Robin
taille normale.
Il tendit ses bras en direction du
soleil. Alors que les rayons lumineux séchaient ses vêtements, il entendit la
plus charmante des musiques. Il se retourna, pour voir à quelque distance une
dame s’approcher de lui sur un cheval blanc laiteux. La musique sortait d’une
flûte dont elle jouait en menant sa monture au petit galop le long de la rive,
dans la lumière de miel du soleil levant. Sa chevelure brillait de l’éclat des
flammes, sa peau était ferme et douce, ses bras fins, sa robe de satin jaune
bordé de bleu, ses yeux aussi verts que de l’herbe fraîche ou des pommes en
été.
Elle finit par remarquer la
présence de Bran, debout seul sur la grève, et s’arrêta de jouer. « Soyez
le bienvenu, sire », dit-elle. Sa voix, légère et mélodieuse, émut Bran au
plus profond de son cœur. « Quel est votre nom ?
— Je m’appelle Bran
Bendigedig, répondit-il. Je suis un étranger.
— Peu importe, dit la dame.
Cette belle île vous a séduit, à l’évidence.
— Si fait, reconnut Bran. Mais
moins que vous, ma dame. Si d’aventure je me vantais d’avoir vu plus beau
visage ailleurs dans ce vaste monde, je mourrais en menteur. Comment vous
appelez-vous ?
— Que ne m’avez-vous pas posé
toute autre question, dit-elle tristement, car un puissant geas m’interdit
de révéler mon nom avant la libération de l’Albion.
— Si c’est là la seule chose
qui vous l’interdit, alors gardez espoir », répondit Bran avec assurance,
car au moment où ses paroles atteignirent ses oreilles, il sut sans l’ombre
d’un doute que la chose que son cœur troublé réclamait était le nom de la dame
devant lui – juste savoir son nom et, l’ayant appris, le posséder, et,
l’ayant possédé, la garder près de lui à jamais. Avec elle comme épouse, son
cœur trouverait enfin la paix. « Dites-moi simplement de qui ou de quoi il
s’agit, et je la libérerai avant que le soleil ait achevé sa course.
— Que ne m’avez-vous pas
promis autre chose, lui dit la dame. Albion est le nom de ce lieu, la plus
belle des îles existantes. Un fléau a atteint son rivage voilà dix ans, et
dévaste à présent toute l’île. Chaque matin je viens sur la grève, entre chien
et loup, dans l’espoir de trouver une personne susceptible de briser le mauvais
sort qui tient l’Albion en servitude.
— Aujourd’hui votre quête a
pris fin, répondit Bran avec toujours autant de confiance. Dites-moi simplement
quoi faire, et je l’accomplirai.
— Il faudra plus que votre
courage intrépide et votre main ferme pour libérer l’Albion. Nombre de grands
hommes ont essayé, mais aucun n’y est parvenu, car le fléau n’est pas une
maladie ordinaire. C’est un enchantement maléfique, qui prend la forme d’une
race de géants dont la puissance sans borne cause tant de ravages et de
dévastation que mon cœur tremble à leur simple mention.
— Ne craignez rien, noble
dame. Le Tout-Puissant, dans Son infinie sagesse, m’a accordé de nombreux dons,
et je peux en faire bénéficier tout ce sur quoi j’impose mes mains. »
À ces mots, la dame se mit à
sourire – oh, d’un sourire encore plus radieux que la lumière du soleil
sur les falaises éclatantes. « Le jour où vous aurez libéré l’Albion, je
vous donnerai mon nom, et plus encore, pour peu que vous le demandiez.
— Eh bien soyez assurée
qu’aujourd’hui même, je reviendrai demander votre main, et plus encore, je
demanderai votre cœur également. » La dame hocha la tête en signe
d’assentiment, puis lui expliqua la marche à suivre pour libérer l’Albion et
rompre le geas qui la contraignait.
Bran le Béni écouta attentivement
tout ce qu’elle lui dit puis, après lui avoir fait ses adieux, se mit en route.
Il tomba sur la rivière dont elle lui avait parlé, et la suivit jusqu’au centre
de l’île. Il marcha trois jours et trois nuits, s’arrêtant à peine pour boire
un peu d’eau pure de la rivière, car son cœur brûlait à l’idée d’épouser la
plus belle femme du monde.
Quand le soleil se leva sur le
quatrième jour, Bran arriva dans un grand bois sombre – la forêt dans
laquelle toutes les autres forêts du monde trouvaient leur origine. Il y
pénétra et, tout comme la dame le lui avait dit, finit par atteindre après
trois jours de marche supplémentaires une clairière dans laquelle deux routes
se croisaient. Il alla à grands pas s’asseoir au centre du
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