Robin
fermiers
et ordonna à son sénéchal d’envoyer au chef du village deux tonneaux de bonne
bière brune comme marque de sa gratitude et de ses meilleurs vœux.
Le baron et le roi chevauchèrent
jusqu’à la propriété suivante, où les bergers faisaient paître leurs troupeaux.
Le baron leur demanda comment les bêtes avaient passé l’hiver, comment se
présentaient les vêlages du printemps et s’ils s’attendaient à une bonne année.
On lui répondit chaque fois positivement, et il ordonna l’envoi de deux
tonneaux supplémentaires.
Puis la troupe fit demi-tour et
chevaucha jusqu’au caer, où le roi Cadwgan ordonna à ses cuisiniers de préparer
un festin en l’honneur de la visite imprévue, mais aucunement importune, de son
suzerain. Le baron ayant fait en sorte que Cadwgan se considère comme un
confident bien informé doublé d’un conseiller digne de foi, le roi avait mis
les petits plats dans les grands : des bougies de cire d’abeille et des
nappes finement tissées pour la table, les plats et coupes en argent qu’il
gardait pour pareille occasion, et les meilleures tranches de la venaison qui
vieillissait dans le garde-manger. On répandit de la paille fraîche sur le sol
et on alluma dans l’âtre un feu parfumé de bois de pommier et de bruyère.
« Ce soir, vous allez mettre
vos pieds sous ma table, lui dit Cadwgan. Laissez-moi vous montrer la véritable
hospitalité cymry.
— Je ne demande pas
mieux », répondit Neufmarché, ravi de constater que son plan fonctionnait
à merveille.
Le roi ordonna à son intendant de
conduire le baron jusqu’aux appartements prévus à son usage et de préparer de
l’eau pour un bain. « Quand vous serez prêt, venez me rejoindre dans la
grande salle. Un verre vous y attendra. »
Bernard obéit consciencieusement à
son hôte : après s’être rafraîchi dans sa chambre, il retourna un peu plus
tard dans la grande salle, où il eut le plaisir de découvrir deux belles jeunes
femmes se tenant de chaque côté de l’âtre rougeoyant.
« Baron Neufmarché, annonça le
roi, laissez-moi vous présenter ma fille Mérian et sa cousine Essylt. »
Grande, svelte et un peu plus
vieille que sa parente, Mérian portait une simple robe de lin vert pâle sur
laquelle tombaient ses longs cheveux sombres, tandis que celle d’Essylt, qui
jouissait par ailleurs d’un beau visage plein et d’une bouche délicate, avait
la couleur du beurre frais. Les deux jeunes femmes affichaient une assurance
sage et sans malice.
Mérian lui jeta un regard
scrutateur lorsqu’elle lui tendit un petit tranchoir en bois couvert de
morceaux de pain. « Soyez le bienvenu en ces lieux, baron Neufmarché,
dit-elle d’une voix si douce que le cœur dur du baron se serra de désir.
— Puissiez-vous ne manquer de
rien pendant votre séjour, ajouta Essylt en lui présentant un petit récipient
rempli de sel.
— Je suis charmé,
mesdames », déclara Bernard, ses premières paroles dénuées de mensonges
depuis le début de la journée. Il prit une tranche de pain sur la planchette,
la plongea dans le sel et l’avala. « Que la paix soit sur cette maison ce
soir, ajouta-t-il en tendant la main.
— À votre service, baron
Neufmarché », répondit la fille du roi. Elle accepta sa main, fit une
gracieuse révérence et courba la tête. Ses longues boucles noires s’écartèrent,
révélant une fine nuque et la courbe d’une épaule harmonieuse.
« Et moi au vôtre », dit
Neufmarché, ébloui par la splendeur de la jeune femme. Ses yeux refusaient de
quitter la beauté aux cheveux sombres devant lui, même quand sa cousine Essylt
lui rendit à son tour les honneurs.
« Père dit que le travail des
champs vous satisfait, reprit Mérian, sans attendre qu’il s’adresse à elle.
— En effet, c’est de la belle
ouvrage.
— Et les troupeaux, sont-ils
aussi à votre goût ?
— J’en ai rarement vu de plus
beaux, répondit poliment le baron. Vos gens savent élever du bétail, je l’ai
toujours dit. Je suis très satisfait.
— Dans ce cas, il faut nous
attendre à une augmentation de nos taxes cette année, répliqua-t-elle avec un
beau sourire.
— Voyons ! »
intervint aussitôt Cadwgan en lançant à la jeune femme un regard
désapprobateur, avant de se tourner vers Neufmarché : « Veuillez
pardonner ma fille. Elle a l’esprit de contradiction et oublie parfois sa place.
— Mon père dit vrai, reconnut
Mérian d’un ton
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