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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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dates 1751-1838, Axel fit graver deux vers
de Juste Olivier, l’ami vaudois de Sainte-Beuve :
     
    Ô bleu
Léman, toujours grand, toujours beau,
    Que
sur ta rive au moins j’aie un tombeau.
     
    Tandis qu’Axel Métaz recueillait le dernier souffle de Pierre
Valeyres, des invitations inattendues étaient parvenues à Blaise de Fontsalte
et à Claude Ribeyre de Béran. Le maréchal Soult, officiellement chargé depuis
le 25 avril de représenter la France au couronnement de la reine Victoria,
conviait les deux généraux bonapartistes à se joindre à la délégation française
avec leurs épouses.
    Un peu étonnés d’être invités par un ancien compagnon d’armes,
passé au service de Louis-Philippe et tenu en piètre estime depuis que, président
du Conseil, il avait refusé aux députés le droit d’écourter l’exil de la
famille Bonaparte, Blaise et Claude eussent sans doute décliné l’invitation si
Charlotte et Flora ne les avaient suppliés de l’accepter. La marraine d’Axel, monarchiste
convaincue, et sa mère, depuis toujours attirée par les fastes des cours
royales, roucoulaient de plaisir à la pensée d’assister, parmi les notabilités
françaises privilégiées, au couronnement de la reine d’Angleterre.
    Claude et Blaise cédèrent en riant, estimant qu’il n’était
pas mauvais que deux fidèles de Napoléon I er , connus comme tels
des Britanniques par les fonctions qu’ils avaient assumées au service des
Affaires secrètes et des Reconnaissances, aillent se montrer, sur le sol
anglais, au vaniteux duc de Wellington, qui continuait à se prendre pour le
seul vainqueur de Waterloo et tenait ses dépêches, expédiées du champ de
bataille, pour reliques historiques et œuvres littéraires !
    Charlotte proposa à Élise et Axel de se joindre aux deux
couples mais M me  Métaz refusa de passer la Manche. Elle accepta,
en revanche, si son mari voulait se rendre en Angleterre, d’aller faire une
cure marine à Dieppe, où elle attendrait, avec ses enfants, le retour des
voyageurs. La mode naissante des bains de mer incitait les médecins à prescrire
des baignades aux femmes ayant eu des couches difficiles. Le prétexte parut
acceptable. Axel, dont la présence à Londres ne pouvait avoir de caractère
officiel et qui ne marquait guère d’intérêt pour des cérémonies qu’il devrait
suivre dans la foule anonyme, dit qu’il profiterait de son séjour pour visiter
les ateliers de Miller et Rawenhill, constructeurs, l’année précédente, des
chaudières de l’ Aigle, le nouveau vapeur genevois, dont la vitesse
atteignait vingt kilomètres à l’heure, ce qui concurrençait le Léman vaudois.
Pour ne pas être en reste, les armateurs d’Ouchy venaient, en effet, de décider
de reconstruire leur bateau, trop lent, en faisant remplacer sa lourde coque de
mélèze par une fine coque en fer, pareille à celle de l’ Industriel qui
naviguait depuis 1834 sur le lac de Neuchâtel. Les ateliers Escher Wyss et Cie,
de Zurich, qui employaient des ingénieurs anglais, doteraient le futur Léman II de machines plus puissantes en faisant passer la pression par centimètre
carré d’un quart de kilo à un demi.
    Mais Axel, comme le savant Daniel Colladon qui avait calculé,
en 1826, la vitesse de propagation du son dans l’eau [100] , croyait à l’avenir
de la machine à cylindres oscillants que les Genevois avaient jugée dangereuse.
Aussi, en tant qu’actionnaire de plusieurs bateaux à vapeur, entendait-il se
faire une opinion personnelle sur les nouvelles chaudières, dites tubulaires, produites
par les Anglais. Mais ce qui décida surtout le Veveysan fut un soudain besoin
de dépaysement pour oublier la jolie Marthe Bovey, dont il avait, un temps, espéré
qu’elle se manifesterait d’une façon ou d’une autre.
    Le couronnement de Victoria étant annoncé pour les 27 et 28 juin,
le départ du cercle Fontsalte fut fixé au 2 juin. La décision prise, Axel
se rendit à Genève pour préparer le voyage du groupe jusqu’à Dieppe, où l’on
installerait Élise et les enfants avant de passer en Angleterre.
    À Genève, il se trouva en face d’une Alexandra nouvelle. Sa
filleule lui arrivait à l’épaule et offrait tous les attributs de la féminité. De
cette jeune fille de presque seize ans, mince et élancée, émanait une grâce et
une vitalité nimbées de l’innocence de celles qui ignorent encore leur pouvoir
de séduction.
    Le lendemain de leurs

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