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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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sœur ! Elle aurait pu me détester et détester notre père qui, si longtemps, l'a tenue à l'écart et m'a caché son existence. Quand j'étais plus jeune, quel plaisir j'aurais eu à vivre et à jouer avec elle ! confessa Ottilia.
     
    – Maintenant, lord Simon se réjouit d'avoir deux filles. Votre duo, digne de la commedia dell'arte, quand vous avez échangé vos toilettes, le soir du dîner d'anniversaire de Victoria, a paru sceller votre complicité. Mieux que quiconque Lamia a perçu quel était le sens profond de cette espièglerie concertée, rappela Charles.
     
    – Nous nous sommes bien amusées, et ainsi les commères comme Margaret Russell ou Dorothy Weston Clarke, ont été édifiées. Ounca et Ottilia s'aiment ! Et si l'une devait être jalouse de l'autre, ce serait moi, car Ounca a tout ce que je ne puis avoir, acheva Otti, le regard perdu sur l'horizon.
     
    Charles lui prit le bras et l'entraîna vers l'arrière, moins venté. Ils y restèrent un moment à observer le sillage du voilier tout en jouissant d'un silence partagé.
     

    Au cours du voyage, les conversations entre passagers, auxquels se joignait parfois Mark Tilloy quand le service lui laissait un peu de répit, à l'heure des repas ou au salon, portèrent le plus souvent sur le conflit américain, mais aussi sur la soudaine prospérité de Nassau qui en découlait. D'après Murray, le loyer des rares maisons disponibles sur New Providence avait été multiplié par cent. On évoquait parfois la guerre du Mexique où se trouvaient engagées la France et l'Angleterre, le combat libérateur de Garibaldi dans les États du pape, la révolte des Monténégrins contre les Turcs, la création d'un syndicat des ouvriers métallurgistes en Grande-Bretagne entre d'autres sujets plus futiles, comme l'embarras que causaient les crinolines dans les chemins de fer ou le rejet du corset par les féministes, tous propos qui offraient matière à commentaires, voire à controverses.
     
    Charles et Ottilia eurent l'occasion d'évoquer, au cours de quelques apartés, l'avenir de Pacal, la santé du major Carver, les attentions que lui portait Lamia, et même, sujet plus intime, l'irréprochable attitude de Malcolm, en tant que mari, et la discrétion de Gertrude Lanterbach en tant que maîtresse admise.
     
    – Tout était prévu avec Malcolm, pour les raisons que vous savez. Même si cet étrange ménage à trois vous a d'abord un peu étonné, peut-être même scandalisé, sachez que, depuis l'enfance, je considère Malcolm comme un frère jouisseur un peu fou. Une sorte de lord Byron à qui il aurait tant aimé ressembler. Ce qui, d'ailleurs, lui permet de mieux accepter sa boiterie, confia Otti.
     
    – De tempérament artiste, généreux, fidèle en amitié, Malcolm est en effet un aimable dissolu. Je l'aime, moi aussi, comme un frère. Je me demande parfois s'il ne s'applique pas, ne se force pas à la débauche, comme d'autres s'appliquent et se forcent à la vertu, commenta Charles.
     
    – Cette volonté de transgresser les principes, ce que je fis quelquefois, moi aussi, est chez lui plus qu'une provocation mondaine, une sorte de perversité contrôlée. Je ne peux que tenter de lui éviter le pire, car je porte son nom et lui suis reconnaissante de m'avoir épousée, ajouta Otti.
     
    – Aux yeux du monde, vous formez en effet un couple comme un autre, et nul ne peut soupçonner sa liaison avec Gertrude.
     
    – Plus qu'une gouvernante, Gertrude, qui ne m'a pas quittée depuis l'adolescence, est une fidèle amie. Elle sait qu'il ne peut exister de ma part aucune jalousie d'épouse, et qu'il sied de maintenir formes et convenances. Jamais rien, dans sa façon d'être ou de s'exprimer, ne peut me rappeler ou donner à penser à quiconque ce qui se passe entre elle et Malcolm. Notre arrangement, aussi peu moral qu'il soit, reste satisfaisant pour tous. Je crains seulement que Gertrude ne finisse par souffrir, dans sa dignité de femme aimante, des incartades de Malcolm.
     
    – Il se plaint en effet d'en être trop aimé, acquiesça Charles.
     
    – J'ai dû exiger qu'il taise à Gertrude les aventures qu'il rapporte, sans doute à vous comme à moi, avec une complaisance et un luxe de détails qui amusent, mais dont le cynisme blesserait Gertrude.
     
    – Pour lui, toute femme est un gibier. Et, comme les chasseurs, il aime à exposer et commenter ses tableaux de chasse, reconnut Desteyrac.
     
    – Nous avons, vous le

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