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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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la première maison de détention moderne d’Europe. De nombreux magistrats, policiers et avocats étrangers venaient, chaque année, visiter ce bâtiment, construit par l’architecte Samuel Vaucher, élève de Dufour et bâtisseur du musée Rath, « de telle manière que, d’un point quelconque de l’édifice, l’œil embrassait toutes les parties intérieures », d’où son nom de prison panoptique !
     
    Pour M. Dufour, il s’agissait, maintenant, de loger les honnêtes gens au moins aussi bien que les malfaiteurs ! Grâce à la Société immobilière des Bergues, dont il était avec James Fazy un des quatre fondateurs en 1827, et dont le capital représentait, disaient les gens informés, l’équivalent du budget cantonal, on allait pouvoir rénover entièrement la rive droite du Rhône, entre Saint-Gervais et les Pâquis.
     
    Le quartier des Bergues 7 , limité par la berge, la rue de Coutance et, du côté de Cornavin et des Pâquis, par les fossés des fortifications, s’était développé, au xviii e  siècle, autour de la grande fabrique d’indiennes de Jean et Jean-Salomon Fazy où travaillaient, au temps de la vogue des toiles peintes, près de deux mille ouvriers. Les ancêtres de James Fazy utilisaient alors les méthodes de production inaugurées par leur parent, Daniel Vasserot, un huguenot français réfugié à Genève. Dès 1810, la France s’étant mise à produire des indiennes, industrie jusque-là interdite, la concurrence avait eu raison de la manufacture Fazy et les ouvriers des Bergues avaient dû changer de métier. En vendant, pour quatre cent mille francs de France, à la nouvelle Société des Bergues terrains, bâtiments, hangars, pavillons et jardins, l’héritier des Fazy avait fait une bonne opération.
     
    Les projets de l’ingénieur Dufour, rassemblés en un mémoire très complet, promettaient de faire du site un quartier modèle. On prévoyait d’y loger huit cents habitants, dans vingt-cinq immeubles locatifs de six étages, dont les rez-de-chaussée seraient occupés par des commerces. Entraînés par Guillaume Henri Dufour, les actionnaires, MM. François Duval, Pellegrino Rossi, Ador-Darier, Naville-Saladin, Pernessin ainsi que les banquiers Louis Pictet et Richard Calandrini, venaient, en outre, de prendre la décision de bâtir sur le quai, qui allait être élargi, dallé, soutenu et bordé par des pierres taillées, un grand hôtel, du genre des fameux palaces anglais, qui ferait honneur à Genève. À cet effet, un concours avait été ouvert au commencement de l’année et, lors d’un voyage à Genève, Axel apprit par Pierre-Antoine Laviron que c’était le projet d’un architecte lyonnais, Augustin Miciol, qui avait remporté le prix, mais que la direction de la construction venait d’être confiée à François-Ulrich Vaucher, un ami de Dufour et parent de Samuel Vaucher, qui avait construit la prison panoptique !
     
    Tous ces projets, qui devaient transformer pendant des mois certains quartiers de Genève en chantiers, fournissaient à Axel Métaz de nombreuses commandes de pierres, de chaux, de bois de charpente. Pierre-Antoine Laviron, engagé dans plusieurs opérations immobilières, révéla que, l’État ayant mis en vente la bande de terrains entre la chaussée de la Corraterie et les fossés des fortifications, on allait construire, tout au long de l’artère historique qui conduisait de la place de Bel-Air à la place Neuve, des immeubles de rapport, dont un cahier des charges fixait strictement l’architecture, les ouvertures et le décor extérieur, jusqu’aux moindres détails des façades. Ainsi, le faîtage des maisons à quatre étages devrait n’offrir aux regards « qu’une seule ligne horizontale tirée de l’extrémité du côté du musée Rath ». La Corraterie ne comporterait plus, à gauche en regardant le Rhône, qu’une succession de façades identiques, qui contrasteraient avec celles des demeures vis-à-vis, élevées au cours des siècles par des propriétaires indifférents à l’harmonie architecturale et, même, à l’alignement des bâtiments. Les beaux platanes, plantés vers 1804, à l’ombre desquels on flânait les soirs d’été, protégés des chars et calèches par les bouteroues, feraient, hélas, les frais de l’opération. La pierre, partout, gagnait sur la verdure.
     
    M. Dufour avait également obtenu du Conseil d’État l’autorisation de construire, sur la rive gauche du

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