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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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à Genève, Camillo
Benso, comte de Cavour, un Piémontais dont la mère était une Sellon de la rue
des Granges. Cet officier avait été cassé et chassé en 1831 de l’armée du roi
de Sardaigne, après avoir affiché une sympathie incongrue pour les révolutionnaires
français de 1830. Depuis ce temps, Cavour, fils d’un épicier niçois anobli par
Charles-Albert, cultivait ses terres, quand il ne voyageait pas à travers l’Europe.
Il ne rêvait, certes, que d’instaurer la république en Italie, mais Blaise et
Ribeyre savaient que le Piémontais n’offrirait guère à Louis Napoléon que sa
sympathie.
    James Fazy, à qui le prince avait rendu discrètement visite,
proposait un appui plus efficace. Louis Napoléon, après avoir fait confidence
de son projet de soulèvement à Strasbourg, avait demandé au chef de file des
radicaux genevois d’user de l’influence qu’il avait encore en France pour lui
obtenir le concours du parti républicain français et de ses anciens affiliés
carbonari. Avant de se prononcer, Fazy avait voulu savoir dans quel sens le
prince entendait agir. « Vous engagez-vous à faire triompher en France la
république et la démocratie ? » avait-il demandé. Si le prince se
présentait comme un libérateur « n’ayant d’autre ambition que de mettre le
peuple français à même de choisir un gouvernement par l’intermédiaire d’un
Congrès national, élu au suffrage universel et dont les décisions seraient soumises
à la sanction du peuple », Fazy consentait « à mettre à la disposition
de l’entreprise tout ce qui pourrait y amener ses amis en France ». Le
prince, à qui Fazy avait déjà posé semblable question, quand, en 1834, il avait
envisagé d’aller à Lyon prendre la tête des canuts révoltés, s’était empressé
de répéter qu’il n’agissait que pour offrir au peuple français, avec les
bienfaits de la démocratie, les avantages et vertus de la république.
    — Il a donc été convenu, rapporta Blaise de Fontsalte, que
James Fazy se rendra en personne à Strasbourg, pour convaincre les républicains,
ses amis, d’appuyer l’action que mènera Louis Napoléon au moment favorable [81] .
    — Ainsi, vous voyez que l’affaire est bien engagée, conclut
Ribeyre.
    Après avoir abattu trois grèbes, dont les plumes de poitrail
seraient partagées entre les épouses des chasseurs, on regagna Rive-Reine, où l’on
fit bonne chère ce soir-là.
     
    Le 20 octobre, les généraux Fontsalte et Ribeyre, complices
de longue date, ayant discrètement enfermé leur uniforme dans leur portemanteau,
nantis de tout l’équipement des chasseurs, lequel ressemble assez, armes
comprises, à celui des soldats, firent leurs adieux à leur femme et montèrent
en voiture : ils se rendaient en Bavière pour chasser sur les terres d’un
ami. L’adjudant Trévotte, dit Titus, qui savait quel gibier on allait chasser, conduisait
la berline qui, par un matin d’automne lumineux, prit la route de Bâle.
    Le surlendemain, les généraux étaient à pied d’œuvre, installés
dans un appartement loué par Fialin dans une rue tranquille de Strasbourg. La
ville comptait huit casernes susceptibles de loger dix mille hommes. La
citadelle, établie sur les plans de Vauban entre 1682 et 1685, abritait l’arsenal,
des magasins et des salles d’armes. De quoi organiser l’armée avec laquelle
Louis Napoléon marcherait sur Paris. Blaise et Claude ne furent pas étonnés de
rencontrer, sur les quais de l’Ill, d’anciens camarades, des grognards recrutés
en France, en Allemagne et en Suisse par l’inlassable Victor Fialin de Persigny.
Cette troupe ne représentait guère qu’une douzaine d’officiers de l’Empire, certains
fatigués, perclus de rhumatismes ou catarrheux, mais tous pareillement
déterminés à servir le neveu, comme ils avaient autrefois servi l’oncle.
    Fontsalte et Ribeyre ne cachèrent pas leur étonnement en
découvrant que Fialin était accompagné de sa maîtresse, une ancienne chanteuse,
veuve d’un certain lord Gordon, plus courtisane que lady. Le vicomte les
rassura aussitôt. Cette femme ravissante et intrépide tirait l’épée comme un
homme, montait comme un jockey, jouait du pistolet comme un flibustier. De
surcroît, elle vouait un véritable culte posthume à l’empereur Napoléon et ne
souhaitait que servir le prince Louis, son héritier naturel, qu’elle avait, autrefois,
rencontré en Italie. Et, pour prouver jusqu’où

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