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Remède pour un charlatan

Remède pour un charlatan

Titel: Remède pour un charlatan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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éblouis des clients puissent les distinguer. Entre la surprise de l’éclair et la quasi-nudité des danseuses, le public était réduit à un silence hébété.
    Les trois filles du centre se mirent à onduler au rythme du tambour avant d’entamer une danse complexe mais aguicheuse. C’est alors que l’une d’elles trébucha et qu’un éclat de rire fusa parmi les hommes. L’illusion était momentanément réduite à néant. Les danseuses se lancèrent des regards paniqués, puis une des filles agenouillées se mit à chanter d’une voix pleine de mélancolie.
    — Les adorables esprits que j’ai conjurés ne peuvent être arrachés à leur cercle protecteur sans pièces d’or, ou d’argent, ou de quelque autre métal, dit le mage d’une voix puissante.
    Maladroitement, mais avec un rire bon enfant, les hommes fouillèrent dans leurs tuniques, en sortirent leurs bourses et déposèrent quelques pièces sur le sol.
    Le balafré se jeta sur Yusuf.
    — Ramasse l’argent, murmura-t-il, et hâte-toi !
    Il le poussa dans la pièce. Yusuf profita de l’occasion : au lieu de récolter les pièces, il courut sur le carrelage et franchit la porte de devant dans l’espoir d’atteindre l’escalier.
    Le chemin lui fut barré par une fille de douze ou treize ans qui portait elle aussi une tenue vaporeuse.
    — Où vas-tu comme ça ? lui demanda-t-elle en arabe.
    — Dehors, répondit-il machinalement dans la même langue.
    Elle le regarda droit dans les yeux.
    — Tu n’es pas Hasan. Qui es-tu ?
    — Personne, fit-il, paniqué. Un ami. Il m’a demandé de prendre sa place pour ce soir. Mais si je m’attarde…
    — Viens par ici, murmura-t-elle, et elle le tira derrière un autre rideau, dans une petite pièce encombrée de vêtements. C’est là que nous nous changeons. Lup s’y trouvait, mais il ne reviendra pas tout de suite. Où est Hasan ?
    — Parti, chuchota Yusuf. Sorti, je veux dire. Il voulait…
    — Tant mieux, répondit-elle, la main levée pour le faire taire. J’espère qu’il va y arriver.
    — Qui es-tu ?
    — Romea. Je suis censée jouer de la flûte, mais l’un de ces rustres, fit-elle avec du venin dans la voix, a essayé de m’attraper, et il a marché dessus, elle est tout abîmée à présent. Il y en a une autre là-dedans, quelque part.
    — Tu ne peux pas t’appeler Romea, dit Yusuf. C’est un nom de chrétien.
    — Je n’ai pas le temps de discuter de ça. Lup sera là dans une minute. Tiens, donne-moi ce chapeau et ce masque – où sont tes habits ?
    — En bas, dans la petite pièce, avec les jarres à vin et tout le reste, dit Yusuf en se débarrassant de son costume ridicule.
    — Marieta est juste à côté. Tu n’y arriveras jamais. Passe par-devant.
    — Et mes vêtements ? demanda Yusuf, horrifié.
    — Je te les apporterai demain matin à dix heures. Sur les marches de Sant Feliu. Attends-moi là-bas. Allez, dépêche-toi.
    Elle le fit sortir de la petite pièce par la porte qu’il venait de franchir. Comme ils s’en approchaient, une main tira la tenture de l’intérieur. Romea poussa Yusuf vers une porte voûtée. Un escalier en colimaçon menait à l’étage supérieur.
    — Attends qu’il n’y ait plus personne, lui dit-elle, et vas-y !
    Elle fit demi-tour et revint dans le couloir en marchant avec une grâce insolente.
    Yusuf monta quelques marches et attendit.
    — Où étais-tu passée ? aboya une voix méchante.
    — Qu’est-ce que tu crois ? Un de ces lourdauds a voulu un échantillon gratuit et il a cassé ma flûte. Ali est monté voir s’il y en avait une de rechange dans ma chambre. Je m’apprêtais à regarder dans la réserve. Dis à Maria de chanter un couplet de plus.
    Les notes plaintives d’une flûte en bois emplirent alors le couloir. Yusuf descendit prudemment. Romea était seule, à côté de la tenture menant à la pièce principale. Elle leva une main de son instrument et lui fit un geste impérieux pour qu’il déguerpisse. Il lui adressa un petit signe et disparut dans la nuit, tout vêtu d’or et d’écarlate.

CHAPITRE XV
     
    Yusuf était essoufflé, pris de vertige et surtout affreusement mal à l’aise quand il arriva près du portail de la maison de son maître. Tout au long du chemin, il avait été arrêté par des ivrognes ou des femmes grossières qui avaient éclaté de rire en le voyant ou lui avaient lancé d’obscènes propositions. Il ne désirait plus qu’une chose, se

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