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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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1800, ouvrir à Londres un cabinet de
cires qui présentait les modèles moulés par son oncle, que beaucoup de
Parisiens avaient vus sous Louis XVI. Après la Révolution, la collection s’était
enrichie de trophées macabres, dont une guillotine – M me  Tussaud
affirmait qu’elle avait décapité Marie-Antoinette – et la berline dans laquelle
Napoléon I er était allé à la rencontre de sa défaite à Waterloo.
C’est surtout cette voiture que Blaise et Ribeyre voulaient examiner, car ils
doutaient l’un et l’autre qu’elle fût authentique. Après minutieuse inspection,
Blaise confirma qu’il s’agissait bien d’une des berlines de l’empereur, saisie
par les Anglais, mais rien ne permettait d’affirmer qu’elle avait transporté
Napoléon à Waterloo.
    Les deux généraux ayant à régler des questions protocolaires,
Axel se trouva à nouveau libre de ses mouvements. Tenaillé par le besoin de
savoir ce qu’était devenue Janet Moore, il s’enhardit jusqu’à se rendre chez le
banquier Ludbrocker, dont le concierge de Pendle House lui avait donné l’adresse.
    S’étant annoncé comme représentant de la banque
Laviron-Cottier, de Genève, Axel fut reçu avec une extrême courtoisie par M. Ludbrocker.
    — Je savais que les Moore avaient emprunté à un
banquier florentin, j’ignorais qu’ils avaient aussi réussi à tromper la
vigilance, cependant proverbiale, d’un banquier privé genevois. Il est vrai que
Moore fut un nom longtemps respecté, et puis sa belle épouse savait être, m’a-t-on
dit, très convaincante, quand il s’agissait de tirer son mari d’un mauvais pas.
Mais si vous détenez, vous aussi, des créances sur les Moore, cher monsieur, faites-en
votre deuil, dit le financier.
    — Ça ne fera qu’un deuil de plus. Quel triste sort que
celui de ce couple, dit Axel.
    — Triste certes, mais voulu par la Providence, cher
monsieur. Les vices des grands sont souvent punis à proportion de leur rang. Et
ce n’est que justice, n’est-ce pas ?
    — En fait, je m’intéresse au sort de miss Janet
Moore. Savez-vous ce qu’elle est devenue ? demanda Axel, que ce moralisme
de pacotille agaçait.
    — Nous avons l’œil sur elle, si j’ose dire. Dans son
cas, la loi permet de saisir, pour désintéresser les créanciers de ses défunts
parents, seulement les deux tiers de ses revenus. Mais il faudrait que Dieu lui
accorde plusieurs vies pour payer les dettes des siens. Enfin, tout ce qui est
repris est repris, n’est-ce pas, et puis…
    — Et que fait-elle ? coupa assez sèchement Métaz.
    — Elle est pianiste chez Evans. C’est un café-concert
avec restaurant. Ça lui permet de manger le soir à sa faim. Mais là-dessus, nous
ne pouvons rien reprendre, bien sûr, conclut le banquier avec regret.
    Écœuré par l’attitude de cet homme d’argent, Axel se leva, sans
prendre la main que Ludbrocker lui tendait.
    Le même soir, il se fit conduire au Evans Music-Rooms, à
Covent Garden, donna la pièce de six pence exigée à l’entrée et demanda au
portier quand se produisait miss Moore, la pianiste.
    — Notre pianiste joue entre les attractions mais elle
ne se nomme pas Moore, c’est miss Pendle, milord, une véritable fée du
clavier, milord.
    Axel imagina aussitôt que Janet, peu soucieuse de se
présenter sous son nom véritable, avait choisi les premières syllabes de
Pendlemoore, le domaine de son père, aujourd’hui vendu, comme la résidence
londonienne de Pendle House et toutes les propriétés du lord ruiné.
    Le Vaudois fut favorablement impressionné par le bon goût et
l’élégance du décor. Un maître d’hôtel majestueux l’accompagna jusqu’à l’une
des loges dévolues aux dîneurs, sortes de cabinets particuliers dominant le
parterre réservé aux simples consommateurs et spectateurs, dont Axel constata
la bonne tenue. Les membres de la gentry eux-mêmes ne dédaignaient pas de
souper chez Evans, après le théâtre. Gage de respectabilité, les femmes seules
n’y étaient pas admises, alors que beaucoup d’établissements du même genre passaient
pour terrains de chasse autorisés aux courtisanes, voire aux prostituées. Tandis
que le maître d’hôtel prenait sa commande, un couple de chanteurs d’opérette
quitta la scène sous les applaudissements du public. Aussitôt reprirent le
brouhaha des conversations et les allées et venues des serveurs, tandis que, sur
une petite estrade, deux lampes à gaz tiraient de

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