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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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pouvait aller le dévouement de
cette personne, un des conjurés confia aux deux généraux qu’avec l’accord de
Persigny elle passait, depuis un mois, ses nuits dans le lit du colonel Vaudrey.
N’était-ce pas le meilleur moyen de s’assurer la loyauté d’un officier sur
lequel Louis Napoléon comptait pour soulever la garnison ?
    Les deux amis acceptèrent cette cantinière d’un nouveau
genre et reçurent leur mission. Ils devraient, dans la nuit du 30 octobre,
s’emparer du télégraphe Chappe afin qu’aucun zélé fonctionnaire royaliste ne
pût donner l’alerte aux garnisons de Paris et aux ministres de Louis-Philippe. D’autres
officiers demi-solde étaient chargés de transporter et de distribuer les
décrets et proclamations destinés à l’armée et au peuple, déjà rédigés et en
cours d’impression.
    Les conjurés furent satisfaits d’apprendre, le 28 octobre
à dix heures du soir, que le prince était arrivé en ville. En quittant Arenenberg,
trois jours plus tôt, il avait laissé croire à sa mère, la reine Hortense, qu’il
se rendait à une partie de chasse à Heichingen, chez sa cousine, la princesse
de Hohenzollern, fille d’Eugène de Beauharnais. Ceux qui venaient de rencontrer
le prince appréciaient qu’il se fût fait couper, par son tailleur de Berne, un
uniforme bleu de colonel d’artillerie, sur lequel il arborerait, pour l’action,
le grand cordon de la Légion d’honneur. On le disait déterminé, un peu nerveux
mais confiant.
    Restait à attendre l’aube du 30 octobre, ce que Blaise
et Claude firent en fumant maintes pipes et vidant des pots de bière, après
avoir très exactement inspecté les abords du télégraphe qu’ils devaient rendre
muet.
    Mais – Axel Métaz ne l’apprit que plus tard – les
dieux se montrèrent réfractaires au coup d’éclat qui devait faire de Louis
Napoléon « un empereur de la République » ! Les événements ne
suivirent pas longtemps le cours prévu par les conjurés. Certes, le 30 octobre,
à cinq heures du matin, le colonel Vaudrey, qui sortait des bras de la dévouée Éléonore,
veuve Gordon, née Brault, fit, comme prévu, sonner le rassemblement dans la
cour de sa caserne et présenta Louis Napoléon à ses soldats en rappelant :
« Entre ce prince et vous, existent de grands souvenirs. »
    Les acclamations des artilleurs donnèrent à penser qu’on ne
rencontrerait pas d’opposition sérieuse. On courut donc au quartier général de
la place pour convaincre l’état-major de participer à l’offensive contre le
régime orléaniste. Force fut de constater, avec amertume, que le général Voirol
n’avait pas changé d’avis depuis l’été précédent, quand il avait répondu à une
invitation de Louis Napoléon à lui rendre visite à Bade : « Je
respecte les lois de mon pays ; une de ces lois bannit à perpétuité la
branche des Bonaparte : le prince ne peut remettre le pied en France et je
ne puis moi-même aller le voir [82] . » Le prince ayant mis le pied en France était un hors-la-loi : il fallait l’arrêter,
ainsi que tous les comploteurs, et fusiller tout ce monde-là ! Voirol, homme
de devoir, pensait peut-être aussi au prestige qu’il retirerait de la répression
immédiate et au bel avancement que cela lui vaudrait. Bien que séquestré en
caleçon dans sa chambre par le commandant Parquin, déguisé en général, il
réussit à se débarrasser de son gardien et courut donner l’alerte au 16 e  régiment
de ligne, qu’il savait fidèle au roi. À cette heure-là le complot avait déjà
échoué, car la plupart des unités refusaient de suivre un homme qui se disait neveu
de l’empereur mais que le lieutenant-colonel Tallandier affirmait être un
vulgaire usurpateur.
    Les troupes de la garnison s’étant partagées en deux camps
inégaux, on redouta un moment le pire, la tuerie entre Français. Mais comme les
« Vive le roi ! » étaient beaucoup plus nourris que les timides « Vive
l’empereur ! » les rebelles se rendirent. Louis Napoléon, le colonel
Vaudrey et leur état-major d’occasion furent arrêtés, sans coup férir ni ménagement.
Quand les cloches de la cathédrale sonnèrent midi, tout était consommé.
    Ignorant tout du fiasco, Fontsalte et Ribeyre, aidés d’une
poignée de grognards, avaient neutralisé les commis du télégraphe et attendaient,
en leur compagnie, les événements et le moment d’aller passer leur uniforme.
    Aussi furent-ils

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