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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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d’Erasme. Le grand humaniste de la Renaissance, c’est l’humaniste de toujours, l’homme qui croit en l’homme, aux vertus positives de son histoire.
     
    « Erasme a aimé beaucoup de choses qui nous sont chères, écrit Zweig : la poésie et la philosophie, les livres et les œuvres d’art, les langues et les peuples, et, sans faire de différences entre les hommes, l’humanité tout entière, qu’il s’était donné pour mission d’élever moralement. Il n’a vraiment haï qu’une seule chose sur terre, parce qu’elle lui semblait la négation de la raison : le fanatisme. Il était lui-même le moins fanatique des hommes ; son esprit n’était pas d’une puissance extraordinaire, mais sa science était immense ; on ne peut dire que son cœur débordât de bonté, mais il était loyal et bienveillant. Erasme voyait dans l’intolérance le mal héréditaire de notre société. »
     
    Il suffit de lire Erasme pour comprendre Zweig et même le connaître. C’est sa vraie carte d’identité. Son passeport pour le monde. L’essai est admirable. Il est écrit de la plume la plus pure, la plus émouvante, la plus sincère. Mais il est davantage encore : un message pour sa génération, et un testament pour les générations futures. La mélancolie en tisse la toile de fond ; Zweig a sous-titré son livre « Grandeur et décadence d’une idée ». Il ne croit pas à la permanence de l’humanisme, il le voit gravement décadent, menacé par les jeunes philosophies aux programmes conquérants et tonitruants, et il se demande avec angoisse s’il peut espérer en une résurrection prochaine de ses valeurs. En un prodige digne de la légende : l’humanisme sera-t-il capable de renaître de ses cendres ? Et avec lui, Erasme, ce phare universel ?
     
    Le 15 septembre 1933, Klaus Mann, auquel il a refusé sa collaboration à Die Sammlung , une revue que le jeune écrivain a créée pour regrouper les intellectuels de langue allemande en exil, lui reproche – exactement comme Joseph Roth – de vouloir « rester à l’écart », et malgré ce qu’il appelle ses « contributions apolitiques », de n’être pas « du côté de ceux qui s’expriment contre les dirigeants allemands ». Zweig lui répond simplement, trois jours plus tard, qu’il désapprouve la politisation de sa revue, dont il regrette qu’elle ne soit pas assez « génératrice de liens » : « Il me paraît aujourd’hui de la plus haute importance d’éviter que la littérature ne dégénère en une littérature d’émigrants et en une littérature d’Etat. » Surtout, dans une autre lettre au ton moins théorique, plus mélancolique, le 23 novembre, il lui rappelle sa position érasmienne : « Je tiens, et j’ai toujours tenu, pour plus important d’être publiquement écarté par la force d’une position libre et indépendante, que de décider de partir de son propre chef. Vu de l’extérieur par nos contemporains, cela n’est pas, j’en conviens, très héroïque. » Il donne à héroïque un tout autre sens que le sens militaire habituel. N’est pas héros celui qui remporte la victoire, mais celui qui sait assumer intérieurement son choix, en toute conscience.
     
    « Ne pas devenir combatif, inflexible, car les inflexibles triomphent par leur brutalité […], écrira-t-il à Joseph Roth, quelques années plus tard. Se laisser ridiculiser pour sa faiblesse, au lieu de trahir sa nature. »
     
    Toute l’année 1933 se déroule pour lui dans cette incertitude et cette souffrance à ne pouvoir choisir, à subir le double malaise de n’être d’aucun parti, et de voir, un à un, s’éloigner les amis. Il se justifie auprès d’eux de son attitude, qui paraît à quelques-uns une erreur, et aux autres une énigme. A Hans Carossa, le 13 novembre, Zweig parle de son « incapacité à répondre » et même de son « impuissance ». « Je n’ai jusqu’ici répondu aux événements qu’intérieurement avec désarroi et le fait que je n’aie rien su faire d’autre m’a attiré de nouvelles haines », poursuit-il dans sa lettre. Paralysé par son « incapacité à haïr ou à répliquer à la haine », il ne peut que suivre en toute intégrité, son propre chemin. Même s’il doit y marcher seul. L’idée de l’exil le tourmente mais il espère encore pouvoir l’éviter. A Franz Masereel, dès le 15 avril 1933, il a confié le cœur de son dilemme : « Toute forme de

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