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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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ce que je peux pour vous. Et
maintenant, je vais fermer la grille, ça évitera que des gens entrent, comme ça,
sans être annoncés !
    Axel comprit. Il ne lui restait qu’à battre en retraite, ce
qu’il fit aussitôt. Il savait maintenant que la mort de lord Moore remontait à
plus de douze ans et que Janet, ruinée, avait peut-être elle aussi quitté ce
monde d’une façon tragique. Cette nuit-là, il demeura longtemps éveillé, s’efforçant
de reconstituer ce qu’avait été, vingt ans plus tôt, sa voluptueuse aventure
anglaise. Il se demanda si le fantôme d’Eliza hantait maintenant le manoir de
Pendlemoore où avait été consommée leur violente rupture.
    Au matin, les pensées éprouvantes de la nuit s’étaient
dissipées. Il fit honneur au breakfast – le seul repas acceptable en
Angleterre, d’après Flora – et se rendit chez Glyner et Keith, où une
séance de travail le retint jusqu’à l’heure du lunch. Il déclina une nouvelle
invitation des associés de Pierre-Antoine pour se libérer mais renonça à se
rendre à Pendlemoore, comme il en avait eu, un moment, l’intention pendant son
insomnie et décida d’effectuer un autre pèlerinage, suggéré par Martin
Chantenoz et qu’il s’était promis de faire. Sans guide cette fois, il s’agissait
de retrouver, à travers Londres, les lieux qu’avait hantés, au XVIII e  siècle, Samuel Johnson, le
fameux docteur Johnson, le premier lexicographe anglais, un de ses auteurs
familiers. Avec son précepteur, Axel avait lu et commenté pendant ses études, puis
avait ensuite relu sans contrainte et avec plus d’attention, la biographie
consacrée par James Boswell à ce lion des lettres britanniques, dont l’esprit, d’une
rare causticité, faisait les délices de Chantenoz. La philosophie du docteur
Johnson, fondée sur une grande lucidité quant à la nature humaine, illustrée
par des aphorismes et réflexions d’un humour acide, se révélait, pour Axel, de
plus en plus réaliste et sage. À trente-sept ans, il admettait chez Johnson ce
qu’il n’eût pas admis vingt ans plus tôt : la fugacité de l’amour entre
homme et femme.
    Enquêteur méthodique, le Vaudois imagina que l’on devait
pouvoir se procurer à Londres une ancienne édition de l’ouvrage de Boswell Life
and Works of Samuel Johnson, dont il ne possédait qu’une édition courante. Un
libraire de Regent Street lui en proposa une, exceptionnelle au dire du
commerçant, la sixième édition publiée par Edmond Malone, en 1811, dont le
texte, d’après l’avertissement de l’éditeur, avait été relu par le second fils
de Boswell. Bien que le prix exigé lui parût trop élevé, Axel fit l’emplette
des quatre volumes auxquels il ajouta deux volumes de la correspondance du
docteur, récemment imprimés. Puis, par Fleet Street, il se rendit dans le Wine
Office Court, pour prendre un verre de ale à la taverne Cheshire Cheese,
où Johnson rencontrait son ami le romancier Oliver Goldsmith, et son futur
biographe James Boswell. Le tenancier, qui repérait au premier coup d’œil les
pèlerins johnsoniens, conseilla au Vaudois d’aller visiter, à deux pas de chez
lui, la maison portant le numéro 17, Gough Square, qu’avait habitée Johnson
jusqu’à la mort de sa femme, en 1759. De là, Axel voulut retrouver l’ambiance
du club littéraire fondé par Johnson et le peintre Joshua Reynolds en 1764. The
Club, ainsi que le nommaient les familiers, avait d’abord eu pour siège le pub
Turk’s Head, dans le Strand, avant d’émigrer au Prince, puis au Baxter. Ses
membres, au nombre d’une centaine, se réunissaient depuis 1799 à Thatched House,
dans Saint-James’s Street. Axel osa se présenter au trésorier, le seul membre
élu jouissant d’une position permanente. Ce dernier lui fit comprendre qu’il serait
plus agréable de parler de Samuel Johnson devant une bouteille du même porto
dont le fameux docteur avait vidé assez de flacons pour se donner une goutte
chronique. Cette nuit-là, le Vaudois, légèrement gris, regagna fort tard son
hôtel, sans avoir pu atteindre au record de Johnson qui, d’après les membres du
club, vidait une trentaine de verres de porto avant d’aller dormir !
    Au lendemain de cette beuverie johnsonienne, Blaise et
Claude entraînèrent Axel chez M me  Tussaud, dont le musée de
cire avait acquis une réputation européenne. Cette nièce d’un médecin suisse, habile
modeleur d’anatomies, était venue, en

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