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Services Spéciaux - Algérie 1955-1957

Services Spéciaux - Algérie 1955-1957

Titel: Services Spéciaux - Algérie 1955-1957 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Aussaresses
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Mes correspondants n’étaient pas tous des enfants de chœur mais ils trouvaient leur intérêt à travailler avec moi. J’ai poussé plusieurs de ces informateurs dans le maquis. Une méthode plus sûre que d’utiliser des gens déjà en place. Issolah, de son côté, avait infiltré le FLN. La nuit, il mettait un bleu de chauffe et partait prendre le café avec les rebelles. Il avait même entraîné un sous-officier incrédule. Le garçon était blond et Issolah l’avait fait passer pour un Kabyle qui ne comprenait pas l’arabe.
    J’abattais un travail énorme. Heureusement, pour l’essentiel, il ne s’agissait pas de torturer, juste de parler avec des gens. Ces conversations étaient souvent amicales. Pour nos relations publiques, nous nous servions de tout ce que nous pouvions et même de notre stock de cartouches. À cette époque, l’armée française avait un problème d’approvisionnement en armes de qualité. Les gradés étaient obligés de se fournir dans le commerce. Mais nous ne manquions pas de cartouches. Nous avions des séances de tir régulières où l’armurerie nous dotait de grosses quantités de munitions. Plus que nous ne pouvions en tirer. De ce fait, les sous-officiers disposaient de réserves et en faisaient bénéficier leurs amis policiers.
    Il n’y avait d’ailleurs pas que les policiers qui étaient demandeurs. Les pieds-noirs, eux aussi, s’étaient armés et il leur fallait des munitions.
    Le gérant du dépôt de matériel, un sergent-chef d’origine corse qui n’avait pas froid aux yeux, vint ainsi me trouver :
    —  Mon capitaine, les munitions sont rares pour les honnêtes gens. On m’en demande, mais je ne peux pas en donner. Si vous pouviez monter un exercice bidon et me céder quelques caisses, je vous garantis que j’en ferais un bon usage,
    —  Et à qui les donneriez-vous ?
    —  À mes compatriotes de Philippeville, bien entendu !
    Les dénonciations commencèrent à affluer. À la campagne, nombreux étaient les douars 27 hostiles par principe au FLN. Outre le souci de vivre en paix, il y avait aussi des raisons privées, des rancunes. Des histoires de femmes le plus souvent. Bien entendu, lorsque j’obtenais des informations pouvant renforcer l’hostilité des musulmans à l’égard du FLN, je ne manquais pas de m’en servir. Il n’était pas rare non plus que les rebelles se dénoncent les uns les autres.

Le 18 juin
    Le FLN n’avait pas réussi, comme il l’avait pourtant espéré en lançant l’insurrection de novembre 1954, à entraîner massivement la population dans son sillage. Contrairement à une croyance fort répandue, cette insurrection n’avait pas fait tache d’huile. On peut même affirmer qu’au printemps 1955, elle s’essoufflait. Le FLN changea donc radicalement de tactique. Désormais, la rébellion aurait systématiquement recours au terrorisme et viserait les populations civiles. Aussi bien les Européens que les musulmans réputés « amis » de la France.
    Le FLN pouvait, sans trop de difficultés, subjuguer les campagnes, mais dans les villes il avait du mal à s’implanter. C’est donc là que le terrorisme allait se développer.
    Au printemps de 1955, après plusieurs mois d’un attentisme que l’instabilité politique avait renforcé, le pouvoir comprit enfin à quel point la situation se dégradait. Il lui fallait éviter à tout prix la guérilla urbaine.
    Le nouveau gouvernement présidé par Edgar baure , avec Maurice Bourgès - Maunoury à l’Intérieur en remplacement de François Mitterrand et Robert Schuman à la Justice, décida enfin de contre-attaquer.
    Le 3 avril, le Parlement vota la loi de l’état d’urgence qui permettait notamment de resserrer les liens entre la police et les services militaires de renseignements. C’était une façon d’institutionnaliser ce que je pratiquais déjà officieusement. D’une manière plus générale, l ’ action militaire et l’action policière allaient dorénavant être étroitement associées.
    Dans les jours qui suivirent, l’état d’urgence tut décrété dans les zones les plus touchées par le FLN.
    On craignait que les choses ne s’enveniment à l’occasion du ramadan qui, cette année-là, devait avoir heu au mois de mai. De fait, durant cette période, il y eut une sensible recrudescence des attentats.
    Un conseil interministériel décida à la mi-mai de renforcer les moyens militaires et de porter les troupes françaises en

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