Serge Fiori : s'enlever du chemin

Beatles.
    C’est ainsi qu’ils assistent à une comédie musicale sur les
Fab Four , et lorsque les deux voyageurs découvrent le quartier des théâtres, c’est un nouveau choc   ; un univers dédié
à la créativité s’offre à eux, des centaines de spectacles y
sont donnés chaque soir, et on y offre le thé à l’entracte   ! Ils
se gavent de ces spectacles. D’un concert à l’autre, de bars
en théâtres, ils visitent les plus prestigieuses salles   : The
Richmond Theatre, où les Rolling Stones ont fait leurs débuts, Le Marquee Club, qui a reçu The Kings et The Who, le
Roundhouse, où ils assistent aux spectacles des Badfinger
et de Colin Blunstone. Ils visitent aussi les musées et voient
beaucoup de films   ; comme les billets de la première rangée
sont à prix réduit, ils assistent aux représentations les yeux
collés sur l’écran géant. Boulimiques, assoiffés, avides, les
deux voyageurs assistent à tout ce qu’ils peuvent s’offrir,
dont Hair et, surtout, l’opéra rock Jesus Christ Superstar, interprété par la distribution originale, avec Andrew Lloyd
Webber lui-même dans la salle. Quel moment   ! Surtout
pour Fiori qui, depuis plusieurs mois déjà, écoutait chez
lui, en boucle, le microsillon qui a donné lieu au spectacle   ;
voilà qu’il se trouve ici, à Londres, dans cette salle, près
de Webber et devant toute la troupe   ! Ils ont la piqûre. Et,
étant donné que pour un maigre cinquante sous, ils peuvent assister à peu près à n’importe quel spectacle, il n’en
faut pas plus pour mener Serge et Réal au faîte du bonheur.
Quoi qu’il advienne durant le jour, ils vont assister à une
représentation le soir.
    Au cours des semaines qui suivent leur arrivée en Europe, le duo assiste ainsi à des dizaines et des dizaines de
spectacles, dans tous les pays qu’il traverse. Les amis vont
au cinéma, assistent à des pièces de théâtre, à des spectacles de musique rock, à des comédies musicales, et à des
spectacles de chanson française, de musique jazz et de
musique classique. En Allemagne, par exemple, ils se faufilent et, pour un demi-dollar, ils dénichent une place au
balcon de la Philharmonie de Berlin, où se produit l’Orchestre philharmonique de Berlin, sous la direction de Von
Karajan, exécutant une symphonie de Mahler.
    En France, ils se régalent de spectacles et de pièces évoquant Brel, Brassens ou Ferré. Ils arrivent dans la Ville lumière à une heure si tardive qu’ils s’arrêtent à l’office du
tourisme pour trouver un endroit où héberger «   vraiment
pas cher   ». Ils se font proposer un petit hôtel où ils déposent leurs valises en vitesse avant de foncer vers les bars.
Au retour, ils auront la surprise de constater que leur petit hôtel économique est en réalité une maison de passe   !
Le bruit incessant du va-et-vient les empêche de dormir,
mais ils sont morts de rire.
    En Autriche, à Vienne, ils profitent de billets achetés
pour quelques sous afin d’assister à des concerts célébrant
Mozart   ; ils sont juchés dans les corbeilles, tout en haut du
théâtre.
    Après moult déplacements et après avoir assisté à de
nombreux spectacles, ils se retrouvent en Belgique, à Anvers   ; ils s’y sont rendus après un long trajet en train, sur le
pouce . Ils y assistent au premier show à vie de Paul McCartney sans les Beatles. Le bassiste des Fab Four est alors en
train de former The Wings, et il donne l’impression d’un
artiste qui reprend tout à zéro. Sur la scène, aucun décor,
sinon des instruments empilés les uns sur les autres   ; Paul
arrive avec deux heures de retard et les musiciens branchent eux-mêmes tous les instruments et les appareils de
sono, comme un groupe débutant. Mais c’est Paul… Sir
Paul McCartney   !
    En Italie, où les deux Québécois achèvent leur périple,
Serge est reçu comme l’enfant prodigue. Les membres de
la famille Fiori l’hébergent, ainsi que son compagnon de
route, à tour de rôle, à la ville ou à la campagne. Les tables
regorgent de nourriture, les gars se gavent et sont ballottés d’un endroit à l’autre par les cousins et les oncles. La
famille leur offre, pour le voyage de retour à Londres, où
ils doivent reprendre un avion pour Montréal, un luxe rare
depuis leur départ, il y a deux mois   : une place avec couchette dans le train   !
    Après huit semaines,