Spartacus
établi, c’est le nom de celui qui doit mener les opérations contre les brigands du Vésuve, le préteur Claudius. Plutarque lui attribue ce titre de préteur, mais Tite-Live lui donne seulement le rang de légat, c’est-à-dire l’équivalent de général. Difficile de dire précisément qui est ce Claudius désigné pour affronter Spartacus 54 . Exemple typique de l’imperfection de nos sources anciennes, ou du travail de ceux qui les ont recopiées, les cinq historiens qui l’évoquent donnent trois noms différents : Tite-Live l’appelle Claudius Pulcher, Frontin, Plutarque et Appien nous donnent Clodius et Florus l’appelle Clodius Glaber 55 . Sans doute est-il un rejeton de l’illustre famille des Claudii qui a donné tant de consuls et de magistrats à la République. Vingt ans plus tôt, un Caius Claudius Pulcher était consul de la République. Peut-être est-il aussi un proche parent de Publius Claudius Pulcher. En 73, ce dernier n’a pas vingt ans et ne pourrait donc commander une armée. Publius Claudius Pulcher deviendra plus tard un redoutable démagogue allié à César. Par opportunisme, il changera même son nom aristocratique en Clodius pour lui donner une connotation plus populaire. Cette ambiguïté du nom peut expliquer les différentes graphies adoptées par Frontin, Appien et Plutarque. En attendant, ce Claudius à qui le Sénat confie une armée ne doit pas être dépourvu de qualités puisque Salluste le qualifie de « grand par son courage et sa vigueur 56 ». D’après Plutarque, le Sénat lui attribue 3 000 hommes, soit environ la moitié d’une légion ou six cohortes. Certes, ces soldats sont de jeunes recrues encore mal dégrossies, mais 3 000 hommes demeurent largement suffisants. Même si la petite centaine de gladiateurs a déjà recruté d’autres esclaves en fuite, la troupe doit cruellement manquer d’armes. Il y a fort à parier que les armes de gladiateurs jetées avec dédain par ces derniers ont déjà été récupérées par des fugitifs moins regardants sur l’origine de ces lames. Malgré cela, Spartacus doit être bien en peine d’équiper correctement les hommes qui se sont ralliés à lui. Bien qu’ils soient encore des tirones , des « bleus », les soldats de Claudius sont suffisamment nombreux pour écraser cette intolérable révolte avant qu’elle ne fasse plus de dégâts.
Le siège du Vésuve
Après quelques jours de marche sur la via Appia, la troupe de Claudius arrive en Campanie. Au loin, la silhouette sombre du Vésuve se détache vers le sud. Sur la voie romaine qui relie Capoue au massif montagneux, les 3 000 soldats venus de Rome accompagnés de dizaines de mulets, de chariots et de valets d’armes ne passent pas inaperçus. Spartacus et ses hommes ont largement le temps de se retirer derrière leurs fortifications et d’attendre l’ennemi. Comme le souligne Plutarque, l’accès au camp des fugitifs ne peut se faire qu’en empruntant « une seule issue étroite et difficile ». Après quelques tentatives, Claudius doit bien admettre qu’il ne pourra pas prendre la place de vive force. Inutile de risquer la perte sans gloire de soldats qui seraient écrasés sous les rochers que lancent les esclaves du haut de leur camp. Rien ne presse. Tant que les Romains tiennent le seul sentier permettant d’accéder au sommet, les révoltés ne pourront plus nuire à personne. La faim et la soif finiront par avoir raison d’eux. Rapidement, les hommes de Claudius établissent leur propre camp. Pour faire face à toute tentative désespérée de sortie, ils établissent un fossé profond et une palissade au débouché du sentier. Comme les assiégés ne peuvent espérer aucun secours venant de l’extérieur, Claudius ne prend pas la peine de fortifier le reste de son camp. Les quelques centaines de tentes où s’abritent ses hommes sont régulièrement ordonnées au milieu des vignes qui montent vers le sommet. La troupe romaine est abondamment ravitaillée par les opulentes villes de la région. Un siège sans gloire mais sans risque peut commencer. Les principaux ennemis sont la chaleur et l’ennui. Les sentinelles placées sur la palissade veillent jour et nuit, les yeux fixés sur l’étroit chemin escarpé. Elles attendent le moment où les esclaves viendront à genoux faire leur reddition. Pendant ce temps leurs camarades jouent aux dés, ou somnolent sous les tentes en attendant leur tour de garde.
Quelques
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