Sa stature impose le
respect. Sa démarche est pesante, comme si son corps était toujours chargé de
pièces d’armure et de cotte de mailles. Foulques, lui, est en mouvement
permanent. Rond, il a le geste vif et le propos aigu. Dès qu’il ne se surveille
plus, les artifices de l’ancien troubadour percent sous ses manières d’évêque.
Il relance ses accusations :
    — Hérétique ? Sa sœur le
fut. Elle vint à Pamiers y prêcher sans pudeur sa diabolique doctrine.
    — Ma sœur ? s’apitoie
Raimond Roger, le mal l’a prise. Elle fut pécheresse. Elle est certes coupable.
    Ainsi que je l’avais vu faire sur le
bateau, il tend ses mains jointes vers le pape :
    — Elle ! Pas moi,
Seigneur ! Mais avait-elle le droit de vivre

Weitere Kostenlose Bücher