Sachso
parisienne après des distributions de tracts communistes contre Vichy et les Allemands. Ils sont eux-mêmes communistes ou présumés tels. Ils sont gardés par des gendarmes français, mais les nazis ne se gênent pas pour intervenir avec violence. Le 6 décembre 1940, parce que leur consigne d’obscurité totale du camp n’est pas suivie, les Allemands font bombarder les bâtiments par un avion. Un gendarme est éventré, la chaufferie détruite…
Interné à Aincourt à la fin de novembre 1940, Marcel Stiquel en est extrait le 30 janvier 1941 pour être jugé par le Tribunal de Versailles. Cinq fois le Tribunal refuse de statuer, puis finalement décide trois mois de prison pour « propagande communiste ».
Le 2 mai 1941, sa peine terminée à la prison de la Santé, Marcel Stiquel n’en est pas pour autant libéré. Il réintègre le camp d’Aincourt. Quelques semaines plus tard, les 27 et 28 juin 1941, deux convois quittent le sanatorium-prison sous escorte française. Marcel Stiquel est du nombre : « Nous sommes 87 habitants de Seine-et-Oise à être livrés aux Allemands qui nous transportent au fort de Romainville. Nous y restons deux jours. C’est ensuite le trajet en train Le Bourget-Compiègne avec plusieurs centaines d’autres camarades sous bonne garde. Pendant la traversée de Compiègne à pied, la population nous regarde passer, sans dire un mot, sans un geste. Tout à coup nous entonnons “La Marseillaise” et crions “Des Français vendus par Pétain”. Au camp de Royallieu, nous sommes fouillés et devenons des numéros. J’ai le matricule 847. »
La visite médicale, formalité dérisoire, n’empêche pas que des malades, des gens âgés et des mutilés de 1914-1918 décorés et pensionnés pour avoir sauvé à l’époque leur pays de l’envahisseur, se trouvent livrés vingt ans après, aux mêmes ennemis par un homme qui dut sa gloire à leur sacrifice !
Pendant plus d’un mois, les arrivées se succèdent en provenance de toute la France occupée. À la mi-juillet, ce sont ceux de la Vienne. Il y a parmi eux le postier Marcel Couradeau : « 22 juin 1941, je viens de terminer mon service de nuit au centre de tri de Poitiers-Gare. Je rentre à la maison, mais cette fois je prends le chemin des écoliers. J’ai des tracts contre Vichy et l’occupant à mettre dans les boîtes aux lettres, à glisser sous les portes… À six heures, je suis chez moi. À midi, ma femme me réveille. Elle est pâle. Ça y est, les bruits qui couraient depuis quelques jours sont confirmés : l’Allemagne attaque l’U. R. S. S… Il va falloir faire vite, sinon les Allemands ne seront pas longs à me cueillir. Mais on frappe à la porte. Trop tard, ils sont déjà là. Ce sont des policiers français, des civils. J’essaie de parlementer. Je me heurte à un mur. En fin d’après-midi, nous sommes six au poste de l’hôtel de ville. À 18 heures, la Feldgendarmerie nous emmène à la Chauvinerie, dans une baraque entourée de barbelés. Nous y serons bientôt près d’une quarantaine avec un fort contingent de Châtellerault et quelques femmes…
« 14 juillet 1941 : grand branle-bas pour un nouveau départ. Nous débarquons en plein midi dans la cour de la gare de Poitiers. Les amis, les parents sont là (les nouvelles vont vite). Ils veulent s’approcher. Les Allemands les repoussent brutalement.
« Dans le train qui nous emmène vers Compiègne, nous avons un wagon pour nous seuls. Notre brave Rocher est tout retourné. Fervent témoin de Jéhovah, il décide d’offrir sa vie pour la sauvegarde de la nôtre. Il s’ouvre les veines et se blesse profondément. À Orléans, on l’évacue… »
Le 24 juillet 1941, il y a déjà plus de 1 200 internés à Compiègne quand leur porte-parole, l’avocat parisien Michel Rolnikas, doit donner lecture à l’appel du soir d’un décret pris la veille par Hitler. Les internés sont considérés comme des otages qui répondront de tout attentat contre l’occupant commis dans leur région. Deux mois plus tard, le 19 septembre 1941, Michel Rolnikas et deux autres avocats communistes du barreau de Paris, Antoine Hadje et Georges Pitard, sont les premiers otages de Compiègne fusillés par les nazis. Il y en aura des centaines et des centaines d’autres. Ils sont désignés en général à l’appel du vendredi soir et, dès lors, isolés dans une chambre aux fenêtres calfeutrées, avec sentinelles et
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